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MARTHE s'en allant;

N'en parlons plus.

LISE la retenant,

Il eft vrai: fa jeunesse

Pour quelque tems a furpris ma tendreffe ; Etoit-il fait pour un cœur vertueux ?

MARTHE en s'en allant,

C'étoit un fou, ma foi, très-dangereux.
LISE revenant,

De corupteurs fa jeuneffe entourée,
Dans les excès fe plongeoit égarée.
Le malheureux! il cherchoit tour à tour
Tous les plaifirs, il ignoroit l'amour.

MARTHE.

Mais autrefois vous m'avez paru croire
Qu'à vous aimer il avoit mis fa gloire,
Que dans vos fers il étoit engagé ?

LISE.

S'il eut aimé, je l'aurois corrigé;

Un amour vrai, fans feinte & fans caprice,
Eft en effet le plus grand frein du vice;
Dans fes liens qui sçait se retenir,

Eft honnête homme ou va le devenir;
Mais Euphemon dédaigna fa maîtreffe,
Pour la débauche il quitta la tendresse.
Ses faux amis, indigens fcelerats,
Qui dans le piége avoient conduit fes pas,

1

Ayant mangé tout le bien de fa mere,
Ont fous fon nom volé fon trifte pere;
Pour comble enfin, ces féducteurs cruels,
L'ont entraîné loin des bras paternels,
Loin de mes yeux, qui noyés dans les larmes,
Pleuroient encor fes vices & fes charmes,
Je ne prens plus nul interêt à lui.

MARTHE.

Son frere enfin lui fuccede aujourd'hui.
Il aura Life, & certes c'eft dommage;
Car l'autre avoit un bien joli vifage,

De blonds cheveux, la jambe faite au tour,
Danfoit, chantoit, étoit né pour l'amour.

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D'égaremens, de fottifes étranges,

On découvroit aifément dans fon cœur,

Sous fes défauts, un certain fond d'honneur

LISE.

Il étoit né pour le bien, je l'avoue.

MARTHE.

Ne croyez pas que ma bouche le loue;

Mais il n'étoit, me femble, point flatteur,
Point médifant, point efcroc, point menteur,

LISE.

Oui, mais.....

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MARTHF.

Fuyons, car c'eft Monfieur fon frere.

LISE.

Il faut refter, c'eft un mal néceffaire.

SCENE I V.

LISE, MARTHE, FIERENFAT.

FIEREN FAT.

E l'avouerai, cette donation

JE

Doit augmenter la fatisfaction

Que vous avez d'un fi beau mariage.
Surcroit de biens eft l'ame d'un ménage,
Fortune, honneurs & dignitez, je croi,
Abondamment fe trouvent avec moi;
Et vous aurez dans Coignac à la ronde,
L'honneur du pas fur les gens du beau monde,
C'est un plaisir bien flatteur que cela,
Vous entendrez murmurer, la voilà.
En vérité quand j'examine au large,

Mon

rang, mon bien, tous les droits de ma Charge, Les agrémens que dans le monde j'ai,

Les droits d'aîneffe où je fuis fubrogé,
Je vous en fais mon compliment, Madame?

MARTHE.

Moi, je la plains, c'eft une chofe infâme

Que vous mêliez dans tous vos entretiens
Vos qualitez, votre rang & vos biens;
Etre à la fois & Midas & Narciffe,
Enflé d'orgueil & pincé d'avarice
Lorgner fans ceffe avec un œil content
Et fa perfonne & fon argent comptant,
Etre en rabbat un petit Maître àvare,
C'est un excès de ridicule rare;

Un jeune fat paffe encor; mais ma foi,
Un jeune avare eft un monftre pour moi.
FIERENFA T.

Ce n'eft pas vous probablement, ma Mie,
A qui mon pere aujourd'hui me marie;
C'est à Madame, ainfi donc s'il vous plait,
Prenez à nous un peu moins d'intérêt ;

Le filence eft votre fait... (à Life) Vous Madame,
Qui dans une heure ou deux ferez ma femme,
Avant la nuit vous aurez la bonté

De me chaffer ce Cadet effronté,
Qui fous le nom d'une fille fuivante,
Donne carriere à fa langue impudente;
Je ne fuis pas un Préfident pour rien,
Et nous pourrions l'enfermer pour fon bien.
MARTHE à Life.

Défendez-moi, parlez-lui, parlez ferme ;
Je fuis à vous, empêchez qu'on m'enferme,

Il pouroit bien vous enfermer auffi.

LISE.

J'augure mal déja de tout ceci,

MARTHE

MARTHE.

Parlez-lui donc, laiffez ces vains murmures.

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Il nous arrive une plaifante affaire.

FIEREN FAT.

Eh quoi, Monfieur?

RONDON.

Ecoute. A ton vieux pere,

J'allois porter notre papier timbré,
Quand nous l'avons ici près rencontré,
Entretenant au pied de cette roche,
Un voyageur qui defcendoit du coche.

B

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