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bois à bois perdu, cela facilite beaucoup le commerce qu'on peut faire de tout ce qui croît à la Campagne.

Pour ce qui regarde l'affiette, & l'enceinte de cette Maifon, il fera bon de la placer en un lieu plein, ferme, & uni, & où l'on puiffe facilement fouiller les fondations, parce que lorsqu'ils et montueux, il en coûte trop pour en applanir la fuperficie, fur tout lorfqu'il y a bien des appartenances qui demandent un juste niveau.

Les mi-côtes ont quelque chofe d'avantageux pour l'affiette d'un bâtiment champêtre, elles ne font point fujettes aux grandes affluences d'eau, ni à cet air épais qu'exhale ordinairement un marécage. On prendra garde encore quand on affcoit ce bâtiment, de ne luy point donner une vue eftropiće, & bornée par quelque objet défagreable, mais raifonnablement étenduë, & où l'œil fe promene avec plaifir

Cato.l. 3.

Il y en a, quand ils conftruifent une Maifon de cette forte, qui choififfent toujours l'endroit pour ainfi dire, le plus fterile du Terroir, par ce,ajoûtent-t'ils, qu'il n'eft pas neceffaire d'employer une bonne terre pour y bâtir, outre que les dépendances étant prés du logis, on peut aifément les amelicrer par le moyen des fumiers; mais cette maxime trouve des fentimens oppofez, à caufe des Jardins qui doivent ncceffàirement accompagner cette maifon, & d'où l'on pretend, quand on veut en faire la dépence, tirer également du profit & du plaifir.

L'affiette en fera encore agreable, fi elle eft en un lieu fec, pour la commodité des promenades & des avenues, fi elle eft un peu élevée, & comme on a déja dit, bornée de Montagnes d'un côté, à deux ou trois lieues de diftance, ou d'autres où l'oeil s'aille perdre agreablement, & lorfque fon payfage eft diverfifié par des Plaines, Collines, Forefts, Rivieres, Prairies, Ferres labourables, Vignes, Villes, Villages, & Hameaux, tout cela ne fait qu'augmenter la beauté de fa fituation.

Autrefois on affectoit d'affeoir les Châteaux dans des fonds, & de les ifoler de grands & larges Foffez à fond de cuve, qui étoient la plupart rem¬ plis d'eau par le confluent de quelques ruiffeaux qui venoient s'y decharger; mais comme une veuë agreable, & éloignée, & un air falubre eft proferable, à une autre où l'on n'auroit pour aspect que quelque bois, qui feroit un caffe nez, ou des brouillards à refpirer, on s'eft petit à petit deffait de cette fantaifie, & l'on a raifon.

Ce n'est pas que fouvent on eft bien empéché d'affeoir une Maifon de Campagne comme on voudroit, foit par rapport aux lieux qui font mal dispofez, foit à l'air qui n'a pas toute la falubrité poffible; mais comme pour de bonnes raifons on eft fouvent contraint de s'affervir à ces fortes d'endroits, on fait alors tout ce qu'on peut de mieux, pour corriger ces deffauts.

On fçaura pour maxime qu'on doit toujours proportionner la maifon à la quantité de terres qui en dépendent, un grand Domaine demande un p'us grand bâtiment, qu'un autre qui eft mediocre, parce que le revenu en eft plus confiderable; mais commencez toujours à bâtir par la Cuifine, dit un Ancien, c'est-à-dire, faites d'abord attention à ce que vous avez de bien, & bornezSeevala, & vous-y pour bâtir, n'allez pas, ainfi que ces deux Romains, tomber en cela Lucius Lu- dans deux extremitez, de conftruire trop de Bâtimens, ou d'en élever

C. 2.

Quint.

cullus.

trop peu, l'une & l'autre conduite, eft incommode & préjudiciable au mé

nage.

Il faut donc quand on veut bâtir, rapporter tout à fes forces, & pour ce qui regarde l'ordonnance de la Maifon cela eft libre, & dépend de la fantaifie; les uns la fouhaitent tournée de telle maniere, & les autres de l'autre: celuy-ci y cherche de l'ornement, celuy-là n'y demande que de la fimplicité; mais parmi tout cela on recommande toûjours qu'il y ait un goût qui plaife & une fymetrie qui frappe agreablement : il n'y a rien de fi aisé que de prendre les commoditez d'un Bâtiment, mais de les difpofer commodement & avec fymetrie, c'eft où paroît l'industrie, l'efprit & l'honneur de l'Architecte, & en quoy celuy qui fait bâtir, doit s'entendre en quelque façon.

Confiderations qu'on doit avoir avant que de commencer à bâtir.

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I de dire, fur dette d'une Maifon de Campagne, il faut être un peu verL ne fuffit pas d'avoir la connoiffance, & d'entendre tout ce qu'on vient sé en cet Art; il faut fe plaire à l'Architecture, & quoyqu'on ne foit pas Architecte, s'étudier à ce qui concerne les Bâtimens. L'étude en eft noble, & convient à tout ce qu'il y a de gens du premier rang.

Celuy qui veut bâtir, doit reflechir long-temps fur ce qu'il entreprend, avant, comme on dit, de faire mettre les marteaux en ceuvre; fa prudence veut qu'il fe confulte plus d'une fois, qu'il voïe fes amis fur fon projet, & le communique à des perfonnes entendues aux bâtimens, & qui luy difent leurs pensées fans déguifement. C'eft ainfi qu'on commence à aller de pied ferme dans ces fortes d'entreprifes, au lieu, que lorfque de fon pur mouvement, & fans avoir la moindre teinture de l'Art de bâtir, on veut s'y fourrer pour foy: on a tout le loifir aprés de s'en repentir ; mais c'est trop tard.

Quand on fçait un peu raifonner Architecture, un Architecte ne vous en fait pas tant accroire là-deffus, & les ouvriers vous trompent moins, ils vous écoutent avec plus de circonfpection, & travaillent plus fidellement; cette connoiffance outre cela empêche qu'on ne bâtifle, puis qu'on n'abatte, manque d'avoir bien pris d'abord fes mefures, ou par la faute de l'Architecte, qui aura ordonné fans réflexion, & tout cela coûte de grandes dépenses à un Particulier qui fait bâtir, s'il n'y prend garde.

Outre les confiderations dont on vient de parler, on fera encore attention aux Ordonnances, Statuts, & Coûtumes des lieux où l'on bâtit ; c'eft une réflexion tres-importante, non feulement pour un Architecte, mais encore bien plus pour un Particulier qui veut fe jetter dans les Bâtimens: c'est luy qui en fouffre le premier, au lieu que fouvent l'ouvrier en lave ses mains, & prend toûjours à bon compte l'argent du Bourgeois.

Celuy qui conduit un bâtiment, dit Vitruve, ou celuy qui le fait conftruire à fes dépens, doit fçavoir ce que les loix ordonnent là-deffus, ou s'en faire inftruire avec foin; fans cette précaution on eft quelquefois obligé à en venir à de grandes difcuffions avec fes voifins.

1. I.

Vitruve

Qu'il eft bon de fçavoir à peu près à quoy peut revenir un Bâtiment pour ne point être trompé dans fon entreprise.

A

Prés avoir fait un ferieux examen fur tout ce qui vient d'être dit, les particuliers qui veulent faire bâtir, doivent, outre cela, avant que de l'entreprendre, confiderer mûrement à quelle dépenfe leur projet les peut conduire; car de s'y aller jetter inconfiderément, & fans confulter fes revenus, c'est vouloir s'abîmer dans les fondemens de l'édifice, pour ne s'en pouvoir aprés quelquefois retirer.

Le moyen donc de connoître à peu prés, à combien reviendra le bâtiment qu'on projette, on entrera d'abord en connoiffance du prix des fouilles, vuidanges, & tranfport des terres des fondations, de la pierre de Moëllon, & de Taille, de la Chaux, du Sable, du gros & menu Pavé, des Carreaux, Tuîles & Ardoises, de la Latte, de la Contrelatte, du Cloud, du Verre, du Plomb, du Fer, du Bois, tant de Charpente que de Ménuiferie, de la Peinture de chaque travée, de celle des portes & croifées, de la Toife des Materiaux mis en œuvre, & du Toifé même. On acquiert cette connoiffance-cy, par le fecours de l'Arithmetique, qu'on ne fçauroit trop recommander à une perfonne qui veut s'établir à la Campagne, pour y faire fon profit.

Et comme les prix de toutes ces chofes varient felon les differens pays, & le changement des temps, il faut, pour bien faire s'y regler, s'étant étudié attentivement à se faire un Devis de tout ce qui peut entrer dans le bâtiment qu'on projette, on calcule le tout, & l'on voit par-là à peu prés à combien la dépenfe peut monter.

Il eft bon en paffant de remarquer ce que voici. L'eftimation que l'on peut faire en gros des parties du Bâtiment fe peut concevoir en cette inaniere, la moitié du prix paffe pour la dépenfe de la Maçonnerie, le quart ou peu s'en faut pour la Charpente, & le reste de la fomme pour toutes les> autres dépenfes, fçavoir la Couverture, Menuiferie, Serrurerie, Peinture, s'il y en à, Vitres, Pavé, & le refte.

Telles font les idées qu'on peut prendre d'abord, pour fe faire en quelque façon un plan de la dépenfe qu'on eftimera à peu près devoir être faite pour la conftruction de la Maifon qu'on fouhaitte faire bâtir; fi le calcul, comme il eft vray, n'eft pas tout à fait jufte, on peut dire du moins que c'est un grand obftacle aux Entrepreneurs, ou Ouvriers, pour empêcher qu'ils ne trompent de beaucoup les particuliers qui les employent ; cette connoiffance qu'ils remarquent, les tient en refpect, & les obligent à ne deman der qu'un prix raifonnable pour fe récompenfer de leurs peines.

CHAPITRE

CHAPITRE IV.

Prix de la vuidange des Terres maffives, des tranchées & rigoles faites pour les fondations, & de ce que coûte la Pierre de taille, le Moëllon, le Plâtre, la Chaux, le Sable & les autres Materiaux neceffaires à un Bâtiment, avec quelques remarques fur ce qu'il en faut pour faire une toife de Mur.

Out ce qu'on a dit jusqu'icy feroit comme inutile, fi l'on ne fçavoit les prix de tout ce qui peut entrer dans un Bâtiment, pour en faire un calcul à peu prés de la dépenfe à laquelle il reviendra. Commençons par les fouilles des terres, & l'on fera averti que fous le nom de Bâtiment on comprend les Jardins dépendans de la Maifon.

Fouilles des Terres.

Les foüilles, vuidanges & tranfports des Terres maffives, & rigollès qu'on fait pour les fondations, font plus ou moins cheres, felon qu'elles font plus ou moins profondes, ou qu'on les tranfporte plus ou moins loin.

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Quand il ne faut jetter la terre que fur le bord des tranchées, la toile cube coûte ordinairement vingt à vingt-cinq fols, cela fe regle felon leur profondeur; mais s'il y a du tranfport qui foit éloigné, comme par exemple, à vingt ou vingt-cinq Toifes, elle vaut à Paris & aux environs trente à trentecinq fols, & quelquefois quarante fols, fi les fondemens font profonds; ainfi on peut juger du reste à proportion de l'éloignement, & felon que le terrain eft plus ou moins uni

Quand ce ne font que des fouilles de jardin pour en ameliorer la terre, & où il n'y a qu'à la jetter devant foy, il faut fçavoir d'abord à combien de profondeur on veut la foüiller, & felon que le terroir eft plus ou moins difficile à manier; on ne fait guéres fouiller alors à moins d'un pied & demi, & en ce cas on donne aux environs de Paris, & à Paris trois ou quatre fols de la Toife courante avec un Labour dans le fond.

Si c'est à deux pieds, cinq fols, à deux pieds & demi ou trois pieds, fix fols, on peut aller jufqu'à fept: mais il faut que le terrain soit bien rude. On ne fouille gueres plus avant pour des Jardins, & s'il y en a qui veu- lent le faire, c'eft une dépenfe fuperfluë.

On ne doute pas que dans les Provinces, ces fortes d'Ouvrages ne fe faffent à meilleur marché, c'eft pourquoy on en peut regler les prix à proportion de ceux dont on vient de parler.

Il faut encore remarquer, géneralement parlant, que tous ces prix augmentent ou diminüent, felon que le pain eft plus ou moins cher, parce que comme cet aliment eft un des principaux fondemens de la vie, & qu'on ne peut s'en paffer, cela fait que forfqu'il eft cher, il faut plus d'argent pour en achetter, & par confequent il faut gagner davantage.

Si l'on veut quelquefois mettre à uni un terrain à un fer de Befche feulement, on donnera un fol de la Toife courante, fi la terre n'est pas

C

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bien rude, aulieu que fi elle fe manie difficilement, on en donnera un fol fix deniers.

Prix du Moëllon.

Uant au Moëllon, la Toife cube prife fur le bord de la Carriere, aux

Qenvirous de Paris, coûte fix ou fept livres, felon qu'il eft bon, & quand

il faut le charrier, & rendre en place, dix, douze, & quatorze livres, fuivant qu'on eft prés ou loin de là Carriere.

Il y a des endroits en Province où la Toife cube de Moëllon, ne revient qu'à trois ou quatre livres prife fur la Carriere : il ne reste plus aprés cela que le charroy qui coûte plus ou moins, felon les lieux, de forte qu'il y en a où il ne revient qu'à fix livres la Toife rendue, d'autre à huit ou à dix, & felon que le Moëllon est estimé.

Prix de la Pierre de Taille.

I
A Pierre de Taille aux environs de Paris vaut cent fols le charriot, qui
contient deux Voyes, quelquefois fix jufqu'à fept livres, fuivant la diftan-
ce des lieux. Il doit y avoir cinq Carreaux & quinze Pieds de Pierre ou en-
viron à la Voye. Quand le chemin eft mauvais, il faut trois Chevaux pour tirer
une voye, au lieu que deux fuffifent quand il eft beau.

La Pierre de S. Leu, & de Vertgelé, fe vendent au Tonneau; il contient quatorze pieds de pierre cube, & revient à trois livres, quelquefois à quatre ou quatre livres dix fols, même fur le Port, quand la Riviere n'eft pas navigable: outre cela on donne ordinairement pour voiture du tonneau vingt-cinq & trente fols, & une voiture méne depuis quatorze jusqu'à vingt-deux pieds de pierre cube.

Les Pierres de Tailles fe prifent & s'achetent encore au pied, felon l'échantillon; car fi ce font par exemple, quartiers de trois fur trois en quarré, ou s'ils font oblongs, ayant neanmoins les angles quarrez, ils en font plus chers fi bien qu'alors le pied de Cliquart & de Liais fe vendent feize à dix-huit fols: quand il eft propre à faire Platte-bandes ou Jambages de Cheminées, il coûte vingt fols; fi l'on en peut faire des Corniches, il s'achete depuis trente jufqu'à cinquante fols.

Si les quartiers de Liais font cornus & de tout appareil, & qu'on en prene une bonne quantité, le Pied peut ne revenir qu'à dix ou douze fols; fi l'on n'en prend que peu, il vaut quelquefois quatorze ou quinze fols.

Le haut Liais & le rette des autres Pierres qui fe tirent aux environs de Paris, quand elles font de grand appareil, ne fe vendent qu'environ douze fols le pied, il y en a à present de cet échantillon qui vaut vingt fols le pied; on peut neanmoins marchander entre l'un & l'autre de ces prix, afin de tirer le meilleur marché qu'on pourra; mais fi ces Pierres font de tout appareil, le pied ne vaut que huit ou dix fols.

Il y a du Franc-Liais, & du Liais Farault, de celuy-cy on fait les Fours, les Atres, lés Fourneaux, parce qu'il réfifte au feu; on appelle Cliquart, le Liais de tout appareil, du haut Liais, du bon Banc.

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