" сс reine des vertus, que faint Paul appelle le lien de la perfection? Ne la demande. t-il pas à tous les Chretiens: Ne veut-il «< pas que nous imitions envers nos freres «< celle que Jefus Chrift a euë pour nous; que nous les aimions comme ils nous a ai- « mez, que nous leur pardonnions comme «<< Jefus-Chrift nous a pardonné Et un autre Apôtre ne dit-il pas que nous devons «< être prêts à donner notre vie pour nos & Joan. freres, comme Jefus Chrift a donné fa «e vie pour nous ? Le même faint Paul ne « dit-il pas encore que nous devons être ve- « ritablement morts au peché, & ne plus vivre que pour Dieu? Сс Ne difons donc pas que la vie Chre- « tienne n'eft pas commandée, ni poffible « aux gens du monde, & qu'il n'y a que les Religieux & les Solitaires qui puiffent atteindre à une fi haute perfection. Il n'y a rien de fi pernicieux que cette fauffe « opinion. C'est elle qui entretient la plûpart des libertins dans le defordre, & « des juftes imparfaits dans le relâchement. « Croyez que Dieu demande à tous la même « fainteté. Les moyens pour y parvenir peu- « vent être differens mais les Religieux n'ont pas une autre fin que nous. Leur c but eft de fe fauver, & c'eft auffi le nôtre. ¿ Ils ne fe peuvent fauver qu'en marchant ce 3. 16. par la voye étroite; nous ne nous fauve»rons pas en matchant par la voye large. » C'eft peu d'éviter les grands crimes. Pour » être fauvé il faut pratiquer de grandes ver» tus. Voulez-vous que je vous montre des » gens que Dieu a condamnez fans qu'ils »euffent commis des pechez énormes? Ce Riche qui fut aprés fa mort enfeveli dans » l'enfer n'étoit ni impie, ni jureur, ni » voleur, ni adultere. Il étoit magnifique» ment vétu, il faifoit tous les jours bonne » chere, il negligeoit le pauvre couché à sa » porte. Ce fut là tout fon crime. Il étoit impitoyable à la mifere des pauvres. Cette difpofition eft-elle rare aujourd'huy? Les » Vierges foles n'avoient point d'huile dans « leurs lampes, c'est-à-dire, point de charité. C'en fut affez pour obliger l'Epoux à leur fermer la porte, & à leur dire: Je » ne vous connois point. Celui qui entra dans la falle où l'on faifoit le feftin des nôces du Roi, fut-il chaffé pour y avoir commis des violences ou d'autres crimes? Non; mais pour y avoir ofé entrer fans fa robe » nuptiale. 23 De tout cela il s'enfuit que l'Evangile ayant été dreffé, prêché & publié pour toute forte de perfonnes, tous le doivent obferver, tous doivent travailler à acquerir la fainteté qu'il exige, tous doivent I être perfuadez que c'eft l'unique voye qui puiffe mener au Ciel, & que toute autre fe termine à la mort. Il eft vrai que pour arriver à la fainteté & à la perfection de l'Evangile, on prefcrit aux Religieux des moyens & des exercices differens de ceux que l'on prefcrit aux gens du monde; mais on ne leur prefcrit pas une autre fainteté, ni par confequent d'autres vertus. C'eft une chofe à quoi on ne fait pas affez d'attention. On confond presque toûjours les exercices exterieurs de la vie Religieufe avec les vertus de la vie Chretienne. On croit, par exemple, que la modeftie des habits ne convient qu'aux Religieux, parce que ceux qu'ils portent font d'une figure particuliere; que le recueillement n'eft que pour les Cloîtres , parce qu'il y a des temps & des heures où l'on y garde le filence ;; que la Penitence y doit être releguée, parce qu'on y jeûne, & qu'on y pratique d'autres mortifications reglées & commandées. On fe trompe, ces vertus font de l'Evangile qui eft la regle de tous les Chretiens? & quoi qu'ils n'ayent pas comme les Religieux tel ou tel moyen pour les acquerir, ils font neanmoins dans une obligation indifpenfable de les avoir & de les pratiquer. Il faut que leur modeftie foit connue de tous les 1 hommes, qu'ils confervent le recueillement du cœur au milieu de toutes les diffipations du fiecle, qu'ils portent la mortification du Seigneur Jefus fur leurs corps, qu'ils le châtient, qu'ils le reduifent en fervitude, & qu'ils faffent mourir tous les defirs de la convoitife par le glaive d'une circoncifion fpirituelle. Le commandement de prier fans ceffe eft pour eux comme pour les Religieux. Il faut donc que fans être au chœur à certaines heures comme les Religieux, leur ame soit fans ceffe unie à Dieu par la charité, & par de frequentes Oraifons. Il faut que fans faire vœu de pauvreté ils foient parfaitement détachez des biens de la terre, & qu'ils fe contentent d'en avoir l'ufage fans s'y attacher? que fans faire vœu d'obeïffance ils foient attentifs à écouter les ordres de Dieu pour les fuivre, & qu'ils puiffent dire avec le faint Roi David Pf. 122. Comme les yeux des ferviteurs font attachez 9. 39. fur la main de leur maître, & les yeux des fervantes fur la main de leur maîtresse, aussi les nôtres font toûjours attachez für le Seigneur nôtre Dieu pour connoître fa volonté, & nous mettre en devoir de l'accomplir. C'eft pour les Chretiens convaincus de ces grandes veritez que j'ai compofé cet Ouvrage ; & ainfi perfonne ne doit être > furpris, fi les regles que je proposerai dans ce Livre. C CHAPITRE IV. De la Priere. 'Eft une verité de foi, que l'homme v 18, 19. propres forces, & fans le fecours de la grace de Dieu acquerir la fainteté à laquelle fa Religion l'appelle, & l'oblige. Sans moi, dit Jesus- Joan. Chrift, vous ne sçauriez rien faire. Le falut, 16. v s. dit faint Paul, ne dépend ni de celui qui Rom 9, 16 |