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rejailliffoit fur le fils, Philippe lui témoigna une amitié fi diftinguée, qu'elle le fit bien-tôt regarder comme un Favori; & malgré fa jeuneffe, il hérita de la confiance d'un Maître, qui ne l'accorde qu'à ce qu'il croit, & à ce qui eft infiniment estimable.

la

Le Comte des Barres , que France regarde, avec raifon, comme un Héros naiffant, qui lui promet un jour un grand homme, fe lia d'une tendre amitié avec Alberic, & devint après lui l'homme de la Cour, qui paroiffoit le plus agréable au Roi. Vous fçavez que par leur caractere, & par leurs grandes qualitez, ils fe confervent, & juftifient l'eftime dont Philippe les honore. C'eft à cette eftime qu'Alberic doit depuis la mort de fon Oncle, la nouvelle dignité de Maréchal de

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France; & des Barres, celle de Grand Sénéchal.

La juste ambition du Roi, pour réprimer l'orgueil & la tirannie des Souverains qui relevent de fa Couronne, s'eft déja fait sentir au Duc de Bourgogne ; & ce Camp magnifique, n'est qu'un effet de la prévoïance de ce Duc, qui veut faire connoître à Philippe quelles font fes forces, parce qu'il craint les fiennes.

Roger finit fon récit en cet endroit. Raoul lui voïant garder le filence, lui dit : A préfent que vous avez fatisfait ma curiofité par un détail d'autant plus intéreffant pour moi, que vous en étiez l'objet, & que je voulois fçavoir, de votre bouche même, les circonftances de la mort de Henri; apprenez-moi ce qui vous regarde.

Un jour que je me promenois

avec mon pere, reprit Roger, il me dit en m'embraffant: Mon fils, ne me refusez pas ce que je vais vous demander. Oubliez que je fuis votre pere, je crains ce titre auprès de vous; il pourroit me coûter trop cher, en supprimant, de votre part, une confiance que j'exige comme votre plus tendre ami. N'aïez rien de caché pour moi ; ; vous trouverez > dans l'amitié que j'ai pour vous, cette douceur qui en fait le charme. Je fuis affez heureux pour croire votre cœur exempt de viçes; mais vous êtes dans l'âge où il eft difficile qu'il le foit de toute foibleffe: je ne les appréhende point; vous avez de la raison, ainfi ne craignez pas de me les avoüer. Aïons l'un pour l'autre, une entiere ouverture de cœur ; je vous communiquerai tous mes deffeins, j'entrerai dans toutes

les raifons que vous y oppoferez, & ne les combattrai point en pere qui veut être obéi. Je ne veux, mon fils, vous contraindre fur rien; je ne fuis occupé que de votre bonheur: fi votre cœur eft prévenu en faveur de. quelque perfonne de la Cour, faites-m'en, fans feinte, la confidence. Je ne dois pas me faire un mérite auprès de vous, répon dis-je, de la docilité que vous me trouverez à faire tout ce que vous pourrez defirer. L'ardeur de plaire au Roi, l'ambition de mériter fon eftime, & le defir d'acquérir de la gloire, en profitant des leçons & des exemples de mon Oncle, ont jufqu'à ce mo ment rempli mon cœur ; l'amour ne s'en eft point encore rendu le maître ; j'ignore l'effet de ces impreffions vives, qui, en troublant. la raifon, s'effacent fi difficile.

ment. Il peut m'avoir favorifé de quelques-uns de ses plaisirs; mais il a bien voulu m'épargner la peine de porter des chaînes trop pefantes: heureux! s'il me traite toujours de même. Je fuis charmé,me répliqua mon pere,de vous trouver libre de tout engagement: depuis long-tems je ménage pour vous un grand mariage dans cette Province.. Il ajouqu'étant unique héritier de

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fes biens & de fon nom,je ne pouvois trop tôt lui donner la douce fatisfaction de fe voir renaître dans mes enfans. J'entrai dans toutes fes raifons, & je l'affurai qu'il étoit le maître de ma destinée.

A quelques jours de-là, mon pere me dit qu'il convenoit que je vifitaffe les perfonnes diftinguées de la Province. Vous n'au rez pas de peine, pourfuivit-il,

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