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ment les éperons dans le ventre, pour le châtier de fon indocilité.

Enfin l'aide du pefer fur les étriers, eft la plus douce de toutes les aides; les jambes alors fervent de contre-poids pour redreffer les hanches & pour tenir le Cheval droit dans la balance des talons. Cette aide fuppofe dans un Cheval beaucoup d'obéiffance & de fenfibilité, puifque par la feule preffion qu'on fait en appuyant plus fur un étrier que fur l'autre, on détermine un Cheval à obéir à ce mouvement, qui fe fait, en pefant fur l'étrier de dehors, pour preffer & faire aller de côté un Cheval en dedans; en pefant fur celui de dedans, pour foutenir & retenir un Cheval qui fe prefe trop en dedans, ou bien en pefant fur les deux étriers également, pour l'avertir de diligenter fa cadence, lorfqu'il fe retient plus qu'il ne doit.

Il ne faut pas croire que cette grande fenfibilité, de bouche & de côtés puiffe fe conferver long-ten s dans les Chevaux qui font abandonnés à l'Ecole : les différentes mains qui les menent, leur font perdre cette fineffe & cette jufteffe, qui font tout le mérite d'un Cheval bien dreffé, & le fentiment du toucher fi délicat, s'émouffe avec le tems; mais s'ils ont été dreffés par des principes folides, lorqu'un homme de cheval viendra à les rechecher, il fera bientôt revivre ce qu'une fauffe pratique avoit amorti,

Des châtimens

LES aides n'étant, comme nous venons de la dire, qu'un avis qu'on donne au Cheval, qu'il sera puni, s'il ne répond pas à leur mouvement,

pu

les châtimens ne font par conféquent que la nition qui doit fuivre de près la défobéiffance du Cheval à l'avis qu'on lui donne ; mais il faut que la violence des coups foit proportionnée au naturel du Cheval; car fouvent les châtimens médiocres, bien jugés & faits à tems, fuffifent pour rendre un Cheval aifé & obéiffant; d'ailleurs, on a l'avantage de lui conferver, par ce moyen, la difpofition & le courage; de rendre l'exercice plus brillant, & de faire durer long-tems un Cheval en bonne Ecole.

On emploie ordinairement trois fortes de châtimens; celui de la chambriere, celui de la gaule & celui des éperons.

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La chambriere eft le premier châtiment dont on fe fert pour faire craindre les jeunes Chevaux, lorfqu'on les a fait troter à la longe, & c'eft la premiere leçon qu'on doit leur donner, comme nous l'expliquerons dans la fuite. On fe fert encore de la chambriere pour apprendre à un Cheval à piaffer dans les piliers: on s'en fert auffi pour chaffer en avant les Chevaux pareffeux qui fe retiennent & s'endorment, mais elle eft abfolument néceffaire pour les Chevaux rétifs, & ceux qui font ramingues & infenfibles à l'éperon, parce qu'il faut remarquer que le propre des coups qui fouettent, lorfqu'ils font bien appliqués & à tems, eft de faire beaucoup plus d'impreffion, & de chaffer bien plus un Cheval malin, que ceux qui le piquent ou qui le chatouillent.

On tire de la gaule deux fortes de châtimens. Le premier, lorfqu'on en frappe un Cheval vigoureufement derriere la botte, c'est-à-dire, fur le ventre & fur les feffès, pour le chaffer en avant.

Le fecond châtiment de la gaule, c'eft d'en appliquer un grand coup fur l'épaule du Cheval qui détache continuellement des ruades par malice, & ce châtiment corrige plus ce vice que les éperons, auxquels il n'obéira que lorsqu'il les craindra & les connoîtra.

Le châtiment qui vient des éperons, eft un grand remede pour rendre un Cheval fenfible & fin aux aides; mais ce châtiment doit être ménagé par un homme fage & fçavant: il faut s'en fervir avec vigueur dans l'occafion,mais rarement, car rien ne défefpere & n'avilit plus un Cheval que les éperons trop fouvent & mal-à-propos appliqués.

Les coups d'éperons doivent fe donner dans le ventre, environ quatre doigts derriere les fangles; car fi l'on appuyoit les éperons trop en arriere c'est-à-dire, dans les flancs, le Cheval s'arrêteroit & rueroit, au lieu d'aller en avant, parce que cette partie eft trop fenfible & trop châtouilleufe; & au contraire, fi on les appuyoit dans les fangles, ( défaut de ceux qui ont la jambe raccourcie & trop tournée en dehors,) alors le châtiment feroit inutile & fans effet.

Pour bien donner des éperons, il faut approcher doucement le gras des jambes, enfuite appuyer les éperons dans le ventre. Ceux qui oùvrent les jambes & appliquent les éperons d'un feul tems, comme s'ils donnoient un coup de poing, furprennent & étonnent un Cheval, & il n'y répond pas fi bien, que lorfqu'il eft prévenu & averti par l'approche infenfible des gras de jambes. Il y en a d'autres, qui avec des jambes ballant, châtouillent continuellement le poil avec leurs éperons, ce qui accoutume un Cheval à

quoailler,c'eft-à-dire,à remuer fans ceffe la queue en marchant, action fort défagréable pour toutes fortes de Chevaux, & encore plus pour un Cheval dreffé.

Il ne faut pas que les éperons foient trop pointus pour les Chevaux rétifs & ramingues, au lieu d'apporter remede à ces vices, on y en ajouteroit d'autres. Il y en a qui, lorfqu'on les pince trop vertement, piffent de rage, d'autres fe jettent contre le mur d'autres s'arrêtent tout-à-fait, & quelquefois fe couchent par terre. Pour accoutumer aux éperons les Chevaux qui ont ces vices, if ne faut les appliquer qu'après la chambriere, & dans le milieu d'un partir de main.

L'aide du pincer délicat de l'éperon, devient auffi châtiment pour certain Chevaux, qui font très-fins aux aides, & mêmes fi fenfible, qu'il faut fe relâcher tout-à-fait & ne point se roidir fur eux; car autrement, il feroient des pointes & des élans: ainfi le pincer, quelque délicat qu'il foit produit le même effet fur ces fortes de Chevaux & même un plus grand, que les coups d'éperon bien appliqués ne pourroient faire fur ceux qui n'ont qu'une fenfibilité ordinaire.

Il faut bien connoître le naturel d'un Cheval pour fçavoir faire un bon ufage des châtimens, en les proportionnant à la faute qu'il fait, & à la maniere dont il les reçoit ; afin de les continuer, de les augmenter, de les diminuer, & même de les ceffer felon fa difpofition & fa force : & il ne faut pas prendre toutes les fautes qu'un Cheval fait pour des vices; puifque la plupart du tems elles viennent d'ignorance, & fouvent de foibleffe.

On doit aider & châtier fans faire de grands

mouvemens; mais il faut beaucoup de fubtilité & de diligence; c'eft dans le tems que la faute eft commife qu'il faut employer les châtimens, autrement ils feroient plus dangereux qu'utiles; fur→ tout il ne faut jamais châtier un Cheval par humeur & en colere, mais toujours de fang froid;

enfin l'on peut dire que le ménagement des aides & des châtimens, eft une des plus belles parties de l'homme de cheval.

СНАРІ TRE I X.

De la néceffité du Trot pour affouplir les jeunes Chevaux, & de l'utilité du Pas.

MONSIEUR de la Proue ne pouvoit définir plus exactement un Cheval bien dreffé, qu'en difant, que c'eft celui qui a la foupleffe, l'obéiffance & la jufteffe; car fi un Cheval n'a le corps entiérement libre & fouple, il ne peut obéir aux volontés de l'homme avec facilité & avec grace, & la foupleffe produit inéceffairement la docilité, parce que le cheval alors n'a aucune peine à exécuter ce qu'on lui demande : ce font donc ces trois qualités effentielles qui font ce qu'on appelle, un Cheval ajusté.

La premiere de ces qualités ne s'acquiert que par le trot. C'est le fentiment général de tous les fçavans Ecuyers, tant anciens que modernes, & fi parmi ces derniers, quelques-uns ont voulu, fans aucun fondement, rejetter le trot, en cherchant

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