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nous à voir venir la fin de notre courfe;
car le meilleur moyen de ne pas craindre
la mort quand elle viendra, eft de la
craindre avant qu'elle vienne, & de re-
médier aux chofes qui la rendroient ter-
rible fi elle venoit. Toutes ces raifons
nous doivent faire aimer la pratique d'y
penfer une fois tous les mois plus long-
temps, & plus ferieufement qu'à l'ordi-
naire. Vous ferez bien de finir ce petit
exercice par la priere des Agonizans, que
Vous reciterez avec autant de ferveur
fi vous étiez au lit de la mort.

CHAPITRE XXVI.

que

De la crainte & de l'humilité chretienne.

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C9
E que je viens de vous dire eft tres-
propre à infpirer de la crainte & de
Thumilité; mais je trouve ces deux dif-
pofitions fi neceffaires dans la vie fpiri-
tuelle, que je ne puis m'empêcher de
vous en parler encore. L'Ecriture fainte
nous en marque la neceffité, quand elle
dit tant de fois & en tant de manieres:
Que celui qui eft fans crainte ne peut
juftifié que la crainte est le commencement 28.
de la fageffe & de la justice Chretienne s
que
celui qui a la crainte de Dieu est
beureux que rien n'est capable de le trou-

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S

être

Ecol. vi

4.

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:

bler & de l'ébranler, parce que le Sei gneur eft fon efperance; que Dieu foutient dans les tentations ceux qui le craignent, &qu'il les preferve des maux dont ils font menacez. Jefus-Chrift a confirmé tous ces oracles, quand il a dit à fes Apôtres fe vous dirai, à vous qui êtes mes amis, qui eft celui que Inc. 12, vous devez craindre: Craignez celui qui après avoir tué le corps, a encore le pouvoir de précipiter dans les Enfers. Remarquez bien que Jefus-Chrift donne cette Inftruction, non à de grands pecheurs mais aux Apôtres, & qu'il ne croit pas les rabaiffer en leur ordonnant de craindre. Le Concile de Trente nous enfeigne que c'eft par la crainte des Jugemens de Dieu, que le SaintEfprit opere dans le cœur des pecheurs, les premiers defirs & les premieres penfées de la converfion. C'est par elle qu'il les prévient, & qu'il les arrête dans le cours de leurs iniquitez, qu'ils les frappe & qu'il les ébranle, qu'il les renverfe, & qu'aprés les avoir remplis de frayeur il leur fait pouffer ces cris perçans : : Seigneur, qui eft celui Pf.89.11. qui connoît le poids de votre indignation? Et qui peut comprendre quelle eft la grandeur de votre colere ? De là le

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pecheur paffe à l'efperance d'obtenir mifericorde par les mérites de JefusChrift. Il commence à l'aimer comme fource de toute juftice, & à regarder avec horreur tant d'actions criminelles,. par lefquelles il a eu le malheur de l'offenfer & de lui déplaire. Voilà ce qu'il doit à la crainte de Dieu, & de quelle utilité elle est.

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ce

Pour moi dit faint Bernard, je n'ai rien trouvé de « plus puiffant pour acquerir la grace pour la conferver & pour la recouvrer, « que de fe tenir devant Dieu & en tout ce temps, dans l'humilité de la crainte, & « non dans l'élevement de l'orgueil, parce « que l'homme qui craint toûjours eft heu- «e reux. Craignez, dit-il, quand la grace сс vous eft donnée, quand elle yous quitte,

се

& lorfqu'elle vous eft rendue, & que «
ces trois craintes fe fuccedent inceflam ce
ment l'une à l'autre. Saint Bernard nous ce
marque ici quelques-unes des raifons qui
nous doivent infpirer de la crainte. :
Mais comme il y en a encore d'autres,
il eft bon de les rapporter pour votic
inftruction.

1. La premiere eft tirée de cet oracle de l'Ecriture: Nul ne fait s'ilst digne Balgat s d'amour ou de haine, s'il fera fauveu damné, s'il eft en grace ou en peché, éc

1. Cor. 4.

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cette horrible incertitude eft la plus gran de peine des enfans de Dieu. Car comme ils l'aiment tendrement, ils préferent fon amour à toutes chofes, & ils ne fçavent s'ils en font dignes. Ils ne connoiffent point leur cœur: quand même ils n'auroient rien à fe reprocher, comme le faint Apôtre le dit de lui-même, ils ne feroient pas pour cela en affurance, parce qu'ils fçavent qu'il y a dans le cœur humain des abîmes 'impénetrables.

2. La feconde raifon regarde ceux qui ont commis des pechez mortels. Ils fçavent qu'ils ont merité l'enfer ; & quelque penitence qu'ils en ayent faite, ils ne fçavent, ni fi elle a été fincere, ni fi elle a été proportionnée à leurs crimes: fi leur cœur. ne leur reproche rien là-deffus, ils ont quelque petite efperance, mais elle n'eft jamais fans crainte, parce qu'à moins d'une revelation expreffe, ils ne fçauroient jamais certainement fi leur peché leur eft pardonné. Ainfi ce peché doit toûjours être devant leurs yeux, &ils ne doivent avoir que cette unique pensée dans l'efprit Dieu m'a-t-il pardonné ? Ai-je appaifé fa colere? Jefus-Chrift atil jetté fur moi l'œil de fa compassion? Veut-il bien m'appliquer le merite de fon fang Telle étoit la difpofition de ces

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admirables Penitens dont faint Jean Cli- maque nous a laiffé l'hiftoire & le portrait dans fon cinquième Degré, où il parle de la Penitence. Après avoir ra conté l'effroyable aufterité de leur vie, il dit qu'ils parloient ainfi à Dieu, ou les : uns aux autres. L'un difoit : Ouvrez - si nous, ô mon Dieu, ouvrez-nous, par votre c mifericorde cette porte bienheureuse que « nous nous fommes fermée par nos pechez. L'autre difoit: Montrez-nous feulement votre vifage, & cela nous fuffit pour être e fauvez. Un autre : Faites luire votre lu- «e miere fur nous, pauvres miferables que «e nous fommes, couverts de tenebres, & des ce ombres de la mort. Un autre : Que vos ce mifericordes nous previennent promtement ô Seigneur car notre falut eft perdu, notre efperance eft abbatuë, notre courage eft ce vaincu. Quelques-uns difoient: Le Sei- e gneur fe montrera-t-il encore à nous ? Et ce d'autres: Se pourroit-il bien faire que nous ce nous fuffions déchargez du poids de nos ce dettes & de nos offenfes ? Un autre difoit: ce Le Seigneur nous confolera-t-il? Nous fom- ce mes dans les liens de nos pechez, quand eft-ce qu'il nous dira, Je vous donne la li- ce berté? Nous fommes dans le tombeau de « la penitence; nous dira-t-il quelque jour, ce fortez? Nos cris font-ils montez jufques

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