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pour un ennemi de la foi & de la jultice, lui qui fe fentiroit porté à donner fa vie pour l'un & pour l'autre. Ce tort même eft d'autant plus grand, qu'il eft prefque toujours irréparable. Čar autant les calomniateurs font communs, autant il eft rare d'en trouver qui faffent au prochain la reftitution de fon honneur: reftitution qui n'est pas moins dans la juftice que celle des autres biens, & qui ne doit pas demeurer fecrette, lorfque la diffamation a été publique.

LX XXI.

Elle ne fait en l'air fa réfidence,
Ni fous les eaux, ni au profond des bois,
Sa maison eft aux oreilles des Rois,
D'où elle brave & flétrit l'innocence.

Sa maifon eft aux oreilles des Rois. O combien déplorable eft donc la conEdition des Rois & des Princes! Nonfeulement la vérité n'approche d'eux qu'avec peine, & quand leurs gardes ne la connoiffent pas. Non-feulement ils font environnés d'une foule de flaxteurs, miniftres de leurs paffions, & admirateurs de leurs défauts; mais

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leurs oreilles mêmes font les afyles de la calomnie. La raison en eft fenfible. Faire fa cour, c'eft s'élever fur les ruines des autres ce qui ne fe peut faire fans calomnie, fans trahifon. Le Roy Prophete en étoit convaincu, lorsqu'au fieu d'écouter ceux qui détruifoient en fecret leur prochain, il leur déclaroit la guerre, il les chaffoit de fa préfence. (Pf. 100. 6. )

LXXXII.

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Quand une fois ce monftre nous attache;
Il fçait fi bien fes cordillons nouer
Que bien qu'on puiffe encor les dénouer,
Restent toujours les marques de l'attache.

Reffent toujours les marques de l'attache. Voila encore une des fuites funeftes de la détraction.Non-feulement elle abbat le plus fage; non-feulement les plaies qu'elle fait font fouvent fans remede; mais quand on y en appliqueroit même, la cicatrice refte toujours. Car fuppofons que l'on ait affez de courage pour fe dédire, a-t-on affez de force pour effacer l'impreffion qu'a fait la calomnie dans l'efprit de celui qui l'a

écoutée ? Celui même qui l'a reçûe cette idée, est-il maître de s'en défaire entiérement?

LXXXIII.

Juge, ne donne en ta caufe Sentence,
Chacun fe trompe en fon fait aifément;
Notre intérêt force le jugement,
Et d'un côté fait pancher la balance..

Notre intérêt force le jugement. C'est un féducteur duquel non-feulement on doit fe défier foi-même, mais dont les Loix mêmes ordonnent qu'on fe défie. Car quand il arrive que dans un Tribunal, où fe juge une affaire, il fe trouve un ou plufieurs Affeffeurs qui tiennent aux Parties, ou par les liens du fang, ou par ceux de l'intérêt, les Loix ordonnent qu'ils fe retirent, parce que devenant Parties, ils ne peu vent etre Juges.

LXXXIV..

Deffus la Loi tes jugemens arrête,

Et non fur l'homme; elle eft fans affection;
L'homme au contraire eft plein de paffion;
L'un tient de Dieu, l'autre tient de la bête
L'un tient de Dieu. Il eft certain

que

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la premiere de toutes les Loix, & de laquelle toutes les autres font émanées, eft la Loi éternelle. C'eft la raifon fou veraine qui dirige toutes les actions & tous les moyens. Ses deux premiers principes font ceux-ci : Il faut faire le bien, il faut éviter le mal or toutes les Loix ne tendent qu'à ces deux fins.

LXXXV.

Le nombre faint fe juge par fa preuve,
Toujours égal entier ou départis
Le Droit auffi, eft Atomes parti >
Semblable à foi, toujours égal fe treuvé.

2

Le nombre faint. Ce nombre ne peut être que celui des trois Perfonnes de la Sainte Trinité. Ces trois Perfonnes étant toujours égales entr'elles foit qu'on les divife, foit qu'on les réunif fe, chacune d'elles prouve fa Divinité. Tel qu'eft le Pere, tel eft le Fils, tel eft le S. Efprit. Tous trois font incréés, tous trois font immenfes, tous trois font éternels: & cependant ce ne font point trois éternels, trois incréés & trois immenfes ; mais un feul immenfe, un feul incréé, & un feul éternel.

Le Pere eft Tout-puiffant, le Fils eft
Tout-puiffant, le S. Efprit eft Tour-
puiffant ; & cependant ce ne font point
trois Tout-puiffans, mais un feul. Le
Pere eft Dieu, le Fils eft Dieu, le S.
Efprit eft Dieu; & cependant ce ne
font point trois Dieux, mais un feul.
Ce nombre faint eft donc toujours égal,
entier ou départi ; & c'est
pour cela que
notre Auteur le compare à un corps
droit qui eft égal en tous fens : de mê-
me que ci-devant il a comparé la vé-
rité à un cube, dont le plan quarré ne
fe dément jamais, & qui en tous fens a
toujours même forme.( Quatrain 39.)

LXXXVI.

Nouveau Ulyffe apprend du long voyage
A gouverner Itaque en équité.

Mainte un à Scylle & Caribde évité,
Qui heurte au port, & chez foi fait nau-
frage.

Apprend du long voyage à gouverner. Quoiqu'Ulyffe n'eut point parcouru fi long-temps les terres & les mers pour apprendre à gouverner, comme les Décemvirs Romains qui fe répandirent

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