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j'ai l'honneur de vous préfenter; auffi n'au rois-je jamais fongé à la donner au public, file fuccès flatteur d'une feconde repréfentation ne m'eût fait entrevoir que je pouvois, fans danger, expofer à l'impression ce que mon amour propre me forçoit d'enlever au théatre.

Quelque indifpofé que j'aie toujours été contre les épîtres dèdicatoires, je me fuis fait une loi de penfer comme les maîtres de mon art, en dédiant leurs poëmes; fans doute ils les comparoient à ces fuperbes édifices qui n'ont befoin que d'une divinité tutelaire plat pour le garantir de la foudre.

Me feroit-il permis, MONSEIGNEUR, d'entrer dans cette idée? Digne imitateur des Colberts, vous connoiffez tout le prix des talens; vous les eftimez, vous les récompenfez; j'en fai même que vous n'avez pas dédaigné d'honorer de votre amitié, Ma

patrie ferappellera toujours avec reconnoif fance les bienfaits dont vous avez comblé un de fes citoyens, né pour être l'honneur de Son païs, en contribuant à la gloire des let

tres.

Que ne puis-je moi-même, en vous payant ici le tribut de mon zéle, avoir, au lieu d'un coup d'effai, un chef-d'œuvre à vous offrir, pour apprendre à la postérité avec quel dévouementrefpectueux j'ai l'hon neur d'être,

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ACTEURS.

ANTOINE.

OCTAV E.

HE'R ODE, roi des Juifs.

JULIUS, fils d'Antoine.

EROS, affranchi, & confident d'Antoine. CLEOPATRE, reine d'Egypte.

IRAS, confidente de Cléopatre.'n mito AGRIPPA, confident d'Octave. GENERAUX de l'armée d'Antoine.

ROMAINS.

EGYPTIENS.

Quatre LICTEURS

La fcéne eft dans le tombeaux des rois
d'Egypte, entre les deux camps.

CLÉOPATRE,

TRAGÉDIE.

ACTE PREMIER.

SCENE PREMIERE.

HERODE, JULIUS.

H

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JULIUS.

E'RODE, quand j'arrive à peine fur ces bords,

De l'heureux Julius concevez les tranf ports.

Octave, impatient d'entretenir mon pere, Dans Antoine déja ne connoît plus qu'un frere: Et fans doute Octavie, en des momens fi doux; Ne devra qu'à mes foins le cœur de fon époux.. Jour heureux, qui rendra, dans une paix profonde, Deux citoyens à Rome, & deux maîtres au monde.

Cependaut, à travers l'efpoir & le plaifir,
Dont je parois ici m'enyvrer à loisir
S'il faut que devant vous mon ame fe déploye,
Une peine fecrette empoifonne ma joye.
Hélas!
Pour la premiere fois j'ai vû mon pere.
Il n'a point vû fon fils fe jetter dans fes bras.
Du fang dont je fuis né trop indigne peut-être ;
Sous un nom étranger je me fuis fait connoître.
Mais, prince, il me fuffit: J'ai fuivi vos confeils;
On ne fauroit errer, guidé par vos pareils.
HERODE.

Eh! Qu'auroit pû produire un aveu téméraire ?
Dans quel temps? Dans quels lieux aborder votre
pere?

Quand, des projets d'Octave occupé le premier,
Il roule en fon efprit le fort du monde entier,
Parmi des légions qui, laffes de leurs veilles,
De cris féditieux fatiguent fes oreilles?
Envoyé des Romains, craignez, avant d'agir,
Que d'un zéle imprudent vous n'ayez à rougir;
Prenez d'un inconnu la fuppliante audace;
Dans le fond de fon cœur cherchez ce qui fe passe.
Des yeux de Cléopatre épris jufqu'à ce jour,
S'il revient dégagé d'un criminel amour,

Tous vos vœux font remplis. S'il ofoit, au contraire,
Brûler plus que jamais d'une flamme adultére,
Que d'Octavie, en vous, il entende les cris;
Qu'il frémiffe, & qu'il change à l'afpect de fon fils;
Redemandez-lui compte, en ces inftans d'yvreffe,
De trois luftres entiers d'absence & de tendreffe.
Voilà, n'en doutez point, le feul & vrai moment
Où l'amour affoibli s'efforce vainement;
Où, n'ofant du devoir combattre le murmure,
Il rend la raifon libre à l'ame qui s'épurc.

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