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ceau,

fon portrait en philofophe, celui de fon pere, le miLUCAS racle des cinq pains, l'élévation de la croix, Jefus-Chrift JORDANS. tenté par le démon, la Samaritaine, le maffacre des Innocens, un enfant endormi, faint Jérôme dans le goût du Titien, l'enlèvement des Sabines, deux tableaux peints fur

verre.

On voit à Paris au palais Royal les vendeurs chaffés du temple peints fur toile de grandeur naturelle avec beau coup de figures, la pifcine auffi de grandeur naturelle ornée d'architecture & d'une multitude de différentes perfonnes.

V.LS

LUCAS CANGIAGE.

N ne peut ôter à Lucas Cangiage ou Cambiafi
le mérite d'être à la tête des peintres Genois; CANGIAG E.
il vint au monde à Moneglia dans les états de
Genes en 1527. Son pere qui étoit peintre

nommé Jean Cambiafi lui enfeigna les principes de fon art pour le rendre plus affidu à fon ouvrage il ne l'habilloit qu'à demi, afin qu'il ne s'amufât point dans les places publiques & lui cachoit fon manteau & fes fouliers pour le retenir à la maifon. Cangiage n'avoit que dixfept ans quand on lui donna à peindre à frefque la façade d'une maison, des peintres Florentins étant montés fur l'é chafaud & voyant venir le jeune homme le prirent pour

le garçon qui broyoit les couleurs aux peintres. Comme il CANGIAGE. fe mit à prendre fa palette & fes pinceaux, ils le voulurent empêcher de travailler, de crainte qu'il ne gatât l'ouvrage, mais Cangiage au premier coup de pinceau diffipa leur crainte & fe fit reconnoître pour l'auteur.

Sa réputation naiflante s'accrut avec fon mérite, toutes les Eglifes, tous les palais de Genes, s'emprefférent à le faire valoir. Le Cangiage s'étoit fait une fi grande pratique qu'il peignoit fouvent fans faire de deffein, ce que les Italiens appellent fatto alla prima : les fresques s'exécutoient fur le lieu fans cartons, pour aller même encore plus vîte il peignoit des deux mains, auffi nous a-t-il laiffé beaucoup d'ouvrages & furtout de deffeins qu'on peut dire être en plus grand nombre que ceux qu'on raffembleroit de vingt peintres différens, il les jettoit dans un coin de fa chambre, & fa femme en allumoit ordinairement fon feu.

Cangiage ayant perdu fa femme peu d'années après fon mariage, donna le foin de ses enfans à sa belle fœur, dont il devint épris par la reffemblance qu'elle avoit avec la défunte. Cette paffion l'aveugla à un point qu'il fe flatta d'obtenir du Pape la permiffion de l'époufer. Il fit dans cette vûë le voyage de Rome & préfenta deux tableaux de fa main au Pape; mais Grégoire XIII. loin de favorifer fon défir, lui en montra toute l'horreur, le détourna de fon deffein, & l'obligea fitôt qu'il feroit de retour à Genes de congédier fa belle fœur, Son cœur exécuta avec peine un ordre fi rigoureux.

Il continua fes travaux & il alla peindre dans la ville de Multedo proche Genes dans le Couvent de faint Barthelemi des Arméniens plufieurs morceaux qui peuvent fe foutenir contre toutes fortes de peintures, fon confeffeur qui étoit de cet Ordre eft peint dans un de ces tableaux.

Philippe II. inftruit de fes talens le demanda pour travailler à l'Efcurial, l'envie de faire réüffir fon mariage par le moyen de ce Monarque, le fit confentir à aller en Efpagne. Il fut accueilli à fon arrivée par ce Prince qui fouvent le venoit voir travailler, & qui le combla de bienfaits;

ce

ce bon accueil l'enhardit à s'ouvrir de fon projet à quelques courtifans qui le détournérent d'en parler au Roy. Ils CANGIAGE. lui représentérent ce Prince trop religieux pour s'entremettre à faire réüffir une telle union. Le chagrin qu'il en eut le fit tomber malade & un abcès qui fe forma dans fa poitrine le fit périr à l'Efcurial en 1585. à l'âge de cinquante-huit ans. Il laiffa imparfaite la grande voûte de l'Escurial, & le Roy qui l'avoit comblé de biens & d'honneurs, le regretta beaucoup. Ce peintre étoit fi maître de fa main qu'il a changé trois fois de manière. La premiére étoit gigantefque & peu naturelle; dans la feconde il confultoit la nature, il faifoit des deffeins & des cartons pour arrêter fa pensée avant que de peindre; la derniére tenant uniquement de la pratique fut plus expéditive, mais très maniérée : c'étoit une fougue de pinceau néceffaire pour foutenir fa nombreuse famille, il a même fculpté plufieurs figures

de marbre.

Cangiage excelloit dans les racourcis, il étoit affez correct & très - fécond; fes idées n'étoient pas plûtôt - formées qu'elles étoient exécutées; heureux s'il eût poffédé les graces, la légéreté, un beau choix & le vrai de la na

ture.

Ses principaux éléves ont été Horatio Cambiafi fon fils, qui a fuivi toute fa maniére, Lazaro Tavarone qui a été son meilleur éléve, & Gio Battista Pagi qui a eu quelque renom dans la peinture.

Gio Battifta Pagi, noble Genois, naquit en cette ville en 1556. Parmi les exercices & les études de fa premiére jeuneffe il employoit ses heures de récréation à modéler ou à deffiner des figures & des païfages. Son pere qui remarqua ce goût décidé, voulut l'en détourner par l'étude des mathématiques : il en vint enfuite aux menaces, enfin il se rendit aux prières de fa femme. Pagi ne fçavoit pas encore mêlanger les couleurs, lorfqu'il fut introduit par un ami dans un endroit où un peintre peignoit un portrait qui ne reffembloit point; fi l'on veut, dit-il, me donner des couleurs j'en viendrai à bout, & il le fit au grand étonnement des spectateurs: plufieurs tableaux fortirent alors de

A a 2

GIO

BATTISTA

PAGI.

fon pinceau fans avoir jamais eu de maître ; enfuite il CANGIAGE. étudia fous le Cangiage. Une affaire qu'il eut à Genes, l'obligea d'en fortir & de fe retirer à Florence où il fut accueilli des Princes François & Ferdinand de Médicis qui ont toujours été les Mecenes des grands peintres. Il retourna long-temps après à Genes, & le Duc Ferdinand lui donna une bague de prix qu'il portoit toujours à fon doigt. Pagi s'occupa à peindre plufieurs tableaux, à graver des planches de cuivre & à faire un livre fur la peinture enfin il mourut à Genes en 1629. âgé de foixante & treize ans.

Les deffeins du Cangiage font trop faciles à connoître pour en parler ici. Le Tintoret voyant la grande quantité qu'il en a faite difoit qu'ils étoient capables de gâter un jeune homme qui ne feroit pas avancé dans l'art, mais qu'un praticien pouvoit tirer beaucoup d'utilité de l'érudition & du fçavoir dont ils étoient remplis. On peut comparer Cangiage pour ce grand nombre de deffeins qu'il nous a laiffés, & pour fa grande facilité à s'exprimer fur le papier, à notre Raymond la Fage qui a rẻmpli Rome, Paris, & pour ainfi dire toute l'Europe de fes productions; ces deux hommes n'ont point eu de pareils pour la fécondité de génie, l'abondance des penfées, & la prefteffe de la main; la Fage a été plus correct que le Cangiage, il plaçoit en anatomifte fes mufcles fort à propos, & dans fes deffeins croqués il a répandu plus de feu, principalement dans les fujets libres qui étoient plus conformes à fa vie libertine.

Le Guide, le Scaminozzi, Coëlemans ont gravé d'après ce maître ; on trouve deux pièces dans les impoftures innocentes de Picart, & trois piéces gravées en bois.

La plus grande partie des tableaux du Cangiage font dans la ville de Genes; dans l'Eglife de fainte Marie degli angeli à la chapelle dite del Centurione il a peint à frefque la décolation de faint Jean; dans celle de fainte Catherine à la chapelle Spinola on voit les quatre évangéliftes, & des traits de la vie de faint Benoît; dans le chœur de l'Eglife de l'Annonciade où eft fon beau pla

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