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X.,

Ce que tu vois dans l'homme n'eft pas l'hom

me.

C'est la prifon où il eft enferré

C'est le tombeau où il eft enterré

Le lit brillant où il dort un court fomme,

Ce que tu vois dans l'homme n'eft pas l'homme. Car qu'eft ce que l'homme? N'eft-ce pas cet efprit qui diftingue l'homme de la brute, qui le met en parallele avec les créatures intellectuelles, qui lui donne la reffemblance avecDieu? Or ce qui fe voit de l'homme n'est que la prifon de cet efprit, ce n'eft que fon tombeau. O quel dur & ennuyeux exil pour notre ame d'être obligée d'attendre quelquefois un fiécle entier la diffolution de notre corps, avant que de pouvoir fe rejoindre à fon principe qui eft Dieu!

X I.

Ce corps mortel où l'œil ravi contemple Muscles & nerfs, la chair, le fang, la peau, Ce n'eft pas l'homme, il est beaucoup plus beau

Auffi Dieu l'a réservé pou fon temple.

Ce n'est pas l'homme. Nous venons de dire que l'homme, c'est l'efprit de l'homme; & l'efprit n'a ni chair ni os: (Luc, 24. 39.) jugeons-en par les fruits de l'efprit & de la chair. Les œuvres de la chair, dit S. Paul, font la fornication, l'impureté, la diffolu tion, l'idolatrie, les empoifonnemens, les inimitiés, les diffentions, les jaloufies, les querelles, les héréfies, les meurtres, les débauches les débauches, & autres chofes femablables. Les fruits de l'efprit au contraire, font la charité, la joie, la paix, la patience, l'humilité, la bonté, la perfévérance, la douceur, la foi, la modeftie, la continence, la chafteté. (Galat. 6. 19. & feq.) Voila l'homme charnel & l'homme fpirituel. Qui des deux eft le plus beau? Difons mieux : qui des deux mérite le nom d'homme?

XII.

A bien parler ce que l'homme on appelle
C'est un rayon de la Divinité,
Ceft un atomne éclos de l'Unité,
C'est un dégout de la fource Eternelle.

Preuve de ce que nous venons de dire, que le véritable homme eft l'homme fpirituel. Mais qu'eft-ce que l'efprit de l'homme? Eff-ce un rayon fubftantiel de la Divinité? comme le pense notre Auteur; non fans doute, Toute substance émanée de la fubftance Divine eft incréée, & la nôtre a un commencement. Eft-ce une portion d'une ame univerfelle, celle que l'admettoient quelques Philofophes, & cómme fembleroient le donner à entendre ces paroles: C'est un atome éclos de l'unité? Non, cette ame univerfelle eft Dieu même qui anime tout ce qu'il a créé. Tenons-nous-en done à ces mots de la Genefe: Le Seigneur forma l'homme du limon de la terre, il répandit fur fon vifage un fouffle de vie, & l'homme devint vivant & animé. (Genef. 2. 7:) De la fpiritualité.

de notre ame concluons fon immortalité, Tirons le voile fur tout le refte.

XIII.

Reconnois donc, homme, ton origine
Et brave, & haut dédaigne ces bas lieux,
Puifque fleurir tu dois là haut ès Cieux
Et que tu es une plante divine.

Dédaigne ces bas lieux. Un Etre fpirituel n'eft point fait pour la terre, il tend naturellement au ciel, où il a pris fon origine. De là ces ennuis, ces dégoûts de la vie qui fe font quelquefois fentir dans les plus grandes profpérités. De là ces défirs violens qu'on reffent mieux qu'on ne peut les exprimer d'être dégagé de ce corps mortel, & d'être réuni à fon principe.

XIV.

Il eft permis r'orgueillir de la race,
Non de ta mere, ou de ton pere mortel,
Mais bien de Dieu ton vrai Pere immortel

Qui ta moulé au moule de fa face.

pas

Nos premiers Parens ne font-ils plutôt nos meurtriers que nos Peres?

Ils nous ont donné, il est vrai, la vie des fens, mais ces mêmes fens font tous les jours & trompeurs & trompés. Ils nous ont donné le jour : mais c'eft un jour, dit Job, laborieux & mercenaire. (Job, 7. 1.) Leur génération a été nombreuse, mais c'est une génération de péché & de mort. Il n'appartenoit qu'à notre Pere immortel de nous don ner droit à l'immortalité,

X V.

Au ciel n'y a nombre infini d'idées,
Platon s'eft trop en cela méconté,
De notre Dieu la pure volonté
Eft le feul moule à toutes chofes nées.

Platon s'eft trop en cela méconté. Si ce Philofophe a erré en ce point comme en beaucoup d'autres, quoique l'antiquité lui ait donné le titre de divin, les Stoïciens ne fe font pas trompés moins groffiérement fur cet article. Ils affujettiffoient la divinité à la loi rigoureuse du Deftin & à l'enchaînement des caufes & des effets qui fe fuivent néceffairement. Cependant le feul moule à toutes chofes nées, futures & poffibles

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