Imágenes de páginas
PDF
EPUB

avoir la tranche bien unic & la couleur jaunâtre; la pâte en doit être fayourcufe, bien nette de vers & d'autres vermines qui les gâtent.

Marques de la bonté

La plupart des fromages qui fe façonnent à la campagne fe mangent d'un frotout recemm.nt tirez des écliffes, c'eft un aliment qui tient en partie licu, mage. de nourriture aux gens de Village, l'on en fert auffi fur les bonnes ta bles; il eft vray qu'ils font faits differeniment des premiers; & voicy com- mous. ment fe pratique l'une & l'autre maniere,

Nous avons déja dit qu'on mettoit cailler le lait, & comment cela fe faifoit; ce lait eft pris tout écrémé, & le fromage façonné comme on l'ai dit fans autre myftere, puis fervi quand il eft formé, & qu'il s'eft un peu déchargé de fon petit lait; ce font là les fromages ordinaires, & les plus communs, parce qu'on en fait de plus délicats de la maniere qui fuit.

Fromages

manger

&

ires-deli

Prenez deux pintes de bon lait, autant de créme douce, mettez-les en, Fromage prefure, ayez une écliffe qui foit haute, garnie dans le fond d'un linge plomprá bien blanc, & aprés que vôtre créme & vôtre lait feront coagulez, mettez les dans votre écliffe avec la cuilliere, laiffez égouter vôtre fromage cat. vingt-quatre heures, enfuite renverfez-le fur une affiete, ôtez le linge & fervez ce fromage fi yous voulez,

D'autres fe contentent de prendre du lait encore tout chaudement fortir Aatte du pis de la Vache, de le mettre ainfi en prefure, & d'en faire des fromages de la maniere qu'il a été enfeigné : ces fromages font excellens pour etre mangez promptement; on déguife encore le lait de plufieurs autres façons, mais nous réfervons à parler de ces mets dans l'Office du reffort de laquelle dépend leur affaifonnement.

d's Bicf

Un Autcur ancien qui a écrit fur l'Agriculture, nous donne une maniere Fromage à de faire des fromages, qu'on pratique dans la Breffe, d'où il étoit origi, la maniere naire. Il dit que pour faire de bons fromages, il ne faut pas en trop écré- fans. mer le lait, & que même quand le lait y refteroit tout ils n'en vaudroient que mieux, co pratiquant ce qu'il enfeigne de faire, quand on Belle-Fo-fait ces fromages, ce que nous dirons. Voici la méthode qu'on y cbferve rê.11. Jour dans la Breffe. !

On prend du lait ce qu'on fouhaite, c'eft à dire, dix ou douze pintes plus ou moins, il faut qu'il foit bon, on le met dans une chaudiere aprés l'avoir coulé, puis fur le feu, où on le laiffe échauffer, jufqu'à ce qu'on y puiffe feulement fouffrir le bras nud. On y méle une once de bon fromage bien delayé dans de l'eau, il faut en avoir plein un plat moyen, & pour donner couleur au fromage qu'on fait, on y ajoûte un peu de faffran, qu'on délaye dedans,

[ocr errors]

Cela fait, & lorfque le fromage eft tout caillé dans la chaudiere, on prend un bâton rond, & fort net avec lequel on rompt tout le fromage, en le remuant, afin que ce qu'il contient de plus gras aille au fond de la chaudiere.

Enfuite celui ou celle qui fait ce fromage ayant les bras retrouffez & bien propres, paîtrit cette maffe, & la tourne & retourne, jusqu'à ce qu'il remarque qu'elle ait cuit également par tout, & qu'elle foit un peu ferme; elle eft ordinairement de forme ronde, à caufe de la chaudiere qui la lui fait acquerir, cleft pour lors que tirant ce fromage hors de cette

d'Ag

[ocr errors]

chaudiere, il les met fur un linge blanc, & par deffus quelque chofe de pefant pour luy faire rendre tout ce qu'il peut y avoir d'humeur fuperfluë.

Ce fromage étant égoûté, on le couvre d'un ais rond fur lequel on met quelque pierre pour le tenir preffé, on laiffe ainfi ce fromage pendant cinq ou fix heures, & aprés qu'il eft comme fec, on le porte à la cave & dans un endroit deftiné pour cela. Ce font pour l'ordinaire des planches qu'on met fur des échelles en maniere de tablettes. Il faut remuer tous les jours les fromages qui y font jufqu'au cinquième jour qu'ils forment par deffus comme une efpece de farine, & pour lors on les poudre par deffus d'un peu de fel menu, & le lendemain on les tourne de l'autre côté pour en faire la même chose.

Trois jours aprés on ôte le linge dans lequel ils étoient enveloppez; on nettoye les fromages, & on les laiffe ainfi jufqu'au lendemain matin, afin qu'ils fe deffechent, puis on les enveloppe dans le méme linge où ils étoient auparavant, obfervant de les faler davantage qu'ils n'ont été du côté qu'on les a falez pour la premiere fois, & de mettre les derniers fromages qu'on a fait fous les premiers; on en mét quatre ou cinq fur un,& fur lefquels on répand du fel menu; un jour aprés on les nettoye, puis on les fale le lendemain enveloppez qu'ils font de linge, on les entafle l'un fur l'autre jufqu'à cinq ou fix; il faut le troifiéme jour les faler encore aprés les avoir nettoyez, on les enveloppe encore aprés cela, & on continue cette manoeuvre pendant vingt-cinq ou trente jours qu'on trouve ces fromages durcis mollement..

Les fromages qu'on fait ainfi font plus ou moins fufceptibles de fel qu'ils ont été plus ou moins cuits. Il faut en cela un jufte degré de cuiffon, qu'on ne peut fçavoir que par la pratique, & qui n'eft pas bien difficile à apprendre. Les faifons differentes reglent auffi cette fufception plus ou moins grande de fel, donc on foufpoudre ces fromages, & principalement à l'égard de ceux qui font faits en Septembre, lefquels veulent peu de fel à la fois; encore faut-il qu'il foit fort menu, autrement ces fromages s'endurciffent de telle forte que leur fuperficie fait une croûte Gi dure qu'elle ne peut recevoir la moitié du fel qui y eft neceffaire.

[ocr errors]

Quand ces fromages font bien falez, ce qui fe remarque quand ils n'en prennent plus; on les tourne & retourne tous les jours pendant cinq ou fix jours jufqu'à ce qu'ils foient bien fecs, puis on les nettoye de tous côtez & tout au tour avec le dos d'un couteau on les met enfuite dans un autre endroit comme dans une chambre, & fur des planches bien propres, on les y laiffe durant quinze ou vingt jours, obfervant de les nettoyer avec le couteau toutes les fois qu'on les remue, tenant toûjours les planches bien nettes; ce qui doit fe pratiquer pendant fept ou huit mois.

Si l'on remarque au fromage quelques fentes, ou des vers qui les rongent, il n'y a point d'autre remede que de manger ces fromages, ou de les vendre ou bien on ôte cette vermine, & on frotte les crevaffes d'huile de lin, cela les conferve tres-bien & long-temps. Quel ques-uns fe fervent d'huile d'olive pour le même effet: on employe auffi pour cela la lie d'huile de lin & le marc; enfin un an aprés que ces fromages font faits, il faut les vendre, & jufqu'à ce qu'ils foient vendus, les tourner fans def

fus deffous, les balayer & les nettoyer; il faut à l'égard des planches en faire la méme chofe.

conferver

Aprés que les fromages font faits, il eft bon de les fçavoir conferver; Secret pour car enfin on ne les fait pas en vûë de les manger auffi-tôt & de les ven- long-temps dre, il eft un temps propre pour cela, afin d'en tirer un bon profit ; & les fromavoicy là deffus quelques fecrets.

Les uns mettent ces fromages dans de grands tas de millet, ou pour le mieux dans de la graine de lin, ces femences les entretiennent frais pendant les grandes chaleurs, & fçavent les garantir des gelées; ce qui contribue beaucoup à les affiner ; d'autres les mettent dans des chambres, dont ils ferment toutes les fenêtres, & dans lesquelles ils font du feu; il eft vray que cela les feche promptement, inais auffi cette méthode eft fujette à les faire aigrir ; & pour les vouloir trop avancer, on en diminue la qualité & le prix.

Les fromages qu'on fait mêlez de lait de Brebis & de Vaches font meilleurs que ceux qui font faits avec le dernier fimplement; au lieu de lait de Brebis il y en a qui fe fervent de celuy de Chévres, il en faut pour cela nourrir de grands troupeaux; nous dirons à l'article de la Chévre en quel païs cela fe pratique.

Il n'y a rien de tout ce qu'on vient de dire des fromages qui ne fe puiffe faire ailleurs que dans la Breffe, & on n'écrit icy des diverfes manieres d'agir en fait d'Agriculture de bien des païs differens, qu'afin que d'autres tâchent d'en profiter à leur avantage, & c'est le but qu'on fe doit former en faifant des ouvrages de la nature dont eft celuy-cy.

Pour reprendre par ordre les matieres dont nous avons parlé dans ce Chapitre, & dire les bons & les mauvais effets qu'ils produifent tant en aliment qu'en Medecine, nous commencerons par le lait qui eft fort en ufage.

ges.

Varron prétend que de tous les alimens dont nous nous fervons, le lait Effets du eft le plus nourriffant. D'autres Auteurs veulent auffi qu'il foit le meilleur lait. & le plus falutaire, ce qui n'eft point difficile à croire, puifqu'il y a des païs où les peuples ne fe nourriffent prefque que de laitage, & vivent treslong-temps. On en voit la preuve dans quelques endroits des païs Septentrionaux, où il fe trouve plufieurs perfonnes qui ne mangent toute leur vie que du pain, du beurre & du fromage. Beaucoup de païfans dans la Hollande Septentrionale, & dans la plus grande partie de la Frife, fe contentent de boire du petit lait pour boiffon, & fe portent à merveille. Quand le lait eft bon, il fe digere aifément; il eft beaucoup nourriffant, augmente l'humeur feminale; il eft fpecifique pour rétablir les fonnes maigres & attenuées, il appaifé les ardeurs de l'urine, & les douleurs de la goute, il adoucit les âcretez de la poitrine, on s'en fert dans les diffenteries & dans les diarrhées caufées par des humeurs âcres & picotantes.

per

Quelquefois auffi il incommode l'eftomac quand on l'a foible, ou qu'on en prend plus que de raifon, le lait de Vache et plus ou moins falutaire; fuivant les faifons differentes; dans le Printemps & dans l'Eté il est plus fereux, moins épais & plus aisé à digerer qu'en aucun autre temps.

Lait caillé. Les effets.

Petit lait, fes effets. Beurre.

Ses effets

Lait de

effets.

Fromages, leurs effets.

Le lait caillé est un peu de difficile digeftion, & produit des humeurs groffiers. Un Auteur ancien prétend qu'il nourrit beaucoup. Le petit lait eft fort rafraîchiffant & humecte confiderablement les parties.

On fe fert de Beurre par tout en cuifine. C'est ce qui fait la bafe de la plupart des fauces dont les ragouts font compofez. Plus le beurre eft nouveau, plus il eft agreable & falutaire; quand il eft vicux, il eft fujet à fentir le rance, il devient huileux & défagréable..

Le beurre nourrit beaucoup, il eft bon pour la poitrine, il lâche le ventre, il réfout les humeurs, il fe digere aifément, & on l'employe pour appaifer les douleurs & les inflammations, étant appliqué exterieurement. On s'en fert dans les lavemens pour la diffenterie. Le trop grand ufage du beurre affoiblit l'eftomac & caufe quelquefois des envies de vomir, il échauffe, ce qui fait que les perfonnes d'un temperamment bilieux ne s'accommodent point de cet aliment.

Le lait de beurre qui eft celui qui refte dans la barate aprés qu'on a beurre, fs batu le beurre, & qu'en certains endroits on appelle Batis, cft une liqueur qui rafraîchit beaucoup, & qui humecte confiderablement les parties. Comme les fromages font la partie du lait la plus grofficre & la plus compacte, ils font auffi des alimens qui nourriffent beaucoup, ils aident à la digeftion, quand ils font affinez; car lorfque le fromage cft nouvellement fait il fe digere difficilement, il pefe fur l'eftomac, il caufe des vents & des obstructions: quand au contraire il eft trop vieux il échauffe beaucoup, il produit un mauvais fuc & refferre le ventre, de maniere que pour en attendre de bons effets, il faut qu'il ne foit ni trop vieux ni trop nouveau. Au refte on croit que la plupart de tous ces effets,bons ou mauvais, dépendent autant de la bonne ou mauvaise conftitution de ceux qui mangent du fromage, que des proprietez qu'il peut con

Aage des
Chèvres.

tenir.

Com

[blocks in formation]

Omme les Boucs & les Chévres portent des cornes, on a crû les devoir placer ici pour ne point déranger l'ordre qu'on s'eft prescrit, de vouloir traiter de fuite des bêtes à cornes; ces animaux font de grand profit, principalement dans les lieux où on en nourrit beaucoup ; leur chair, leur lait, leurs peaux font des marchandifes dont on fait de l'argent.

Les grands pâturages ne font point les lieux où les Chévres fe plaifent le plus, pourvu qu'elles trouvent des halliers, des buiffons & desronces, elles font contentes. Elles aiment les pays montagneux, & il y a de cer taines contrées où on les voit toûjours grimpées fur des rochers. La Chévre vit ordinairement huit ans...

DA

Quel doit être le Chèvrier, fes foins pour fon troupeau.

Ans les lieux où l'on en nourrit à troupeaux, on prend des Pastres pour les conduire, qu'on appelle Chévriers. Il faut que celuy qui conduit les Chévres foit agile pour les fuivre fur les montagnes où elles montent, robuste pour marcher toujours dans les brouffailles & parmi les ronces; cinquanté Chévres lui fuffifent à conduire, parce que ce bétail s'écarte beaucoup, n'étant point obéïffant ni à la voix de l'homme, ni au mouvement des chiens; il obfervera de ne les point laiffer paître dans des lieux marécageux, car le marécage leur eft contraire.

Il menera paître fon troupeau dés la pointe du jour, que les herbes & les feuilles des arbriffeaux qu'il broute, font encore toutes mouillées de la rofée, c'est ce qui leur fait avoir beaucoup de lait, & il ramenera ce troupeau fur les neuf heures du matin où il refte enfermé jufqu'à trois heures aprés midy, qu'il retourne au pâturage jufqu'à la nuit.

Ce Chévrier en Hyver ne menera les Chèvres aux champs qu'à neuf beures du matin jufqu'au foir, fans craindre que le froid ni le ferain les incommodent en aucune maniere, tant elles font d'un temperamment robufte; il n'y a que la nége & les frimats qui leur puiffent caufer quelque infirmité ; c'eft pourquoy on les tient enfermées à l'Etable pendant ces mauvais temps.

Il faut avoir foin tous les jours de tenir leur Etable nette, & prendre garde qu'il n'y croupiffe point d'eau, ou qu'il s'y amaffe de la fange, cela fuffit pour rendre les Chévres malades & les empêcher d'avoir du lait, qui eft le fruit principal qu'on en attend. Nous parlons ici pour les païs où les Chévres font en grand nombre; car dans ceux où l'on n'en eleve que tres-peu, il eft inutile d'avoir un Paftre exprés, on les méne aux champs, ou avec les Vaches ou avec les Brebis, elles y profitent & s'y portent à

merveille.

Il n'eft pas neceffaire de donner de la litiere à ces animaux, pourvû que de nuit ils foient à couvert des injures de l'air, c'eft affez, un plancher fouvent nettoyé, comme on a dit, leur convient tres bien.

Ce bétail vit de peu, & ne coûte gueres ; car fa nourriture la plus ordi- Nourriture naire eft les feuilles des ronces & de plufieurs autres arbriffeaux champê- des Chetres qu'il broute; le païs des Landes eft un veritable pâturage pour les Ché- vres. vres, & c'eft en quoy ces terres incultes rendent plus de revenu, n'étant prefque propres à nulle autre chose. On les nourrit pendant l'Hyver à l'Etable de petits rejettons d'herbes cueillis dés le mois de Septembre, fechez au foleil, & confervez foigneufement dans un grenier ou autre endroit à couvert de la pluye. Les feuilles de Noyer, de Vigne, de Fréne, de Meurier & de Châtaignier contribuent beaucoup à leur faire avoit du lait'; enfin il faut, comme on dit, que l'herbe foit bien courte avant que la Chèvre meure de faim.

L'Automne eft la faifon que les Chévres entrent en chaleur, c'eft à dire, Temps que depuis le mois de Septembre jufqu'à la Saint Martin, afin qu'elles mettent les Chebas leurs petits au Printemps où les arbres boutonnent, & que les bois vres font en

chaleur.

« AnteriorContinuar »