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fent point Dieu, ne gardent aucunes mefures; ils fe plongent en toutes fortes de diffolutions: l'yvrognerie, l'incontinence, les impudicitez, & les débauches les plus honteufes font leurs plaifirs. Mais il n'en doit pas être ainfi entre les difciples de Jefus-Chrift, qui doivent toûjours avoir Dieu devant les yeux, pour fe réjouir dans le Seigneur, & felon la Loi du Seigneur.

III.

,

Il y a des plaifirs fi dangereux & fi funeftes pour l'homme pecheur, que le peril de s'y corrompre lui en doit infpirer une tres-grande horreur. Tels font le Bal, l'Opera, la Comedie, les autres affemblées où l'on ne fonge qu'à fe divertir, & où les hommes fe rencontrent avec les femmes dans une grande liberté, la galanterie, & chofes femblables qui amolliffent l'ame, qui y verfent le poifon de l'amour profane qui chaffent le SaintEfprit, qui ouvrent le cœur aux tentations, où l'on perd beaucoup de temps, où l'on dépenfe en un mois, & quelquefois en un jour plus d'argent qu'on n'et donne en toute une année aux pauvres & où l'on eft une pierre de fcandale à ceux qui nous voyent à ces fpectacles, & aux Comediens, dont la profeffion est condamnée par les Canons, & à qui ce

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pendant, par le gain qu'on leur procure, on fournit des richeffes, qui fouvent font employées à commettre mille crimes. Il eft impoffible qu'on ne participe à la corruption dont ces lieux font remplis', aux pechez qui s'y commettent, aux ravages que le demon y fait. Car il y regne comme dans fon propre empire. En vain donc certaines perfonnes, s'appuyant fur leur temperament qui n'eft pas aifé à émouvoir, & fur l'experience du paffé, pretendent pouvoir fe trouver à ces divertif femens, fous pretexte qu'il ne leur eft pas arrivé d'y commettre de grandes fautes. Outre qu'il y en a qu'on ne peut éviter, comme le fcandale, la perte du temps, la dépense qu'on y fait, la part que l'on prend aux pechez des autres; il fera toûOn s'eft jours vrai de dire , que celui qui aime le peril, y perira. L'exemple de faint Alipe, duction raconté par faint Auguftin dans le huitiéDubois. me chapitre du fixiéme Livre de fes Confeflions, eft fi formidable, que je vous prie de le lire, pour comprendre combien toute forte de fpectacles font dangereux.

fervi de

la tra

de M.

IV.

La derniere regle fur le divertiffement, eft pour les penitens, à qui on n'en doit pas tant accorder qu'aux juftes & aux innocens. Quand on a abufé des chofes

permises, il eft jufte de s'en priver. On ordonne aux penitens plus de mortifications, & on leur accorde moins de plaifir qu'aux gens de bien. Je parle même des plaifirs, qui dans certaines circonftances peuvent être innocens ; & furce principe un vrai penitent doit, autant qu'il lui eft poffible, éviter les feftins, les promenades, les converfations agreables, comme des douceurs dont il n'eft pas digne, & qui ne font pas pour lui. Un homme qui connoît & qui fent l'énormité de fes crimes, entre le plus qu'il peut dans l'efprit de l'Eglife, qui interdifoit autrefois aux penitens, la plupart des chofes qui peuvent rendre la vie douce & agreable. Il a toûjours dans l'efprit, que celui qui a beaucoup peché, doit beaucoup pleurer; que le jeûne & les larmes font des devoirs effentiels à la penitence, & que le plaifir lui eft prefque toûjours fatal. Ayant éprouvé fa foibleffe, peut-être par mille experiences, il fuit la volupté comme sa plus dangereufe ennemie, il embraffe la penitence comme l'unique planche qui lui refte, pour fe fauver aprés tant de naufrages.

CHAPITRE XII.

De la retraite & du recueillement.

D

que

E tous les confeils l'on vous peut donner, celui-ci eft le plus inportant & le plus neceffaire. Voyez peu, fortez peu, parlez peu. Une ame qui quitte la folitude fans une indifpenfable neceflité, eft un foldat qui fort de fes retranchemens, & qui s'expofe tout defarmé aux traits de fes ennemis : c'est un poiffon qui fort de l'eau, & qui par là fe met en danger de mourir. Plus vous verrez les hommes, plus vous vuiderez votre cœur les meilleurs entretiens, quand ils font trop longs & trop frequens, deviennent pernicieux à notre ame, parce que nous fommes fi corrompus, que nous changeons tout en poifon. Il y a dans tous les hommes quelque chofe de contagieux, qui vient de leur dépravation naturelle, qui fe répand imperceptiblement & qui fe communique avec une prodigieufe facilité. Un Ancien disoit: Toutes les fois que je vas avec les hommes, j'en reviens un peu moins homme. Un Chretien peut dire de même : Toutes les fois que je frequente les Chretiens de ce fieçle, j'en reviens moins Chretien.

Que fi cela eft vrai des vifites que les juftes fe rendent les uns aux autres, helas! il l'eft mille fois davantage de celles que l'on fe rend dans le monde, & du commerce que l'on a avec lui. La verité nous découvre que le monde eft l'empire du demon, le royaume de l'orgueil, de la volupté, & de toutes les paffions; un lieu de trouble & de confufion, l'ennemi de la verité, & le perfecuteur des gens de bien; une mer toûjours battuë de la tempête, où l'on ne voit que des naufrages; une ville dont l'air eft empefté, une forêt pleine de bêtes farouches qui ne cherchent qu'à devorer les ames, un tourbillon de feu qui enveloppe la plus grande partie des hommes, un veritable enfèr, où l'on ne voit nul ordre, & où regne une horreur éternelle. En effet, fi vous jettez les yeux fur ce qui fe paffe dans le monde, vous verrez que l'on n'y entend que des difcours profanes, qu'on n'y lit que de méchans Livres, qu'on n'y frequente que des perfonnes fcandaleufes, qu'on n'y découvre que des objets de tentation, & que l'on n'y voit que de pernicieux exemples. Toutes les marques du chriftianifme y font prefque effacées : il n'y eut jamais plus d'impureté dans les mariages, plus de corruption dans les

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