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leans, où étoit le Noviciat,& il le reçut avec le nom de Frere RELIGIEU Jofeph le 2. Février 1599.

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CONGRE-

Sa mere qui étoit au Tremblai & qui le croïoit à Paris ap- GATION DU prit bien-tôt ce changement. Elle alla se jetter aux pieds du CALVAIRE. Roi qui lui accorda des Lettres de Juffion aux Capucins d'obéïr à un Arrêt du Parlement qui ordonnoit que fon fils lui feroit rendu. Le Procureur Général s'y transporta de la part du Roi pour faire executer ses ordres. Sa mere y fut auffi; mais le même efprit qui avoit infpiré au Frere Jofeph de fe retirer du monde lui donna la force de convaincre fi bien fa mere du bon choix qu'il avoit fait,que non feulement elle y confentit,mais encore elle le fortifia dans son deffein & l'exhorta à remplir fidellement les devoirs de la Regle qu'il embraffoit. Elle revint à Paris après avoir obtenu du Provincial que fon fils y viendroit faire ses vœux au Couvent de la ruë faint Honoré. Cette cérémonie fe fit le 3. Février 1600. avec beaucoup d'éclat. Toute fa famille s'y trouva, & il fit profeffion entre les mains du Pere Ange auparavant Duc de Joïeufe.

Comme il avoit fait fa Philofophie dans le monde, on l'envoïa étudier en Theologie à Chartres : à la fin de fon cours il prit l'Ordre de Prêtrife, & vint enfuite profeffer la Philofophie au Couvent de la rue faint Honoré à Paris. Après avoir fini fon cours il fut fait Maître des Novices & s'adónna enfuite à la prédication. Il ne prêcha pas feulement des Carêmes entiers en plufieurs grandes villes du Roïaume; mais il entra en lice avec les Herétiques, & il en convertit plufieurs. Ce fut dans le cours de fes Miffions qu'il eut plufieurs conferences avec la Mere Antoinette d'Orleans qui avoit été tirée du Monaftere des Fetillantines de Toulouse pour aider l'Abbeffe de Fontevraud à mettre la Réforme dans cet Ordre. Cette Princeffe aïant remarqué dans le Pere Jofeph de grands talens, obtint de fes Superieurs qu'il fût rappellé du Couvent de Rennes où il étoit pour lors Gardien, & mis dans un Couvent plus proche d'elle, pour avoir la commodité de travailler avec lui à cette Réforme avec plus de diligence. En effet il rétablit en peu de tems la régularité dans le Monaftere de Hautebruiere & retourna à Fontevraud pour en rendre compte à l'Abbeffe & à la Mere Antoinette d'Orleans,à laquelle il perfuada de quiter fon habis

Tome VI.

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CALVAIRE.

RELIGIEU de Feüillantine pour prendre celui de Fontevraud & d'acCONGRE cepter la Coadjutorerie, ce qu'elle avoit refufé jusqu'alors, GATION DU S'avifant pour cet effet d'un expedient,qui fut d'obtenir du Pape un nouveau Bref adreffé à la Mere Antoinette d'Orleans, par lequel fa Sainteté lui ordonna, fous peine d'excommunication, d'accepter cette Charge de Coadjutrice & de prendre le gouvernement de l'Ordre. Ainfi cette Princesse le trouvant obligée de fe foumettre,prit l'habit de cetOrdre, & la Communauté qui avoit été fort partagée à fon fujet, le trouva par ce moïen tout d'un coup réünie.

Ce Monaftere Chef de l'Ordre aïant été auffi réformé auffi bien que les autres Maifons qui en dépendoient, par les foins du Pere Jofeph, comme nous avons dit en fon lieu, l'Abbeffe de la Trinité de Poitiers le pria de lui donner fes avis fur la Réforme qu'elle vouloit introduire dans fa Communauté. Il partit auffi tôt du Monaftere de l'Encloître, où il avoit établi la régularité, & vint à celui de la Trinité de Poitiers, où il changea entierement le cœur des Religieufes qui fe foûmirent avec joïe à cette Réforme.

La Mere Antoinette d'Orleans qui n'avoit accepté la Coadjutorerie de Fontevraud que pour éviter les cenfures de l'Eglife dont elle étoit menacée, écrivit au Pape à l'infçu de tout le monde,& lui repréfenta des raifons fi fortes pour en être déchargée, que fa Sainteté fe laiffa vaincre & adreffa un Bref au Cardinal de Joïeufe portant commiffion d'examiner ses raisons & de lui permettre,s'il les trouvoit bonnes, de quiter fa Charge, & elles parurent à cette Eminence fi pleines d'équité qu'il les approuva & lui rendit toute fa liberté, lui permettant de retourner aux Feüillantines de Toulouse, ou de demeurer dans une Maifon de l'Ordre, comme elle le jugeroit à propos. Elle tint néanmoins cette affaire fecrette jufqu'à la mort de la Princeffe fa tante qui arriva l'an 1611. pour lors fe trouvant en liberté d'agir felon fon inclination & felon la permiffion qu'elle en avoit obtenuë du faint Siége, elle ne voulut pas fe mettre en poffeffion de l'Abbaïe, & obtint du Roi un confentement pour proceder à l'éléction d'une nouvelle Abbeffe : le fort tomba fur Loüife de Lavedan de Bourbon, & la Mere Antoinette d'Orleans fe retira au Monaftere de l'Encloiftre où elle ne voulut retenir auprès d'elle que les Religieufes qu'elle crut les plus portées à la vie aufte.

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re qu'elle vouloit pratiquer. Douze filles du Chocur & fept RELIGIEUS Converses se crurent affez de courage & de forces pour fui- CONGRE vre fon exemple, & il en vint d'autres de plufieurs Maifons GATION DU de l'Ordre,qui voulurent embraffer la Réforme qu'elle vouloit établir dans celle de l'Encloître.

Le Pere Joseph alla à Tours vers la fin de l'année 1611. afin qu'après s'être emploïé avec fuccès à tant de travaux fpirituels pour le falut du prochain, il pût dans la retraite fonger au bien fpirituel de fon ame; mais il ne put joüir longtems de ce repos qu'il s'étoit propofé en retournant à Tours: car dès qu'il y fut arrivé, il fut élu Deffiniteur dans le Chapitre Provincial qui s'y tint. Peu de tems après le Provincial aïant été obligé d'aller à Rome au Chapitre Général, le Pere Jofeph fut nommé Commiffaire pour faire la vifite dans toutes les Maifons de la Province ; & au premier Chapitre il fut élu Provincial. Pendant qu'il rempliffoit les devoirs de fa Charge, il ne laiffoit pas de travailler avec la Mere Antoinette d'Orleans à mettre la Réforme dans l'Ordre de Fontevraud. Il lui en procura un plein pouvoir dans la Bulle qu'il follicita auprès du Pape Paul V. par laquelle en la nommant Coadjutrice de Loüife de Bourbon Lavedan, comme elle l'avoit été d'Eleonore de Bourbon fa tante, sa Sainteté lui permettoit de nommer conjointement avec l'Abbeffe,des Superieurs dans les Couvens, fans avoir égard aux élections, de vifiter ou faire vifiter les Couvens par les Religieux qu'elle jugeroit à propos, & d'établir un Seminaire, où feroient reçues celles qui voudroient embraffer une vie plus réguliere.

CALVAIRE,

Le Couvent de l'Encloître parut propre au Pere Jofeph & à la Mere Antoinette d'Orleans, pour l'execution de ce Bref. Il fut bien-tôt rempli de Novices & de Religieufes qui y vinrent de toutes parts, attirées par la réputation de cette Princeffe, & de celles qui fuivirent fon exemple avec un zele qui furprit tout le monde. La pieté de ces Filles venues des autres Couvens étoit fi grande,qu'elles déclarerent à la Mere Antoinette d'Orleans qu'elles fe fentoient affez de forces pour pratiquer la Regle de faint Benoît dans fa plus étroite Obfervance, & fans aucun adouciffement; qu'elles n'étoient venuës la trouver que dans cette intention, & qu'elles la fupplioient de vouloir y contribuer.Cependant comme le P. Jofeph

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RELIGITU. VOïoit que toutes les Religieufes n'étoient pas dans la même difpofition, & qu'on ne pourroit pas exiger de ces moins GATION DU Zelées, une vie fi rude & fi auftere, il pria l'Evêque de PoiCALVAIRE tiers de vouloir donner un endroit dans fon Diocêfe, où l'on

pût bâtir un Monastere, dans lequel les Filles zelées se reti• reroient avec la Mere Antoinette d'Orleans,pour y vivre fous fa conduite dans la pratique de la pieté la plus auftere. L'Evêque y confentit volontiers, & la ville de Poitiers accorda une place dans le quartier faint Hilaire. Il falloit,pour réüffir,avoir le confentement du Pape, & une Bulle nouvelle, qui permît à la Mere Antoinette d'Orleans de quitter l'Ordre de Fontevraud, & de faire fortir avec elle toutes les Filles qui la voudroient fuivre. L'Abbeffe de Fontevraud confentit à cette fortie : & comme le Pere Joseph ne doutoit point qu'on n'accordât ce qu'il demandoit, il fit jetter les fondemens de ce nouveau Monaftere à Poitiers, dont la premiere pierre fut pofée vers la fin de l'année 1614. au nom de la Mere Antoinette d'Orleans, qui en étoit la Fondatrice.

Les intrigues & les négociations d'Etat aufquelles le Pere Jofeph eut beaucoup de part,l'aïant obligé de faire un voïage à Rome par ordre du Roi, il eut occafion dans les Audiences qu'il eut du Pape, de lui parler de la fondation du nouveau Monaftere de Poitiers, qui devoit être dédié fous le nom de Nôtre Dame du Calvaire, & du deffein qu'avoit la Mere Antoinette d'Orleans, & quelques Religieufes de Fontevraud d'y pratiquer la Regle de faint Benoît dans toute sa pureté. Le Pape l'approuva, & promit d'envoïer à cette Princeffe un Bref, par lequel il lui donneroit permiffion de fortir de laMaifon de l'Encloître pour entrer dans celle qu'elle avoit fait bâtir à Poitiers ; de quitter l'habit de Fontevraud, de prendre celui qu'elle voudroit pour les Religieufes de ce Monaftere, d'y mettre telle nombre de Filles qu'il lui plairoit, & d'établir d'autres Monafteres dans les villes d'Angers, de Laval, de faint Paul de Leon, & autres.

Le Pere Jofeph fortit de Rome le 10. Mars 1617. & n'arriva en France qu'au mois d'Août de la même année. Il attendit le Bref du Pape pour la fortie de la Mere Antoinette d'Orleans; & pendant ce tems-là il obtint des Lettres Patentes du Roi pour ce nouvel établiffement. Elles furent expediées le 4. Octobre de la même année, avec deux Lettres

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de Cachet adreffées, l'une au Doïen du Chapitre de Poitiers, RELIGIEU& l'autre au Lieutenant Particulier de cette ville, Commif- CS DE LA faires du Pape & du Roi,qui allerent prendre cette Princeffe GATION DIF à l'Encloître avec vingt-quatre Religieufes, & la mirent en poffeffion de ce nouveau Monaftere le 25. Octobre fuivant. C'est ce même Monaftere qui aïant fervi de berceau à l'Ordre du Calvaire, l'a fait regarder comme la Fondatrice, quoiqu'elle ne s'y retirât avec ces vingt-quatre Religieufes, que pour y obferver la Regle de faint Benoît avec plus de perfection: de même que faint Robert eft reconnu pour le Fondateur de l'Ordre de Cîteaux, quoiqu'en quittant l'Abbaïe de Molefme pour fe retirer avec fes Compagnons dans le defert de Cîteaux, où il jetta les fondemens de l'Abbaïe qui eft devenue Chef de cet Ordre, il n'ait point eu intention de fonder un Ordre nouveau ; mais feulement d'y vivre dans une Observance plus exacte de la Regle de faint Benoît.

L'Abbeffe de Fontevraud qui avoit donné d'abord fon confentement pour la fortie de cette Princesse, voulut le retirer, fe perfuadant que l'établissement de cette Maison de Poitiers donnoit atteinte à son autorité & en bornoit l'étenduë; & elle prétendoit que le Pape n'avoit pû lui accorder un Bref de tranflation fans fon confentement; c'eft pourquoi elle s'oppofa à tout ce que fit la Mere Antoinette d'Orleans, & appella comme d'abus du Bref du Pape, aïant porté l'inftance devant les Juges ordinaires; mais le Roi n'étant pas content de ce procede leur en ôta la connoiffance, & donna commiffion au Cardinal de Sourdis Archevêque de Bourdeaux pour terminer ce differend.

La Reine Mere fe déclara Protectrice du nouveau Monaftere; mais les procedures aïant tiré en longueur, les oppofitions ne purent être levées avant la mort de la Mere Antoinette d'Orleans qui arriva le 25. Avril 1618. fans avoir obtenu le confentement des Feüillans pour retenir leur habit & être fous leur Jurifdiction: fon cœur- & fes entrailles demeurerent au Couvent de Poitiers, mais fon corps fut à celui des Feüillantines de Toulouse, comme elle porté l'avoit fouhaité:il y fut accompagné par le Duc de Retz fon fils avec tous les honneurs dûs à une perfonne de sa naisfance. Les Religieufes du Monaftere de Poitiers fe crurent

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