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la fente de la bouche. Quand on donne trop de fer à une bouche peu fendue, cela fait néceffairement froncer la levre, & de même fi la bouche est trop fendue, & que le mors ne foit pas affez gros, il va trop avant dans la bouche, c'est ce qu'on appelle boire la bride.

Il faut donner à un Cheval qui a la bouche bonne, un fimple canon avec une branche fur la ligne, parce que, quoiqu'une bonne bouche ne s'offense d'aucun mors, il est toujours mieux de lui en donner un doux, afin de lui conferver cette bonne qualité.

On entend par une bonne bouche, celle qui a l'appui ferme & léger, c'est-à-dire, qui ne s'ébranle point par le mouvement ferme d'une bonne main, ni par les autres mouvemens qu'on eft obligé de faire pour aider le Cheval.

Les bouches difficiles à emboucher, font les bouches trop fenfibles ou égarées, foibles, trop fortes, trop pefantes, trop ou trop peu fendues, celles qui ont la barbe trop petite, trop plate ou trop élevée, & enfin celles qui font qu'un Cheval s'arme.

Des Bouches trop fenfibles.

LA bouche trop fenfible, eft celle qui s'offenfe naturellement de toutes fortes de brides. Cette fenfibilité fe connoît lorfque pour le moindre mouvement de la main, le Cheval fecoue la bride, donne des coups de tête & bat à la main, ce qui arrive d'ordinaire aux Chevaux qui ont les barres hautes & tranchantes. La langue fe trouvant alors tout-à-fait logée dans le canal, elle ne peut foutenir l'appui du mors, qui, faifant trop d'effet fur les barres, eft caufe que le Cheval met fa tête en dé

fordre. Ces coups de tête peuvent auffi venir de meurtriffures & d'ulceres fur les barres & fur les gencives: accident caufé par des embouchures mal ordonnées, & fouvent par une mauvaise main. Quelquefois auffi la gourmette aura pu bleffer la barbe, qui eft une partie auffi fenfible que les barres à certains Chevaux. Il faut dans ce cas attendre que la plaie foit guérie & confelidée, avant que de fonger à l'emboucher; mais quand la barre a été tellement bleffée, qu'une portion de la fubftance de l'os eft tombée, quoique les bons remedes & la nature aient rempli la cavité: cette partie refte toujours plus foible & plus fujette à être offenfée.

Plufieurs hommes de Cheval fe font fervis juf qu'à préfent du canon à trompe pour emboucher les Chevaux qui ont la bouche trop fenfible, & qui donnent des coups de tête, parce que, difentils, ce mors n'étant point brifé, & étant tout d'u ne piece, il porte également par-tout, & par conféquent endort la partie. Pour moi, je fuis de l'avis de ceux qui difent qu'il eft plus convenable de leur donner un fimple canon, qui ne joue pas trop, enforte qu'il ait en même-tems la folidité du canon à trompe & la douceur du fimple canon; afin qu'il foit encore plus doux, & qu'il endorme la partie, il faut qu'il foit gros près des fonceaux autant que le permet la fente de la bouche, & qu'il ait peu de montant, c'est-à-dire, que le milieu du canon ne monte pas trop haut, afin de ne point chatouiller le palais.

Il faut avec cela que l'œil du banquet foit un peu bas & un peu renversé & courbé en arriere pour diminuer l'effet de la gourmette: car il est à

remarquer que plus l'œil eft haut, plus la gourmette fait d'effet.

A l'égard de la branche qui convient à ces fortes de Chevaux, on doit en choifir une dont la tournure foit aifée fur la ligne, & un peu longue : car il faut encore remarquer, comme nous l'avons dit ci deffus, qu'une branche longue contraint moins qu'une courte, parce qu'elle arrive plus facilement à la poitrine, ce qui foulage la barre & diminue l'appui du mors.

Des Bouches foibles.

LA bouche foible eft celle qui ne prend d'appui fur aucun mors que très-difficilement, quelque doux qu'il foit, fans pourtant battre à la main. Les Chevaux qui ont ce défaut, doivent être embouchés de la même façon que ceux qui ont la bouche trop fenfible, c'eft-à-dire, avec une fimple canon, une branche fur la ligne & un peu longue, & fur-tout l'œil bas.

Ceux qui croient, comme nous venons de le dire, pouvoir rectifier les bouches trop fenfibles ou trop foibles avec le canon à trompe, font dans l'erreur: car cette embouchure étant naturellement rude & par conféquent propre à réveiller les barres elle ne peut convenir que pour les bouches qui ont perdu leur fenfibilité naturelle, & principalement pour les Chevaux de carroffe, qui ont befoin d'un mors plus folide que les Chevaux de felle.

Des Bouches fortes.

ON entend par bouche forte, celle d'un Cheval

qui tire à la main Cette dureté provient ordinai-. rement, ou de l'épaiffeur de la langue, des levres & des gencives qui couvrent les barres & empêchent l'effet du mors, ou de ce que les barres font trop rondes & trop baffes. Quelquefois auffi un Cheval tire à la main par trop de fougue & d'apréhenfion, ou faute d'haleine. Dans ces derniers cas il faut l'appaifer par de bonnes leçons, & lui donner une bride convenable à la ftructure de fa bouche.

Mais s'il tire à la main pour avoir la langue trop groffe, les levres trop épaiffes, ou les barres trop rondes, il faut lui donner un mors à gorge de pigeon, avec liberté de langue: alors la langue étant dégagée, & ayant la liberté de fe loger dans l'efpace vuide du milieu du canon, le mors fera fon effet fur les barres. Les embouchures à liberté de la langue ont encore cela d'avantageux, qu'elles empêchent la langue de paffer par-deffus le mors.

Afin de rendre ces bouches encore plus fenfibles, il ne faut pas que le mors foit trop gros, mais il doit y avoir moins de fer près des fonceaux, en proportionnant pourtant la groffeur de l'embou chure à la fente de la bouche.

A l'égard de la branche, elle doit être un peu courte & hardie, fans pourtant l'être trop car en voulant trop contraindre un Cheval qui porte haut, au lieu de le ramener, le trop de fujétion le fait tirer à la main encore davantage.

Des Bouches pefantes.

UN Cheval pefe ordinairement à la main quand il a les barres épaiffes, charnues & baffes, la lan

gue trop groffe, l'encolure mal faite & trop épaif fe, la ganache quarrée & ferrée. Souvent auffi un Cheval a la tête pefante par foibleffe naturelle, foit aux pieds, aux reins ou aux hanches, ce qui fait que ces fortes de Chevaux fe méfiant de leur force, s'appuient inceffamment fur le mors, & s'en fervent comme d'une cinquieme jambe, en ce cas la bride ne remédie point à ces défauts. Il y a fouvent auffi des Chevaux qui pefent à la main par mauvaise habitude, par ignorance & par pareffe ;

alors il faut avoir recours à l'art.

Si le Cheval pese à la main pour avoir la langue & les levres épaiffes, & les barres rondes & baffes, il faut lui donner le même mors qu'à celui qui tire, c'est-à-dire, à gorge de pigeon avec peu de fer, & dont la liberté foit proportionnée à la groffeur de la langue. Il faut auffi lui donner une branche fans jarret, un peu plus hardie, & l'œil un peu plus haut qu'à celui qui tire à la main, afin d'augmenter la force de la gourmette, laquelle ne doit pas être fi groffe qu'à l'ordinaire, parce que ces fortes de Chevaux ont ordinairement la barbe épaiffe.

Des Bouches trop ou trop peu fendues.

Nous avons dit ci-deffus que le trop de fer à une bouche péu fendue faifoit froncer la levre, & qu'un mors trop peu garni de fer alloit trop avant dans une bouche trop fendue. Suivant ce principe, il eft aifé de remédier à ces défauts par le fimple afpect de la ftructure de la bouche; mais une attention qu'on doit avoir, c'est dans ces fortes de bouches, de proportionner l'œil à leur fente, enforte

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