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fuperbes & magnifiquement meublées, une infinité de choles fuperfluës, un grand nombre de domeftiques, auffi impies que leurs maîtres, la bonne chere, & tous les autres plaifirs qui en dépendent, une prodigalité effroyable, quand il s'agit de paroître dans le monde ; & par-deffus tout cela, des entrailles de fer pour les pauvres, une dureté qui va jufques à ne les pouvoir fouffrir, jufques à les laiffer mourir de froid, & languir de faim, pendant qu'on a beaucoup d'habits fuperflus dans fes coffres, & qu'on nourrit des chevaux & des chiens pour fon plaifir. Jugez aprés cela, fi JefusChrift a eu tort de maudire l'état des riches; & fi ce ne fut pas tres-juftement, que celui qui négligea le pauvre Lazare, fut enfeveli dans l'enfer aprés fa mort. Il eft fi difficile de faire un bon ufage des ficheffes, que le Sage demande fi on peut trouver un homme riche qui ne se foit point attaché à ses richesses, qui n'y ait pas mis fon efperance. Montrez- Eeel, vă m'en un, dit-il, afin que je fasse son 9. éloge scar quel qu'il puisse être, c'est un homme miraculeux, qui a fait des prodiges durant fa vie. Il eft bon de fe remettre fouvent ces terribles veritez devant les yeux ; afin de ne se pas laiffer enchanter

Matth. par l'illufion des richeffes. C'est ainfi que 15. 22. Jefus-Chrift en parle. Il y en a, dit-il, qui écoutent la parole de Dieu, & qui font marquez par cette partie de la femence qui tomba parmi des épines, parce que les inquietudes de ce fiecle, & l'illufion des richeffes, & les autres paffions s'emparant de leur cœur, y étouffent la parole, &font qu'elle demeure fans fruit.

CHAPITRE II.

Où l'on voit les devoirs d'un riche qui fe vent fauver.

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I le falut des riches eft tres-difficile, il n'eft pas impoffible à Dieu. Notre Seigneur ne leur a pas commandé de quitter leurs richeffes, & ne les a pas exclus de fon Royaume, pourvû qu' qu'ils vivent felon les regles de fon Evangile. Tout ce que nous venons de dire, eft contre ceux qui amaffent des trefors pour eux, &qui ne font pas riches en Dien. Les riches ont donc leurs devoirs & pourvû qu'ils les rempliffent ils feront fauvez. Saint Paul en a remarqué les prin 1.Tim. cipaux, quand il a dit: Ordonnez aux riches de ce monde de n'être point orgueil ☛ fuiv. jeux, de ne mettre point leur efperance

Buc. 12.

6.17

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dans une chofe auffi peu folide que les richeffes, mais dans le Dieu vivant qui nous fournit avec abondance ce qui eft neceffaire à la vie; de travailler à fe faire riches en bonnes œuvres ; de donner volontiers & de bon cœur de faire part de leurs biens à ceux qui en ont befoin, & de s'acquerir un trefor&un fondement folide pour l'avenir, afin d'arriver à la veritable vie. Voila trois ou quatre devoirs d'une grande confequence.

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Le premier, eft de ne fe point glorifier de fes richeffes, & de n'y pas mettre fa confiance, parce qu'elles font incapables de nous rendre véritablement heureux. Il faut, difoit faint Auguftin à une Da- Lettre me tres riche, qu'à force d'aimer & de Probe, defirer la véritable vie, vous vous re- * gardiez comme abandonnée & fans con- * folation dans celle-ci, quelque heureuse » que vous y foyez. Car comme il n'y a de veritable vie que celle en comparaison » de laquelle, celle-ci que nous aimons tant, ne merite pas feulement le nom de » vie, quelque douce & quelque agréable qu'elle foit; de même il n'y a de véritable confolation que celle que Dieu promet » par un Prophete quand il dit : fe lui don- » nerai la vraye confolation & la paix, qui » eft au-deffus de toute paix. Sans celle-là »

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,, toutes les confolations de cette vie, font des afflictions & des peines, plûtôt que des confolations. Car quelle confolation » peut on trouver dans les richeffes & les ,, dignitez, par où ceux qui n'ont point ,, éprouvé cette felicité veritable fe trouvent ,, heureux; puifqu'il eft fans comparaifon plus beau d'être en état de s'en paffer, que d'en avoir, & que quand on en a, la crainte de les perdre tourmente encore plus que l'ardeur de les poffeder quand on ,, n'en a pas?

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La feconde regle que l'Apôtre preferit aux riches, eft de mettre leur confiance en Dieu; & nous l'expliquerons dans le dernier Chapitre de cet Ouvrage, où nous parlerons du defir de la beatitude, qui ne doit jamais fortir de notre cœur.

La troifiéme eft de fe faire riches en bonnes œuvres, c'est-à-dire, de faire abondamment l'aumône. Car le bon ufage des richesses confifte à ne les point employer au mal, & à faire par elles tout le bien qu'on peut. Sur quoi il eft bon de remarquer, 1. que ceci eft un précepte & Luc. 11. non pas un confeil: Ordonnez, dit faine 41. c. 6, Paul; & Jefus-Chrift l'avoit ordonné avant lui : Donnez l'aumône de ce qui vous refte: Donnez à tous ceux qui vous demandens: foyez boys & mifericordieux;

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17.

donnez, & il vous fera donné. Ce Commandement étoit dans l'ancien Teftament, comme il eft dans le nouveau. Le Saint Efprit a recommandé une infinité de fois aux riches, d'avoir compaffion des pauvres, & de ne jamais détourner le viTage & la main de ceux qui nous demandent : & faint Jean dit; Que celui qui foam. si ayant des biens de ce monde, & voyant fon frere en neceffité, lui ferme fon cœur & fes entrailles, ne peut pas dire que l'amour de Dieu eft en lui. 2. Que ce précepte eft d'une fi étroite obligation, que celui qui ne fait point l'aumône, peche non feulement contre la charité, mais auffi contre la juftice; parce que Dieu étant le Maître fouverain de tous les biens de la terre nous n'y avons que le droit qu'il lui plaît de nous y donner: nous n'y aurions rien s'il vouloit tout fe referver pour lui; & fi nous y avons quelque chofe, c'eft de fa liberalité que nous le tenons. Or il nous a donné les richeffes à trois condi tions. La premiere, que nous ne les aimerons pas, & que nous n'y établirons pas notre felicité. La feconde, que nous en uferons comme n'en ufant pas, & qué nous les poffederons comme ne les poffedant pas. La troifiéme, que nous nous contenterons d'y prendre le vivre & le

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