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eux, ni de la raison pourquoi ils rendoient une espece de culte à de certains animaux, efpece de culte qui a fait croire contre toute vraisemblance qu'ils les adoroient effectivement.

Ariftote parut après Platon. Qui dit Ariftote, femble dire la Science même. En effet ce Philofophe a prodigieufement écrit, & a traité bien des fortes de matieres; fon ftyle est ferré, fec & fans ornemens; malgré cela ses traitez de Politique, de Rhétorique, & de Poëtique font admirables auffi pour ces fortes d'ouvrages ne faut-il qu'un grand fens, & ce grand fens eft de tous les temps & de tous les pays. Plufieurs de fes autres écrits font fi inférieurs à ceux-là qu'on les croit fuppofez. On ne peut s'empêcher de reconnoître qu'Aristote a eu une plus grande étendue de connoiffances, que tous ceux qui ont été avant lui; mais il n'a jamais du paffer pour un oracle, surtout en Phyfique. Son nom a trop long-temps impofé dans les Ecoles; aujourd'hui on fe rend à la raifon, & non plus à l'autorité. Comment les Grecs au

roient-ils été véritablement favans? Ils n'avoient ni Critique, ni Théologie, ni Jurifprudence, ni Chronolo. gie, ni Histoire, fi ce n'eft de ce qui s'étoit paffé autour d'eux.

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Quintilien parlant des anciens Grammairiens Grecs nous dit que s'érigeant en cenfeurs ils paffoient en revûe les écrits des différens Auteurs, démêloient ceux qui étoient fuppofez d'avec les véritables, & rangeoient ceux-ci en meilleur ordre; il entendoit apparamment Ariftarque & quelques autres célèbres Grammairiens. Mais je ne vois pas que ces cenfeurs ayent porté leur travail & leur critique bien loin. Nous ont-ils dit fi la Batrachomyomachie & toutes les Hymnes que nous avons fous le nom d'Homere, font de ce grand Poëte ? fi la Théogonie eft d'Héfiode ? fi les Vers d'Orphée doivent porter ce nom, & qui en eft l'Auteur ? fi parmi les Lettres de Platon il n'y en a point quelqu'une de fuppofée ? fi tant de Traitez attri buez à Ariftote, font véritablement de ce Philofophe? On dira peut-être que ces piéces ont été fabriquées dans

des temps poftérieurs; mais au moins pouvoient-ils donner une notice des ouvrages de chaque Auteur; par-là ils auroient obvié à la fraude des fiécles à venir. Ces Grammairiens ontils remarqué le fabuleux d'Hérodote & de Ctéfias? ont-ils bien arrangé les actes, les fcenes, les vers d'Euripide, de Sophocle, d'Ariftophane ? nous ont-ils donné les vers de Pindare fuivant leur jufte mesure? Enfin ont-ils éclairci, expliqué tant d'endroits difficiles qui fe trouvent dans les écrits des Anciens? Puifqu'ils étoient fi paffionnez pour la gloire de leurs écrivains, fi amoureux de leur langue, fi indifférens pour toutes les autres, ne devoient-ils pas du moins nous laiffer quelque Grammaire & quelque Vocabulaire, qui facilitaf fent l'intelligence de leurs écrits, & confervaffent leur langue à la postérité? Il eft vrai que bien antérieurement à Suidas, à Hefychius, à Pollux, à Harpocration, quelques autres dont il eft parlé dans Photius, avoient compofé des efpeces de Gloffaires, & de Léxiques; mais ces ouvrages em

braffoient feulement une partie de la langue Grecque, non toute la langue; ainfi ils ne feroient nullement comparables aux dictionnaires de nos Etiennes, ni à celui de l'Académie Françoise; fans compter qu'ils n'ont pas été faits dans le bon temps de la Grece, qui eft le feul dont il s'agiffe ici. Je n'ai donc pas eu grand tort de dire que les Grecs n'ont pas fait tout ce qu'ils pouvoient pour l'avancement des Lettres.

Ces peuples avoient des Dieux, une religion, un culte ; ils étoient infiniment fpirituels & policez; n'étoit il pas naturel qu'ils euffent une Théologie, pour maintenir les faines idées contre tant d'erreurs populaires & d'abus groffiers: Car au temps de Cécrops ils n'adoroient que Jupiter très haut, Zeus malos, ils lur faifoient des offrandes de gâteaux qui parce qu'ils étoient cornus, s'appelloient ous, d'où eft venue l'opinion qu'ils lui facrifioient un bœuf, mais c'est une erreur. Dans la fuite ils imaginerent ou adopterent tant de fables, que le fonds de leur ancienne re

que

ligion en fut étouffé. Les dieux des Egyptiens, des Phéniciens & des Crétois partagerent avec le très-haut un culte qui n'étoit dû qu'à lui, & les Grecs s'en firent une infinité d'autres. Cependant plufieurs de leurs divinitez n'étoient qu'allégoriques, plu fieurs autres n'étoient que des génies tutélaires, des patrons ; d'autres étoient des héros, qui s'étant rendus utiles au genre humain, avoient parlà mérité le féjour des bien-heureux, & dont ils croyoient devoir honorer la mémoire. Il ne faut pas croire leursSages regardaffent Neptune, Pluton, Mars, Vulcain, Bacchus, comme des dieux, encore moins Hercule, Caftor & Pollux, ni Junon, Minerve, Cerès & Venus comme des déeffes, ni que ces ridicules métamorphofes de Jupiter & des autres dieux trouvaffent créance dans leur efprit. Un Grec jaloux de l'honneur de fanation, & qui auroit eu un peu de critique, nous auroit démêlé tout cela. Il auroit montré que leur religion dégagée des fictions & des fables que les Poëtes & le peuple y avoient in

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