X X I. Heureux qui met en Dieu son espérance Et qui l'invoque en fa prospérité. Que l'homme implore le fecours du ciel dans l'adversité, rien n'est plus naturel ni plus commun. Mais qu'on fe mette en garde contre la profpérité, qu'on demande à Dieu d'être délivré de fes dangers, c'est être plus avancé dans les voies de la vertu que dans celles de la fortune. Combien d'Empires ne doivent leur décadence qu'à leur profpérité & à leur grandeur? XXII Voudrois-tu bien mettre espérance füre Le plus grand Roy du monde n'est que tel. C'eft ce qui faifoit dire au Roy Prophete Gardez-vous bien mon ame de mettre votre confiance dans les Princes, & dans les enfans des hommes, d'où ne peut venir le falut, ni pour eux ni pour les autres. Et pourquoi ne peuvent-ils fe fauver ni sauver les autres? David en donne auffitôt la raison c'eft qu'ils font mortels. (Pf. 145.) Penfée du Prophete Roy que le pere de la Poëfie Françoife avoit fans doute en vûe lorfqu'il a dit: : En vain pour fatisfaire à nos lâches envies, Nous paffons près des Rois tout le tems de nos vies, A fouffrir des affronts, à ployer les genoux Ce qu'ils peuvent n'est rien, ils font ce que nous fommes Véritablement hommes Et meurent comme nous. XXIII. De l'homme droit Dieu eft la fauvegarde De l'homme droit Dieu eft la fauvegarde, Dans la fociété un homme droit eft une perle précieufe. Dire qu'un homme eft droit, c'eft dire qu'il a de l'équité, de la probité, du défintéresfement, de la candeur, de la bonne foi; en un mot, c'eft faire le plus parfait éloge. Dans l'ordre de la grace un homme droit, c'eft un homme felon le cœur de Dieu. Or quel droit n'a pas un tel homme fur la fauvegarde de celui qui lui a fait ce préfent. Le Roy Prophete ofe affurer que le falut même n'eft promis qu'à cette droiture de cœur. (PS. 7. 11.) XXIV. Les biens du corps & ceux de la fortune Les biens du corps & ceux de la fortune ne font pas biens; au contraire, fi on les compare avec les biens de l'ame, ne font-ce pas de véritables maux ? Non-feulement ils font de grands obftacles au vrai bien qui eft le falut; mias outre cela, ils font fujets à changer & à finir. X X V. Vertu qui git entre les deux extrêmes Entre le plus & le moins qu'il ne faut, N'excede en rien & rien ne lui défaut, D'autrui n'emprunte, & fuffit à foi-même. Vertu qui git entre les deux extrêmes. C'eft un fentiment dont tous les Philofophes conviennent que la vertu morale confifte dans le milieu ; c'est-à-dire, entre les deux vices oppofés, dont l'un péche par excès & l'autre par défaut. Ainfi la libéralité tient le milieu entre la prodigalité & l'avarice; la force entre la témérité & la lâcheté; l'amitié entre la flaterie & la haine. Ils en exceptent cependant la justice, parce qu'elle n'a point d'excès qui lui foit contraire; car fi elle fait plus de bien qu'il n'eft dû,alors elle ne fait point de tort à celui à qui elle le fait; & fi elle fait plus de mal, elle ne péche point par excès, mais par défaut de juftice. XXVI, Qui te pourroitvertu, voir toute nue T'ont fait l'amour à travers d'une nue. Il n'eft pas même jufques dans ces lieux d'où on la bannit comme une fâcheufe & une importune, où elle ne reçoive fes droits. Que j'aime à lire à la tête d'une Piéce de Théâtre : O vertu charmante Votre empire eft doux Avec vous tout nous contente, On n'eft point heureux fans vous. X X VII.. Le fage Fils eft du Pere la joie. Ton exemple eft la plus courte voie. Ce précepte eft tiré mot pour mot de |