1611. fein d'attaquer cette même Caravanne Elles partirent dès le 15. May, & firent Malingre. une prife fur les Venitiens que l'on eftiMercure moit plus de cent mille écus. Les Commandans de cette Flotte ayant appris que la Caravanne s'étoit retirée, fur l'avis qu'elle avoit eu, que les Chrétiens l'attendoient au paffage, réfolurent d'aller furprendre l'Ile de l'Ango dans l'Archipel. Etant arrivez à trois mille de cette Ifle, ils débarquérent leurs Troupes, qui s'en rendirent maîtres, & après avoir pillé tout le Païs, & chargé leur butin fur les Galéres, revinrent à Malte & à Naples.

Les Turcs foupçonnant les Chrétiens du Païs d'être d'intelligence avec l'Efpagne, & les Chevaliers de Malte, en firent mourir plufieurs. Entre autres un Patriarche Grec qu'ils écorchérent vif, dont ils envoyérent la peau à Conftantinople.

Cependant la Caravanne d'Egypte étoit toujours à Alexandrie, en attendant que les Galéres des Chrétiens euffent quitté la Mer, & que la pefte fût diminuée à Conftantinople. Mais vers la fin d'Octobre 'le Bacha du Caire fit mettre à la voile, & la conduifit heureusement à Conftantinople où elle attiva au mois de Decembre

CHAPITRE V.

Hiftoire de ce qui s'eft paßé en France pendant l'année 1612.

Cette année commença par l'execu-Affaire de tion de Florimond du Puy Seigneur Vatan.

de Vatan, petite Ville de Berry, Gentilhomme de la Religion Prétendue Ré formée. En voici l'occafion.

Matthien.

Robin Fermier Général des Gabelles Malingre de France ayant été averti que le Sieur Le Grain. Jaufoffe qui demeuroit près de Vatan, Mercure 1612 avoit chez lui une grande quantité de faux fet qu'il diftribuoir aux Habitans du Païs, chargea le Prevôt des Maré chaux de la Ville de Tours, de rechercher dans la maifon de Jaufoffe tout le faux fel qui y étoit, & de fe faifir de fa perfonne, & de tous ceux qui voudroient le fecourir. En conféquence de cet ordre,, le Prevot va chez Jaufoffe, y trouve quantité de faux fel, qu'il emporte, em menant avec lui le fieur Jaufoffe, fon frere, & un de fes coufins. Vatan averti,, ordonne au nommé faint Martin fon Maître d'hôtel de courir en diligence pour atteindre le Prevôt, & le prier de leur bendre les prifonniers, s'offrant de

1812. les repréfenter toutes fois & quantes, & de reconnoître ce fervice par une récompenfe qui y feroit proportionnée. Saint Martin ne pouvant obtenir ce qu'il demande, a recours aux menaces. Le Prevôt s'en mocque, s'en faifit, & l'emmene auffi prifonnier..

ge,

Vatan, pour fe vanger de cet outra

fait enlever le 2. Octobre 1611. un des enfans de Robin, qui étoit pour lors dans une de fes maifons en Berry. Robin ayant été informé de l'enlevement de fon fils, préfente Requête au Confeil, fur laquelle il obtint un Arrêt le 20. Octobre 1611 qui ordonne à un des Lieute nans du Grand Prevôt de fe transporter en Berry pour informer & faire le pro cès aux coupables. Vatan, par une bifarrerie d'efprit qui lui étoit affez ordinai re, fe trouve offenfé de ce qu'étant de qualité, on ne lui ait point envoyé un Gentilhomme pour traiter avec lui, refufe de conférer & de répondre à la Mor liere Lieutenant du Grand Prevôt. Cet: Officier dreffe fon Procès verbal, & fait fon rapport au Confeil qui rend un Arrêt le 19 Novembre 1611. par lequel on ordonne que Vatan & fes complices, feront pris & emmenez ès Prifons du Fort l'Evêque; que fon Château de Va tan fera faifi, & mis en la garde de fol

dats, qui feront entretenus fur le revenu 1612 de la Terre de Vatan; Enjoint à Bellengreville Grand Prevôt de France, de fe tranfporter fur les lieux pour executer cette Commiffion, ordonne au Maréchal de la Châtre, & au Comte de Chiverni Gouverneur de Blefors de fai-te executer cet Arrêt avec les forces qui leur feront envoyées par Sa Majefté, & même de faire conduire le Canon devant le Château de Vatan en cas de befoin.

Sur quelques avis fecrets que la Reine Régente reçut, elle ordonna au Comte de Chiverni de partir en diligence pour affiéger Vatan. En conféquence de cet: ordre, le Comte affemble quatre ou cinq cens Chevaux, & douze cens hommes de pied,une Compagnie de Suiffes: & fix canons, & s'achemine vers la Vil-le de Vatan, dont les Habitans fe retiré-rent dans les Villes voifines. Vatan, quoiqu'affiégé par une Armée du Roy loin de fe rendre aux inftances de fes amis, & d'avoir recours à la clémence de la Reine, s'opiniâtra dans sa révolte.. Les Habitans de Vatan députérent en Cour, pour s'excufer de cette rebellion,dans laquelle ils affurérent n'avoir aucuné part, mais en rejettérent toute la faute fur un nommé Geneft, habile Mathéma→ ticien, qui avoit engagé le Sieur de Va

tan à faire des Commentaires en latin fur le dixiéme Livre d'Euclide. Les Ha bitans prenant les Mathématiques pour de la magie, donnérent une preuve de leur ignorance, en affurant que ce Ge neft étoit Magicien, & qu'il vouloit fai re imprimer un Livre de Magie. Genest eut tant de peur que l'on n'ajoutât foy à cette accufation, qu'il abandonna ce Livre déja à moitié imprimé & mourut de frayeur.

Quoique tous les amis du Sieur Vatan l'euffent abandonné, auffi-bien que la plupart de fes Vaffaux, il ne laiffa pas de vouloir fe défendre avec une troupe de quatre-vingt ou cent foldats. Freize volées de canon ayant fait une bréche confidérable à la muraille de la Ville, Vatan prit le parti de la quitter, & de fe retirer dans fon Château, emmenant avec lui Magni fon Lieutenant. La bi farrerie de ce Gentilhomme augmenta fon opiniâtreté; Loin de donner aucune réponse aux fommations qu'on lui fait de fe rendre, il perfifte dans la témeraire réfolution de fe défendre. Cependant la plupart des foldats qui étoient avec lui ayant trouvé moyen de s'échaper, la baffe-cour étant déja prife, Vatan de mande à capituler, prie le Comte de Chiverni d'interceder en fa fayeur au