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le fecours d'une chaleur étrangere, & dont les parties ayent des rapports de convenance avec celles du Poulet. Tous Oifeaux feroient bons pour cela s'ils vouloient avoir la patience de fomenter les œufs comme il faut; mais comme les Poulets & autres Oifeaux de la Baffe-cour font plus à portée, on s'en fert pour couver les oeufs qu'on deftine pour augmenter l'efpece de la Volaille.

Pour avoir des Poulets en Hyver.

Nous avous dit comment on devoit nourrir les Poules pour avoir des œufs en Hyver, & comme la ponte qu'elles font eft un préjugé de leur couvée : il faut, fi l'on fouhaite les employer à cet ouvrage dans cette faifon, les entretenir de même : la chambre où l'on met ces couveuses doit être chaude, la nourriture ni l'eau ne doit point leur manquer : il fera bon de leur donner un peu de fenevé de temps en temps, où de la rôtie au vin pour les échauffer; la graine d'ortie leur est encore merveilleufe.

Lorfqu'on entend gloffer ces Poules, on leur cherche un endroit pour les placer. Ce lieu doit toûjours être détourné & hors du bruit, afin que les couveufes ne foient point detournées de leur travail en aucune maniere. Pendant qu'elles couvent on a foin de les traiter comme auparavant, parce qu'elles n'ont pas moins befoin de chaleur pour fomenter leurs oeufs, que pour fe difpofer à l'incubation.

Quelques-uns, pour avoir des Poulets en Hyver fe fervent de gros Pigeons de voliere fous lefquels ils mettent des oeufs de Poules. Ces Pigeons n'en peuvent embraffer que quatre ou cinq,& on les met dans des grandes Cages en un lieu bien chaud. Il ne faut pas les laiffer manquer de nourriture, & leur donner fur tout du chenevis une fois par jour.

Secret de faire éclore des œufs fans Poules.

D'Autres plus curieux encore que les premiers font éclore des œufs fans le fecours d'aucun oifeau; ils ont pour cela un petit fourneau, préparé exprés, échauffé par le deffous d'un feu continuel, moderé neanmoins, & toûjours égal; ce fourneau eft pour l'ordinaire de fer ou de cuivre, & fabriqué comme un four à cuire du pain.

Enfuite ils prennent de la plume la plus molle, ils en mettent fur ce fourneau autant qu'ils le jugent à propos, & deffous l'aire quatre lampes aux quatre coins, qui restent toujours allumées, & qui font pofées de telle forte que leur flamme échauffe cet air, qui communique fa chaleur à tout le refte du fourneau.

Ces curieux ayant adroitement obfervé tout cela, prennent dix ou douze œufs, ou davantage, s'ils le jugent à propos ; ils les pofent dans la plume dont ils les couvrent auffi, puis un oreiller de plume par deffus; ils les laiffent en cet état pendant dix-huit ou vingt jours que les pouffins font formez, aprés cela ils les élevent comme nous le dirons. Il faut avoir foin de bien entretenir ce feu toûjours dans un même degré de chaleur,

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par ce moyen on pourra avoir des Poulets fans Poules ni autre Oifeau qui y foit propre.

Les Poulets ainfi éclos font fort délicats à élever, & fujets à des fluxions dangereuses, fi l'on n'y prend garde; c'eft po quoy il les faut mettre dans une chambre qui foit chaude, les tenir enfermez dans quelque petit vaiffeau garni de plume dans le fond, & couvert par deffus d'un petit oreiller de duvet fort leger, afin que les pouffins ne s'étouffent pas deffous, & couvrir le vaiffeau de quelque couverture, ou d'autre chofe femblable: on laiffe ainfi ces petits Poulets toute la nuit, & on ne les en tire pendant le jour que pour leur donner à manger, ce qui peut arriver à cinq ou fix reprifes, ou pour mieux dire toutes les fois qu'on entend ces petits Oifeaux piauler; car c'eft une marque alors qu'ils demandent à manger. Cette curiofité, comme on voit, exige un peu de foins, & beaucoup d'attention; mais que ne fait-on pas quand il s'agit de faire de ces fortes d'experiences, qui ne coûtent gueres, & qu'on veut éprouver comment & jufqu'à quel point on peut aider la nature dans fes productions? Il faut gouverner de même les Poulets qu'on aura mis éclore fous des Pigeons, parce que ces Oifeaux ne les conduifent point.

AP

Soin qu'on doit avoir des Couveuses.

Prés qu'on a mis couver les Poules, & pendant tout le temps qu'elles couvent, on met leur mangeaille prés d'elles, afin qu'elles n'aillent pas loin pour l'aller prendre, & que par ce moyen elles ne laiffent pointmorfondre leurs œufs: il eft méme à propos que cette nourriture foit tellement à leur portée qu'elles puiffent la prendre de deffus leur nid; car il y a des Poules qui font fi grieches, que du moment qu'elles font horsde deffus leurs ceufs, on a de la peine à les y faire retourner. Il faut pour qu'elles le faffent d'elles-mêmes, qu'elles foient bien franches, & d'un naturel tres-porté à leur ouvrage.

On fe donnera bien de garde durant toute l'incubation de toucher aux œufs de la Poule, quoiqu'en difent nos anciens Auteurs, la nature ne l'inf-truit que trop à faire fon devoir, & l'on n'eft que de tres mauvais raifonneurs fur cet article, quand on dit, que lorfque la Poule eft fortie de fon nid, on doit en vifiter les œufs & les tourner avec la main, afin qu'étant également échauffez de tous côtez, les Poulets s'en forment plus furement ce font les propres termes de Columelle, & le fentiment de Columel. 1. fes adherans qu'il faut rejetter comme une vifion plus préjudiciable qu'a- 8. ch. S1 vantageufe. Nous avons une preuve de cela dans les Poules qui fe mettent à couver d'elles-même, à la dérobée, & dont la couvée eft toujours bien plus heureuse que celles qu'elles font à la maison, & cela, fouvent par la chimere qu'une femme fe met en tête, & fur laquelle il faut qu'elle fe fatisfaffe. Tant d'autres Oifeaux ont-ils befoin d'une main étrangere pour leur aider à fomenter leurs œufs, la nature encore un coup qui les conduit leur dicte mieux ce qu'il faut qu'ils faffent, que tout ce que nos foibles rai→ fonnemens peuvent nous en apprendre là deffus.

Il y a encore des femmes fi impatientes, que lors qu'elles ont mis une Poule couver, & qu'il y a feulement quatre jours qu'elle fomente fes œufs,

qui les levent l'un aprés l'autre, & regardent à la clarté du Soleil, s'il n'y a point quelques filets fanglans pour les jetter, & c'est ce qui les trompe; car comme nous l'avons dit, il faut que dans ce temps, & pour faire que le Poulet fe forme dans l'oeuf, il y paroiffe une ligne de fang vermeil, fans quoy cet œuf ne vaut rien; ainfi l'on voit qu'au lieu de fe faire un bien, on le caufe un préjudice tres-confiderable: outre qu'il y a des Poule s qui du moment qu'on a touché à leurs oeufs, ne veulent plus retourner deffus; c'eft pourquoy la bonne maxime eft toûjours de ne point toucher aux œufs d'une Poule qui couve, que les pouffins n'en foient éclos.

On défapprouve encore ces femmes, qui dans le doute que tous leurs œufs ne foient bons, & que les petits n'en puiffent fortir par la dureté de leur coque, les mettent environ le dix-huitième jour dans de l'eau tiede, pour l'attendrir, ôtent les oeufs qui furnagent, & remettent les autres fous la Poule; à quoy bon tout ce miftere quand il n'opere rien? Est-ce que pour le peu de temps que ces œufs reftent dans l'eau, leur coque peut s'amolir; ainfi, c'est donc peine inutile, & soins plus capables de tout gâter, que de produire de bons effets.

On peut le vingtième jour de la couvée, & lorfque la Poule eft allé prendre de la nourriture, voir fi les pouffins n'ont point piqué, & percé les œufs de leur bec: il ne faut les remuer que tres-peu, voir s'il y a quelque Poulet qui ne puiffe fortir à caufe de la dureté de la coque, & ouvrir l'oeuf legerement avec l'ongle. Si neanmoins on ne veut pas le faire, c'eft encore mieux; laiffons tout faire à la nature, & ne luy aidons que dans les chofes où nous voyons abfolument qu'elle a befoin de nôtre fecours. Un pouffin a toûjours affez de force pour rompre les portes de fa prifon, & la plupart de tous ces foins qu'on a inventez font des foins tres-inutiles; on veut juger de ce qu'on ne connoît pas, & fe piquer d'être plus habiles dans les ouvrages de la pure nature qu'elle même.

Enfin quand le terme de l'incubation eft arrivée, qui eft le vingt-uniéme jour qu'on a mis les oeufs fous la Poule, il faut la vifiter, voir ce qu'elle a de Poulets, ôter du nid les coques d'oeufs & ceux qui n'ont rien valu, & prendre garde que la mere en fe levant trop brufquement n'écrafe quelqu'un de fes petits: fi par hazard il y en avoit encore qui ne fuffent pas hors de la coque, il faudroit attendre qu'ils en fuffent fortis pour leur donner à manger; ils peuvent ainfi demeurer un jour ou deux fous leur mere fans aucun rifque.

Les Poules qui couvent veulent être en repos, c'est pourquoy, comme on a déja dit, il eft bon de les mettre couver dans quelque endroit dérobé où il n'y va perfonne, & où les chiens, les chats, & autres bêtes qui leur nuifent, ne puiffent approcher, pas même les autres volailles qui font capables d'interrompre les couveufes dans leur travail jusqu'à les obliger à quit

ter leur nid.

Soin qu'on doit prendre après les Pouffins.

Itôt que les Pouffins font tous éclos, on prend un crible ou un panier Specé on les met dedans, puis on fait fumer deffous quelques herbes

aromatiques qu'on aura brûlées; les Anciens recommandent fort pour cela le pouliot : le thim, la fauge & autres plantes de cette forte font encore merveilleuses; on a éprouvé que cette fumigation garantiffoit les petits poulets nouveaux nez de la pepie à laquelle ils font alors fort fujets.

Aprés ce premier foin, on les met avec leur mere fous une grande cage d'ozier, qu'on appelle Muë; ce doit être dans une chambre fort éclairée, ou dans quelqu'endroit d'une Cour où le foleil donne; la chaleur de cet aftre les fortifie beaucoup; il faut veiller en ce dernier lieu, qu'il n'y vienne point de pluye; car alors on doit vîte rentrer les Poulets à la maifon, l'eau les morfond quand ils font fi jeunes, & les fait souvent mourir

riture.

La nourriture ordinaire qu'on donne aux Poulets nouvellement éclos eft Leur neurd'abord le Millet cru, ce grain les nourrit fort bien & convient à leur petit gofier par où il defcend aifément. On leur donne deux ou trois jours aprés de l'orge, ou du froment boüilli, des miettes de pain trempées quelfois dans du vin, dans du lait ou dans du caillé, & tout cela alternativement, afin de les mettre toûjours en appétit.

que

Quand les Pouffins feront un peu plus forts, on prendra des feuilles de porreaux bouillis qu'on leur hachera fort menu, & qu'on leur donnera une fois ou deux feulement en guife de médicament; cet herbe les échauffe & leur fortifie le cœur. Il ne faut point les laiffer manquer de nourriture; c'est le Millet qui leur doit être la plus ordinaire, aprés cela, les autres grains dont on a parlé. On foignera auffi de leur donner à boire de l'eau qui foit nette, autrement ils feroient bientôt attaquez de la pepie.

Pour garantir les Pouffins d'indigeftion, il faut, dit-on, au commence- Columel. I. ment qu'ils font éclos, les laiffer trois jours avec leur mere, & avant que 8.c.s. de leur donner la nourriture nouvelle, leur tâter à tous l'un aprés l'autre le jabot, pour voir s'il n'y refte point de mangeaille du jour précedent; car s'il y en avoit, ce feroit une marque qu'elle ne feroit pas digerée, & que la nature par confequent n'auroit pas eu affez de force pour la confommer; pour lors il ne faudroit leur rien donner, & attendre que la chaleur ait cuit & fait paffer cet aliment, aprés cela, aller fon train ordinaire.

L'air pris à propos contribue beaucoup à fortifier les petits Poulets, comme par exemple, de les mettre au foleil fous leur cage, quand ils font encore bien nouveaux, on les y laiffe environ deux ou trois heures, puis on les retire pour les remettre dans leur chambre ordinaire; ce foin fe continuë pendant quinze jours qu'ils font devenus plus forts, & alors on les abandonne à la conduite de leur mere qui les mene promener à la campagne, & qui les éleve jufqu'à ce qu'ils fe fequeftrent de fa compagnie.

lets.

Sil'on a plufieurs couvées de Pouffins qui ayent éclos à peu prés en même Remarques temps; c'est à dire huit à dix jours l'une de l'autre, on peut en donner à con- fur la conduire à une Poule jufqu'à trente, & jetter dans la Baffe-cour celle à laquelle duite des on aura ôté les petits, afin qu'elle fe remette à pondre de bonne heure; mais petits Pouil eft effentiel de prendre garde que cette Poule,à la conduite de laquelle on abandonne tous ces Poulets, foit d'un inftinet qui foit doux & de bonne amitié; car fi elle étoit acariâtre, qu'elle bleffât fes petits en grattant la terre qu'elle ne les échauffât pas bien fous fes ailes, & qu'elle grimpât fouvent

dans des endroits où fes petits ne pourroient la fuivre, on fe garderoit bien de luy commettre toute cette bande, au contraire il faudroit luy ôter les fiens propres,pour les donner à une autre : c'eft un ménage que d'en agir ainfi; car plus il y a des Poules qui fe remettent à pondre, plus & plutôt on a d'œufs pour la provifion de la maifon. Liébault dit qu'il faut que les Poulets foient. Maif. Ruf. quarante jours fans fortir du couvoir; mais cette maxime ne s'observe pas 1. 1. ch. 15. tout à fait exactement, pourvû, lorfqu'ils ont trois femaines, qu'ils fe promennent dehors fur un terrain fec, & que ce ne foit pas par la pluye, ils. croiffent toûjours bien, moyennant les bons foins qu'on en prend d'ailleurs, & la nourriture ordinaire qui ne doit point leur manquer.

Chapons

propres à Conduire des Pouf

fins.

Temps de faire des

On peut décharger, fi l'on veut, toutes les Poules de la conduite de leurs petits, qu'on donnera à des Chapons, qu'on aura inftruit exprés, & pour. cela,

Choififfez un Chapon de bonne corpulence, affez jeune & bien éveillé,. plumez luy le ventre, & le luy frottez avec des orties piquantes, enfuite enyvrez-le avec du pain trempé dans du vin, & continuez de le traiter ainfi l'efpace de deux ou trois jours, pendant lefquels vous le tiendrez enfer-mez dans une futaille où il ait de l'air, crainte qu'il n'étouffe, aprés cela, mettez-le fous une mue avec deux pouffins, qui mangeant avec ce Chapon l'obligeront de les prendre en affection, de maniere qu'il les couvera de fes aîles. Čes petits Poulets qui feront fous fon ventrre, qui eft tout plumé. adouciront la cuiffon que les orties y auront caufées, & ce Chapon qui fentira d'abord du foulagement dans fa douleur, en attribuera tout l'effet aux Poulets, fi bien que craignant dans la fuite de les perdre, & que par là sa cuiffon ne revienne, il ne veut plus à l'avenir les abandonner.

Quand le Chapon eft ainfi accoûtumé, on lui augmente foir & matin, & peu à peu le nombre des Poulets qu'on veut qu'il conduife; il ne faut que deux jours pour cela, aprés lequel temps il les conduit avec toute l'affection poffible, étant continuellement aux aguets & tout prêt de les défendre dans l'occafion. Ce Chapon les follicite à manger avec tout l'inf tinct poffible; il les promene autant qu'il peut fans les perdre de l'oeil, & ne les quitte point qu'ils ne foient tous grands & en état de fe paffer de luy, & de fe défendre eux-mêmes contre les infultes qui pourroient leur arriver; c'eft dans ce temps à peu près qu'il faut chaponner les mâles, c'est à dire les châtrer.

Il faut faire autant de Chapons qu'il y a de Poulets dans une Baffe-cour, c'est un ménage ; & la veritable faifon de faire cette operation eft le mois Chapons. de Juin. Si neanmoins il y avoit des Poulets qui ne fuffent pas affez forts pour la fupporter, on attendroit plus tard; tout l'été y eft propre, mais le

Comment

mois de Juin plus que tout autre temps.

Il y a des pays où l'on chaponne auffi les Poulettes pour leur rendre la chair plus délicate. Cette operation fe fait par incifion à la partie génitale & un peu à côté où l'on juge que font les tefticules : cette incifion faite, on y inferre le doigt pour chercher ces parties; on les tire, puis on coûd chaponner la playe, & on la frotte avec du beurre frais, ou d'autre graiffe qui ne foit point falée: fi l'on a quelque baume fpecifique & propre à confolider les playes, elles n'en feront que plûtôt guéries. Columelle ordonne de brû

les Poulet

tes.

L. 8. c. 1.

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