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pas tout à fait, parce, difent-ils que les marques dont on s'y fert font fujettes à pourrir, & qu'ainfi on pourroit travailler inutilement; mais que P'expedient le plus fûr eft de leur couper chaque année l'extremité d'une de leurs griffes ou ferres (comme on voudral'appeller) que cette operation ne leur nuit point, à caufe que les Pigeonnes ne grattent point comme les Poules; mais avec quoy auffi fe tiendront-ils fur les toits, ou fur beaucoup d'autres endroits mal unis où ils volent pour fe repofer: Ces Auteurs n'ont apparemment pas fait attention à cet inconvenient, qui répugne entierement à leur penfée, ainfi que toutes les peines qu'il faudroit fe donner pour l'execution de tous ces moyens qu'ils ont pris plaifir à inventer.

On veut croire que les vieux Pigeons ne produifent pas tant que les jeunes, & que même à un certain âge ils font tout-à-fait fteriles, & qu'ils peuvent empêcher les autres de bien faire leur devoir pendant l'incubation; mais que faire à cela, ira-t-on réformer la nature, & faut-il pour cela s'imaginer qu'ils caufent tant de dégats dans un Colombier, qu'on l'a écrit? c'eft ce qu'on a de la peine à fe perfuader, lorfqu'on voit tous les jours d'anciens Colombiers donner des Pigeonneaux en tres grande abondance,fans qu'on y touche,& par le fecret feul de ne point laiffer manquer les Pigeons de nourriture dans le temps qu'ils en ont befoin: ce qui donne à juger bien.fouvent, que ces défaftres qui arrivent dans un Colombier peuvent être plus juftement attribuez à la negligence qu'on apporte à nourrir des Pigeons, foit par avarice ou autrement, qu'à toutes les vifions dont on vient de parler, ainfi donc pour s'épargner le chagrin de voir un Colombier en defordre, il n'y a qu'àne point être avare de la nourriture & d'autres foins que les Pigeons exigent de nous, & aprés cela on aura tout lieu d'en être content.

Un Colombier bien peuplé & bien entretenu, eft un trefor dans une mai

fon de campagne pour le profit qu'on en tire par rapport aux Pigeonneaux Bons effets qui font d'un fi grand ufage parmy les alimens. La chair de ces Oifeaux des Pigeoncft tendre, fucculente & facile à digerer; elle nourrit beaucoup, elle eft neaux. un peu aftringente, elle fortifie, elle excite l'urine, elle déterge fes reins & en détache les matieres groffieres qui s'y arrêtent.

Les vieux Pigcons font de difficile digeftion, & ne peuvent convenir qu'à ceux qui ont un bon eftomac, qui font dans un mouvement continucl, & qui par confequent diffipent beaucoup. On fe fert en Medecine des Pigeons dans l'Appoplexie, dans la Léthargie, dans la Phrénesie & dans les Fiévres malignes, & pour cela on en ouvre un, qu'on applique encore tout chaud fur la tête, il agit en ouvrant par fes principes volatiles & exaltez les pores de la tête & facilite par ce moyen une libre fortie aux vapeurs fuligineufes qui s'élevent du cerveau.

,

Le fang de Pigeon qu'on vient de tirer, étant encore tiede, eft bon Sang de pour le mal des yeux, il en adoucit les âcretez, & en guérit les playes Pigeon nouvellement faites, il faut que ce foit d'un Pigeon mâle, & qu'on l'ait tiré de deffous l'aîle.

La fiente de Pigeon eft finguliere pour la fciatique ; on en fait un cata- Fiente de plafme avec de la femence de creffon & de moutarde mêlées également Pigeon, d'huile de mufcade, & d'olives, puis on applique le tout fur la

d'un peu

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Efpeces differentes des

Pigeons.

Choix des Pigeons.

La Voliere.

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partie douloureufe: on en fait auffi des cataplafmes réfolutifs, fortifians & difcuffifs.

Cette fiente eft encore utilement employée dans l'Agriculture, aprés neanmoins qu'on a laiffé exalter fes principes fes plus volatiles: on s'en fert pour la répandre dans les prez, elle en fait multiplier l'herbe, on en met dans les chenevieres, & dans les jardins quelquefois, felon que les Jardiniers en fçavent bien faire l'employ.

CHAPITRE VIII.:

De la maniere d'élever des Pigeons de Voliere, & de plufieurs: abus là deffus de la plupart de ceux qui en nourriffent.

LES

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Es Pigeons de Voliere font plus communs que jamais, & font même: une partie des plaifirs de bien des gens de diftinction; c'est auffi un bel Oifeau, tres-agreable à la vûë. Il y en a de plufieurs efpeces, les: uns à la verité plus rares que les autres, mais toutes fort fingulieres & degrand profit.

Nous avons les Mondains, les Poulonois, les Suiffes, les Bedorez, les Pigeons heurtez, à queuë de Paon, les Nonets, & d'autres groffes gorges,, qu'on eftime beaucoup.

Les Mondains font ceux qui apportent le plus de profit, & qu'on doit nourrir en plus grande abondance; il les faut choifir beaux & forts, ayant le vol rude; ce qu'on éprouve en leur étendant les aîles; car s'ils font foibles, c'eft figne qu'ils font mal conditionnez d'ailleurs, & qu'ils font peu féconds; ils doivent avoir l'œil éveillé, plein de feu, & le port fier à l'égard des mâles, le corps en bon point; car quand ils font maigres, il eft dangereux que cela ne leur vienne de quelque infirmité qu'ils ont foufferte & qui pourroit être préjudiciable à leur fecondité. A l'égard du plumage,, cela dépend de la fantaisie.

Les Pigeons de Voliere font bien plus gros que les Fuyards, & rendent bien plus de Pigeonneaux à leur Maître : il n'y a prefque point de mois dans l'année où ils ne couvent; il eft vray auffi qu'ils coutent plus à nourrir, mais à bien compenfer le tout, le profit, quand on entend bien à les gouverner, furpaffe toujours la dépenfe; un peu de pratique aprés ces Oifeaux nous rend fort fçavans là deffus.

Le premier foin qu'il faut avoir, c'eft de leur chercher une demeure qu'on appellera alors la Voliere, fi mieux l'on n'aime leur en faire conftruire une exprés, comme font bien des gens curieux de ces Oifeaux, & qui ont le moyen de fe donner cette fatisfaction entiere. Cette Voliere s'appelle Fuye en quelques endroits, ou Pigeonniere,les goûts là deffus font diffe-rens. Quant à leur conftruction, il y a des Volieres plus magnifiques l'une que l'autre ; on en voit ou rien ne manque, jufqu'à des jets d'eau, des pots pourris de fenteur, & des boulins faits des plus artiftement, belles tremies de nouvelle invention pour y mettre la Vefce, & la faire couler à mefure

que les Pigeons la mangent; & malgré toute cette dépenfe, il faut qu'il y ait encore des gens qui veulent cenfurer une partie de tous ces meubles. On trouve à redire que les boulins font trop petits, lorfqu'ils ont quatorze pouces de haut, que le mâle ne pourra s'y accoupler avec la femelle: Abus, d'autres, qu'ils font trop grands, que cela donne occafion aux autres Pigeons que ceux qui font en poffeffion d'un boulin, d'y venir troubler les Couveufes; qu'il faut empêcher que les Pigeons ne fe baignent pendant leur incubation, parce, difent-ils, que lorfque les femelles retournent fur leurs œufs toutes mouillées, elles les morfondent, & l'on n'entend que mille pauvretez de cette forte. Ce font des efprits qui veulent réformer la nature, tandis qu'on auroit befoin de les reformer eux-mêmes, qui veulent philofopher fur des fecrets qui furpaffent de beaucoup leur intelligence, & qui s'imaginent fçavoir à fond le génie d'un Pigeon, lorfqu'ils n'ont qu'une foible teinture de ce qui leur faute aux yeux; & ce qui prouve le plus que tout ce qu'ils difent eft tres faux, c'eft que les Pigeons réüffiffent mieux dans ce qu'ils condamnent, que dans ce qu'ils font d'avis qu'on faffè.

Les terrines ordinaires, felon eux, ne valent rien pour fervir de nids aux couveuses, il en faut de plâtre, les premieres font trop froides › le bois eft trop chaud en Eté, il engendre de la Vermine, ainfi que les paniers d'ozier ; & cependant on voit tous les jours que mille & mille gens qui les employent à cet ufage s'en trouvent tres-bien: une belle Voliere bien bâtic aura encore quelque défaut, l'air y donnera trop, ou trop peu, les jours en feront mal expofez, les Pigeons auront trop chaud ou trop froid: ces inconveniens feront tort à leur fecondité. Lorfqu'on voit de ces Oifeaux profiter tres-bien dans des galetas tres-mal en ordre, & dans des cours à couvert feulement fous de fimples toîts, où l'on a conftruit quelques boulins, ou planté quelques paniers : Voilà la probabilité de ces beaux fentimens, & dans lefquels neanmoins bien des gens de poids donnent aveuglément.

II faut fuivre la feule nature à l'égard de ces Pigeons; Dieu qui agit toûjours par les voyes les plus fimples & les plus conftantes en formant les animaux, nous dit affez que nous devons nous y conformer; que c'est le plus fûr chemin, & il eft certain que les Pigeons ne font jamais mieux leur devoir que lorfqu'ils ne font point génez: il fuffit de leur donner ce qui leur eft neceffaire pour vivre, & de leur aider de ce qu'ils ne peuvent avoir fans nôtre fecours.

Avis fur

Il est bon neanmoins, quand on commence à peupler une Voliere, de faire accoupler à part les Pigeons qu'on y veut mettre, on eft sûr par là la maniere qu'il n'y a pas plus de femelles que de mâles, & que tout profite dans la de peupler Voliere; cela fe pratique dans un petit endroit où l'on en met quelques une Volicpaires pour les jetter aprés dans la demeure qu'on leur deftine, parceque quand il y a plus de mâles que de femelles ils fe battent à qui en aura; & fouvent ils détournent les couveufes de leur travail.

Il ne faut donc point fe mettre en peine où placer des Pigeons de Voliere, foit dans une Voliere faite exprés, un grenier ou autre endroit, pourvû qu'on leur y donne des commoditez pour couver, qu'on ne leur y laiffe

re.

point manquer de nourriture, & qu'on les y garantiffe de leurs ennemis ils feront toujours des merveilles.

Quand les lieux où l'on eft permettent que les Pigeons puiffent aller aux champs, ils n'en valent que mieux, & c'est beaucoup de nourriture Parad. vI. épargnée; & comme l'épargne, dit Ciceron, eft un grand revenu, les Pigeons ne peuvent qu'ils ne rendent ainfi du profit, fil'on eft obligé de les tenir enfermez, on ne les laiffe point manquer de grains, foit Vefce, Orge, Avoine ou criblûres de bled.

C. 3.

Differentes

Tremies.

Les Tremies font fort commodes pour que la nourriture de ces Pigeons fortes de foit toûjours nette, & qu'ils ne la gâtent pas avec leur fiente. Il y en a de pyramidales & de longues : on met le grain dedans, on la couvre, & à méfure que les Pigeons viennent le manger fur une efpece de table bordée qui le reçoit, ce grain y coule toûjours jufqu'à ce que la Tremie foit vuide, & de cette maniere on peut donner pour long-temps de la nour riture aux Pigeons.

Figure d'une Tremie.

UN peu de chenevy de temps en temps eft tres falutaire aux Pigeons de Voliere; principalement en Hyvér, car comme ils pondent prefque tous les mois, ce grain, qui les échauffe, y contribue beaucoup, & les excite à couver pendant le froid. Quelques-uns défendent qu'on ne donne de l'avoine aux Pigeons pendant qu'ils ont des petits, difant pour raifon que ce grain, qui fe termine en pointe eft dangereux de percer le jabot des Pigeonneaux, aprés que leur mere leu a donné à manger, ce qui eft faux, & il ne faut que l'experimenter pour fe défabufer de cette chimere. Les Pigcons

geons de Voliere qui vont aux champs, qui mangent dans les Baffecours, toutes fortes de grains, & qui en nourriffent leurs petits ; ces petits en meurent-ils ? & pourquoy voudroit-on qu'ils fuffent plus délicats que les Pigeonneaux de Colombier, qui durant les femailles du Printems font repus d'avoine indifferemment comme d'autres grains.

Dans les Volieres où les Pigeons font toûjours renfermez, il faut avoir foin de mettre de la paille, afin que ces Oifeaux n'en manquent point pour construire leurs nids: cette paille fe met pour plus de propreté dans les coins de cette Voliere, qui fera fouvent balayée, pour en ôter la grande quantité de fiente que les Pigeons y font; cela empêche que ce lieu n'exhale une odeur trop forte, & qui pour l'ordinaire est tres-mauvaise, & que la vermine ne s'y engendre.

Les nids des Pigeons, de quelques matieres qu'ils foient, feront tresfoigneufement nettoyez aprés l'incubation de chaque Pigeon, pour la même raifon qu'on vient de dire; car, fans ce foin, les puces s'y mettent, fur tout durant l'Eté, & cette vermine incommode tellement les couveufes, qu'elles en deviennent maigres & fi ennuyées qu'elles ne couvent fouvent leurs œufs qu'inparfaitement.

Les Pigeons de Voliere ne doivent point manquer d'eau, qu'on doit leur renouveller fouvent, crainte qu'elle ne fe corrompe; on la met ordinairement dans de grands baquets, dont les bords font élevez de quatre doigts, ou bien dans d'autres vaiffeaux propres pour cela, fans fe mettre en peine fi ces Pigeons iront s'y baigner ou non, ils fçavent mieux ce qui leur faut que nous-même. Il y a des gens riches qui font faire, comme on a dit, de petits jets d'eau dans leur Voliere, cela eft fort agreable, & les Pigeons mêmes aiment beaucoup ce bruit.

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Comme on ne peuple pas tout d'un coup une Voliere, il faut laiffer aller la volée du mois de Mars, & fi elle ne fuffit pas, pour remplir le nombre de Pigeons qu'on fouhaite avoir, on ne touchera point à celle des deux mois qui fuivent, les Pigeonneaux du Printemps fe fortifient aflez · pendant l'Hyver pour pouvoir pondre d'affez bonne heure.

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Qu'on fe garde bien pour peupler tout d'un coup une Voliere, d'ache- Avertiffe-ter de ces Pigeons, dont bien des gens à Paris font un maquignonage; pour ment. un qui fera fidele, il y en aura trente qui fe feront un plaifir de tromper. Il faut d'abord regarder où l'on jette fon coup, & tâcher d'avoir quelqu'un qui fe connoiffe en Pigeons, fi l'on ne s'y connoît pas foy-même, qui paffe pour honnête homme, & qui veuille bien vous aider là-deffus de fes avis,& ne prendre de ces Oifeaux feulement qu'un nombre raifonnable pour vous en fournir dans la fuite, & par ce moyen vôtre Voliere vous profitera..

CHAPITRE IX..

Des Tourterelles & des Cailles, comment les engraiffer.

Omme on fe plaît à la campagne à donner la chaffe aux Oifeaux, à leur tendre des pieges, foit pour les élever en cage pour le plaifir

Co

V

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