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PREMIERE

PHILIPPIQUE,

Prononcée la première année
de l'Olymp. 107.

Aurois laiffé (1) paroître
javant moi plusieurs de vos
Orateurs, fi vous aviez,
ATHENIENS, à délibérer

fur quelque chofe de nouveau : &
après

(1) Quand le Peuple étoit affemblé, un Héraut crioit: Quelqu'un au-deffus de cinquante ans veut-il parler? Et qui encore? Chacun à fon tour. Après quoi felon la loi de Solon, c'étoit aux plus anciens à parler les premiers. Mais du temps de Démofthéne, cette loi ne s'obfervoit plus à la rigueur. Il n'étoit que dans fa trentiéme année, lorfqu'il prononça cette Harangue, qui, à beaucoup près, ne fut pas fon coup d'effai,

D

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après les avoir écoutez, ou je me ferois tû, fi j'avois trouvé qu'ils euffent ouvert un bon avis; ou j'aurois effayé de vous dire auffi le mien, fi je l'avois crû meilleur.

Mais puifqu'il s'agit d'une affaire déjà rebattue tant de fois, je me flatte que vous me pardonnerez, & avec raifon, d'avoir faifi la parole. Car enfin, fi jufqu'ici l'on vous avoit bien conseillez, vous ne feriez pas réduits à confulter encore.

Premiérement donc, ATHENIENS, ne vous découragez point, quelque mauvais que vous paroiffe votre état préfent. Car de la même cause qui vous a perdus, on doit en tirer des motifs d'efpérance.

Que veux-je dire? Que fi vous ètes mal aujourd'hui, c'eft uniquement parce que vous n'avez pas fait ce que vous deviez.

Vous auriez fujet de ne rien espérer, s'il étoit bien vrai que pour prévenir vos disgraces, vous euffiez fait en vain tous vos efforts.

Mais d'ailleurs, & vous qui l'avez ouï raconter, & vous qui l'avez vû

de vos yeux, reffouvenez-vous de ce haut dégré où Lacédémone (2) avoit porté sa puissance, il n'y a pas long-temps; & avec quel courage, avec quel foin de votre honneur vous fûtes, les armes à la main, la contenir dans les bornes de la juftice.

Pourquoi en rappeler la mémoire ? Pour vous montrer, ATHENIENS, pour vous faire bien fentir que la vi

gilance

(2) Lacédémone ou Sparte, car c'eft la meme République fous ces deux noms, alloit à subjuguer tous les autres peuples de la Gréce. Elle avoit rafé les murs d'Athénes, & pris la Cadmée, qui étoit la citadelle de Thèbes. Elle avoit réduit les Argiens & les Corinthiens à fe faire honneur d'être fes alliez de nom & fes fujets en effet. Thébes, pour fecouer le joug, excita la guerre appelée Béotique, où fes Athéniens eurent la meilleure part, & contribuérent le plus à la défaite des Lacédémoniens. La Cadmée avoit été prife * la troifiéme année de l'Olympiade 9. Quatre ans après elle fut reprife. De-là, jufqu'au temps où parle Démofthéne, il n'y a donc que vingtcinq ans ; & par conféquent une bonne partie de fes auditeurs pouvoit avoir vû la guerre Béotique.

* Petav. Rat. Temp. part. 1. lib. 3. c. 10.

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gilance peut vous mettre au-deffus de tout danger; mais que l'inaction vous perdra toujours.

Vous avez ici un exemple de l'un & de l'autre de ce que fait la vigilance, puifqu'alors elle vous rendit fupérieurs aux plus grandes forces des Lacédémoniens : de ce que fait l'inaction, puifqu'aujourd'hui elle donne lieu à d'infolens procédez, qui vous caufent de vives alarmes. Philippe, dira-t-on, à la tête d'une armée nombreuse, & après nous avoir enlevé tant de places, n'eft pas facile à vraincre.

Je le fais, ATHENIENS. Mais auffi n'oublions pas que nous fumes autrefois les maîtres, & de Pydne, & de Potidée, & de Méthone, & de toutes les contrées (3) voisines. Il a été

un

(3) Pour entendre Démofthéne, c'est à tout moment une néceffité de fe mettre devant les yeux la Carte de l'ancienne Gréce: fans quoi l'on ne fauroit bien fentir la force de fon raisonnement. Mais la forme de ce vo> lume ne permettant guére d'y faire entrer une Carte de Géographie, je pouvois y fuppléer de deux maniéres: ou par des Notes mifes au

un temps, ne l'oublions point, que la plufpart des peuples qui font préfentement livrez à Philippe, & qui étoient autrefois indépendans, furent moins jaloux de son amitié que de la nôtre.

Dans ce temps-là, s'il eût craint, fe voyant fans alliez, de se commettre avec une République maîtreffe alors des places qui commandent fes frontiéres; il n'eût tenté aucune des entreprifes qu'il a finies, & certainement fa puiffance ne fût pas allée où nous la voyons. Mais toutes ces

places,

bas des pages, ou par une Table générale, contenant tous les noms des pays, villes & autres lieux dont Démofthene fait mention. De ces deux maniéres, j'ai préféré la feconde, pour n'avoir pas à répéter fouvent les mêines notes; & d'ailleurs, parce que le moins qu'on peut couper le Texte d'un Orateur c'eft toujours le mieux. On trouvera donc la fin des quatre Philippiques, cette Table dont je parle, & qui fervira également pour toutes. Je me contenterai d'y rapporter en fimple Géographe, le nom & la fituation des villes. Car, de conter leur hiftoire en Commentateur, ce ne feroit jamais fait. Il n'y a en Gréce, ni bourgade, ni ruiffeau, ni montagne, qui ne pût fournir un volume.

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