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Enfin le Pere Fournier, après avoir difcuté & pefé les divers fentimens de ces Philofophes, a été plus loin. Profitant de leurs découvertes, il s'en est aidé, pour déveloper une queftion qui lui paroiffoit importante, & qui l'eft en effet. Ce laborieux Jéfuite a remarqué, que la hauteur de l'Antenne ne contribuoit en aucune façon au fillage du Navire. Cela est vrai dans tous les cas où le vent a un certain dégré de force, capable de le faire incliner. Un plus grand effort fur le Mât, ne fert uniquement qu'à le faire tanguer davantage. Mais le cas eft différent, lorfque la force motrice n'eft pas affez confidérable, pour faire fubir au Navire l'inclinaifon néceffaire à un parfait fillage.

Quelle peut être la caufe de l'erreur du Pere Fournier ? C'est qu'il penfoit, que l'effet du vent fur les Voiles étoit le même que celui d'un

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Animal, qui traîne une Barque le long d'une Riviere. Il eft bien vrai, que dans ce cas la hauteur de la Vergue, ou, pour parler avec plus de jufteffe, du centre d'effort des Voiles, bien loin de contribuer à la rapidité du fillage, lui eft contraire. La raison en paroîtra évidente, fi l'on fait attention, que le premier effort de l'Animal tend à faire incliner la Barque, jufqu'à ce qu'elle déplace un volume d'eau, qui falle équilibre à l'effort circulaire du Mât. Alors le Bâtiment ne pouvant plus incliner, & l'Animal tirant toujours, il eft clair, que cet effort doit faire échaper la Barque par l'endroit qui réfifte le moins, qui eft ici la Proue. De forte que la Barque fend le fluide avec une vîteffe d'au-tant moindre que fon inclinaifon ef: grande, foit parce qu'elle trouve de la part de l'eau une résistance proportionnelle à l'effort vertical de la Bar

que, ou autrement à l'inclinaison du Mât, foit parce qu'elle a un plus grand volume d'eau à déplacer.

Je ferai voir dans cet Ouvrage que ce n'eft plus la même chofe, lorf que le Navire cingle par l'effort du vent fur les Voiles; qu'alors la route du Vaiffeau n'eft point forcée, & qu'elle ne fe fait qu'en balançant.

Après toutes ces recherches, un Géomêtre habile (M. Bouguer) a remanié de nouveau cette queftion. Sans avoir égard à ces divers fentimens, qui auroient dû fervir à une connoiffance certaine, il a cherché à déterminerl'Hypomoclion du Mât, & a diftingué pour cela deux états dans le mouvement du Vaiffeau, l'un horizontal & l'autre vertical.

Je démontrerai, que le mouvemens horizontal n'a jamais exifté. C'est une vérité d'expérience, & j'en appelle d'avance au jugement de tous les Ma

rins.

,

ce

Quant au fecond mouvement Savant place alors le point d'appui au centre de gravité du Vaiffeau. Il eft naturel de préfumer, que dans ce cas on fuppofe que le Mât paffe par ce centre. Cependant le centre de gravité du Vaisseau est toujours l'hypomoclion du Mât, foit qu'il paffe par cet endroit ou ailleurs, en forte que le point d'appui eft hors du Mât

même.

Quelque difficile qu'il foit de concevoir le point d'appui d'un Levier hors de ce Levier, on peut objecter à M. Bouguer ce qu'on à objecté autrefois à Baldus: favoir, que le point d'appui doit être fixe, tandis que

toutes les parties du Navire font en mouvement, état que ne conferve pas le centre de gravité du Vaisseau.

Pour déterminer enfin le véritable point d'appui du Mât, il faut faire attention, que le Mât ne peut faire

incliner le Vaiffeau fans le foulever, & que plus il réfifte à ce foulevement, moins l'inclinaifon eft grande. En même tems que le Mât décrit un arc circulaire en avant, le Navire en décrit un en fens contraire. Ces deux arcs ont par raïon un centre commun, & ce centre doit être effentiellement fixe. Cela pofé, fi de ces arcs oppofés par la pointe, on pouvoit mener une ligne, elle couperoit le Mât au centre de rotation. Une chofe difficile à déterminer eft la grandeur de ces arcs proportionnels à leurs raïons. Qu'il feroit à défirer qu'on y parvint! On auroit le centre fpontané de rotation, c'est-à-dire l'Hypomoclion

du Mât.

S'il étoit permis de juger des autres par foi-même, ce fentiment paroîtroit aux plus zélés Partisans de M. Bouguer un principe plus clair que le jour.

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