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peut y avoir recours, aprés avoir exactement obfervé les fymptômes qui les fuivent ordinairement.

CHAPITRE XXIII.

A quoy l'Ane est propre dans une Maison de Campagne.

Que

Uoique l'Ane femble être un animal qu'on méprise, cependant on peut dire qu'il eft fort neceffaire dans une maison de campagne; il y rend beaucoup de fervice en certaines chofes, aufquelles il faudroit employer d'autres bêtes de charges ou de tirage, qui feroient bien plus utiles

ailleurs.

L'Ane a fes commoditez particulieres, il fert à porter les danrées de la Baffe-cour au Marché, & le bled au Moulin, c'eft à quoy principa lement les Meufniers les employent, & il y a bien des pays où les Anes labourent la terre & tirent la Charrette.

Dans la Breffe les Bergers montent fur des Anes, quand ils vont gar derlcurs Troupeaux, trouvant cette monture fort commode, en ce que lorfqu'ils font defcendus de deffus, & qu'ils font dans les pâturages, ces animaux paiffent l'herbe avec les Moutons & les bêtes à cornes, fans les troubler; c'eft auffi fur ces Anes que ces Bergers mettent tout leur équipage.

Les Vachers ont des Anes plus grands que ceux des Bergers, parce qu'il faut qu'ils portent tous les utenciles dont ils ont befoin pour ramaffer le lait des Vaches qu'ils traïent dans les champs (c'eft la coûtume d'en agir ainfi dans le Païs Breffan.)

Combien voyons-nous de gens fur les grandes routes nourrir beaucoup d'Anes, pour les louer & fervir de voiture aux Voyageurs ; l'Ane n'eft pas fi fujet à tomber malade qu'un Cheval & qu'un Mulet, il eft d'un temperamment robuste; ainfi on voit parce qu'on vient dire, que l'Ane n'est pas un animal fi méprifable qu'on s'imagine. Il y a bien des endroits en Italie où l'on vend un Ane jufqu'à cinquante écus, & on dit qu'à Seville en Efpagne on les achette même davantage pour les envoyer au Perou, & dans le Mexique, où l'on s'en fert d'Etalons pour avoir des Mulets.

Et ce qu'il y a encore d'avantageux dans un Ane, c'eft qu'il ne coûte guerre à nourrir, que quelques chardons broutez çà & là par les champs, avec un peu d'herbe fait fa nourriture: on n'a pas besoin d'avoine pour

le maintenir.

Sa nourriture en Hyver eft de paille, ou d'un peu de foin qu'on luy donne de temps en temps pour le maintenir en bon corps.

Du choix d'un Ane & d'une Anesse.

Our choifir un bon Ane, il faut qu'il ait le poil grand, le poil doux, uni, & d'un gris brun, avec des manieres d'anneaux aux jarrets de

Na

Helmont.

méme poil, ayant une raye noirâtre qui regne depuis le mufeau tout le long du dos jufqu'à la queue: il eft bon qu'il foit ramaffé en fes membres, qu'il ait les jambes groffes, nerveufes & bas jointées, qu'il ait la corne du pied noire & dure, les cuiffes charnues, le ventre un peu long & non large, la croupe ronde, le dos uni & pendant des deux côtez, le devant large, ouvert & nerveux, le cou gros & fort, la tête petite, les oreilles alertes, les yeux gros, noirs & éveillez, les nafeaux larges & ouverts & les machoires grandes; il y en a qui prennent un Ane fauvage pour couvrir les Aneffes, on dit que les Anes qui en proviennent font forts & tres-actifs.

Pour l'Aneffe elle fera de même corpulence, ayant le ventre un peu plus ample, afin que l'Anon qu'elle produira en devienne plus beau.

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Du temps de faire couvrir les Aneffes.

A faifon de faire couvrir les Aneffes eft la même que celle qu'on choifit pour les Jumens, parce que le terme de leur portée est égal, & qu'ordinairement les Anons trouvent le lait de leurs meres plus fubitantiel quand elles paiffent les nouveaux herbages, que lorfqu'elles font nourries de vieux fourages.

L'Anon pour devenir beau, doit teter dix-huit mois, mais la plupart des gens de campagne, qui n'ont égard qu'à la multiplication de l'efpece, fans s'embarraffer que l'Anon prenne une belle croiffance ou non, ne le font teter qu'un an; l'Aneffe n'en vaut pas mieux auffi, & il feroit plus à propos qu'elle ne portât que de deux ans en deux ans, que de porter cha

que année.

L'Ane n'eft de bon fervice qu'à trois ans, on l'envoye aux pâturages avec les Jumens & autres bêtes de la Baffe-cour; nous avons déja dit, qu'il coutoit tres-peu à nourrir, le refte du foin que les Chevaux laiffent dans leurs rateliers, ou celuy qu'ils jettent eft bon pour les Anes: un peu de fon quelquefois, quelques criblures de bleds; tous ces alimens donnez en petite quantité leur conviennent; mais il faut pour cela qu'on le deftine à un travail extraordinaire, comme à labourer dans les terres legeres, ou pour voiturer quelque chofe dans une charrette. l'Ane rend bon fervice jufqu'à dix ans.

Si l'on voit que l'Ane fe trouve dérangé par quelque maladie qui luy foit propre, on en confultera d'abord les fymptômes, puis pour le guérir on aura recours au Traité des Maladies des Chevaux, les infirmitez des Anes étant les mémes, & provenant toutes des mêmes causes.

Du lait d'Aneffe, & de fes proprietez.

L'Aneffe n'eft pas feulement utile par les petits Anons qu'elle donne, on la recherche encore pour fon lait; il a beaucoup de rapport par fa confiftance & par fes vertus avec celuy de femme; on l'employe pour la phryfie, & pour les autres maladies du poulmon.

Un Médecin ancien dit qu'il faut faire étriller tous les jours l'Aneffe.

dont on prend le lait, c'est aparemment qu'en l'étrillant on ouvre davantage les pores de la peau, & qu'on donne par ce moyen un plus libre paffage aux vapeurs fuligineufes qui cherchent continuellement à s'échapper, & qui, fi elles y étoient retenuës, fe mêleroient avec les parties du lait, & pourroient le rendre moins propre à produire de bons effets. Les Laboureurs bons ménagers gardent la peau de leur Ane pour en faire du cuir, dont ils font faire de bons fouliers qui durent beaucoup, principalement ceux qui font faits de l'endroit du dos; il faut à la verité avoir la peau des pieds bien dure pour fe fervir de tels fouliers; on fait auffi les tambours de la peau des Anes.

Outre tout l'avantage qu'on tire de ces animaux, ils fçavent encore prédire quel temps il doit faire. On raconte à ce fujet qu'un certain Seigneur Breffan ayant reçu des fruits qu'un de fes amis luy envoyoit par fon Jardinier, celuy-cy le pria de le vouloir renvoyer au plûtôt, parce qu'il craignoit, dit-il, que la pluye ne le furprît en chemin, ce Seigneur fit venir là deffus un Aftrologue ( on ne fçait pas fi c'est à l'occafion du Jardinier, ou pour quelque autre raifon) il luy demanda s'il pleuvroit ou non ce jour-là, le Philofophe afsûra des plus le contraire; le Jardinier là deffus s'en retourna, & à peine eut-il fait une lieuë que la pluye tomba en abondance; le Seigneur Breffan envoya courir aprés ce Jardinier, avec ordre de le luy amener, & s'étant informé à luy-même du fecret de fa prédiction, le Jardinier luy répondit que fon Ane luy avoit toute la journée donné des fignes de pluye, en tenant fes oreilles collées le long de fon cou pendant fon voyage. Le Gentilhomme fit venir l'Aftrologue, & fe moquant de luy, il le chaffa de fes terres comme un ignorant, & luy dit qu'au lieu de gens de fon caractere, il nourriroit des Anes à l'a

venir.

CHAPITRE

XXIV.

l'on apprend la maniere de nourrir les Mouches à miel, les foins qu'il faut y apporter, & le profit qu'il y a d'en avoir

à la Campagne.

Nous allons préfentement parler des Mouches à micl, que nous confeillons de nourrir à la Campagne, à caufe du grand profit qu'on en tire, & qui eft d'autant plus considerable, qu'il y a bon nombre de ruches qui en font remplies. Nous ne nous arrêterons point icy à ce qu'en dit la Fable, ni à ce qu'en ont écrit quelques Naturaliftes, ce n'est qu'une curiofité, qui ne pourroit fervir que d'amufement au Lecteur, & dont il fe paffera tres-bien. Les Mouches à miel demandent de grands foins, & l'on ne peut s'attendre à tirer d'elles bien du miel & beaucoup de cire, fi on les neglige; & c'eft fur ces foins que celuy qui en a la conduite doit abfolument compter: commençons par choifir un lieu propre pour les placer.

Virg.

Ο

De l'Endroit l'on doit placer les Abeilles.

N doit en premier lieu mettre les Abeilles ou Mouches à miel, c'est la même chofe, dans un endroit qui foit à couvert des vents; car Georg. 4. ils empêchent qu'elles ne portent leur nourriture dans leurs ruches; ce lieu doit être retiré & fcitué, s'il fe peut, au bas de quelque colline, afin que les Mouches puiflent plus aisement voler en haut, & redefcendre avec plus de facilité, quand elles font chargées de butin.

Il n'y doit point entrer ny Brebis ny Chévres qui fautent fur les fleurs, & l'on prendra garde que les Geniffes, errantes par les champs, n'aillent point abattre la rofec aux environs de ce licu, & n'y foulent point les herbes qui y naiffent; tous ces animaux, ainfi que les Chiens, les Poulles & autres Oifeaux de la Baffe-cour font incommodes aux Abeilles, les uns les détournent de leurs ouvrages, & les autres leur font la guerro pour s'en nourrir.

Les Mouches ont encore pour ennemis les Guefpes, les Oifeaux & fur tout l'Hirondelle qui en fait un grand dégât, prenant les Mouches à miel dans le temps qu'elles volent, & les emportant avec leur bec pour en repaître leurs petits.

Que ce lieu foit proche de quelque Fontaine, d'un Etang ou de quelque Ruiffeau qui ferpente aux environs; éloignez toûjours les Abeilles des mauvaises odeurs, des marécages, des Bourbiers & d'autres endroits infects; qu'il y ait des arbres proches les ruches, afin qu'au printemps, quand les nouveaux Rois menent leurs premiers effaims, & que les jeunes Abeilles fe joüent hors de leurs paniers, les rivages d'allentour les invitent à fe repofer pour fe garantir du chaud, & que les arbres qui font vis à vis les y puiffent retenir par une retraite couverte d'ombre.

Soit qu'il y ait une eau dormante ou un ruiffeau, mettez-y de petites branches d'arbres en travers & jettez-y des cailloux, afin qu'elles puiffent s'arrêter deflus, & ouvrir leurs aîles pour les faire fecher aux ardeurs du foleil; en cas qu'un vent impetueux ait difperfé les moins diligentes, ou les ait précipitées dans l'eau.

Il faut qu'il y ait dans ce lieu des herbes odoriferantes, comme le thim, le romarin, la fariette, le ferpolet ou autres: les Abeilles aiment les odeurs, & la rofée qu'elles y vont fuccer, ainfi que fur les fleurs, donne un goût admirable à leur miel, & leur en font produire en abon

dance.

On a foin en Languedoc d'éloigner les Mouches à miel des fleurs de l'orme, du tythimal, du genêt, de l'arboufier, du buys, parce que le fuc que cet infecte en tire, diminue beaucoup de la bonté du miel, outre qu'il y a de ces fleurs qui rendent les Abeilles malades.

Le lieu ainfi choifi, on fongera à y affeoir leurs ruches ou paniers, comme on voudra dire, on ne doit jamais les pofer à terre, mais toûjours fur des manieres de bancs, ou de fieges conftruits de bois ou de pierres.

Des Bancs propres pour affeoir les Ruches.

LES Es Bancs les plus bas doivent être élevez de terre d'un demi pied', ce font ordinairement de grandes planches ou autres pieces de bois affez larges, qu'on pofe fur des pierres fimplement, ou für une maçonerie de moillon, ou bien ces bancs ne feront que de pierres larges ainfi qu'on les trouve, ou de pierre maçonnées artiftement, cela dépend de la fantaifie.

Dans les

pays où il y a grande abondance d'Abeilles, on place les Ruches en amphiteatre, faifant en forte que les Bancs ne se joignent point, qu'il y ait un vuide entre deux, afin d'y paffer librement pour vifiter les Mouches quand il en est besoin, & il faut que les Paniers y foient placez en échiquier fans fe toucher l'un l'autre, afin que chaque ruche foit frappée des rayons du foleil qui les fortifie. Quand les Bancs font conftruits de cette forte, on ne craint point que les ferpens, les limaçons & autres ennemis des Mouches les y viennent attaquer; nous donnerons une Figure dans la fuite de la maniere qu'on doit placer les Ruches felon l'idée qu'on vient d'en donner, quand nous aurons parlé de ces Ruches.

Des differentes fortes de Ruches.

L A matiere dont on doit former les Ruches n'eft point absolument dé'terminée, les uns en font de bois, de pierre, de terre cuite, de brique, d'écorce d'arbres, ou de paille; il y en a qui les enferment dans les murs, qui les laiffent à l'air ou à couvert, felon qu'il leur en prend Fantaisie; toutes ces manieres réüffiffent tres-bien, tant il eft vray de dire, que les Abeilles font aifées à conduire : cependant les Ruches les plus communes & les plus commodes font celles qui font de bois d'ofier ou de paille. Quelques Auteurs ont raifonné differemment fur chaque efpece de Ruches, faifant valoir les unes plus que les autres, en les appropriant le mieux du monde au genre de l'infecte qu'elles doivent renfermer; mais comme on experimente tous les jours que toutes ces Ruches réüffiffent également bien, on laiffe la liberté de s'en fervir comme on voudra.

On prétend que pour les Ruches de bois, on doit fe fervir de planches de Chêne, de Chateignier, de Noyer, de Sapin, ou de Hêtre : ou le liege eft commun, on doit le préferer à tous autres bois pour la fabrique de ces Ruches, & de quelque matiere qu'elles foient, il faut foigner qu'il n'y ait aucun jour par où les vents froids puiffent fe gliffer; on fait auffi des Ruches de troncs d'arbres qu'on creufe artiftement, & on fe fouviendra qu'il faut que toutes les Ruches foient garnies en dedans de deux bâtons en croix, pour aider aux Mouches à y affeoir fermement leur ouvrage ; il y a des Ruches de deux pieces, mais on ne les eftime pas tant que celles qui ne font que d'une piece: celles de planches ont diverfes figures il y en a de quarrées, de triangulaires & autrement, telles qu'on fouhaite que le Menuifier les fabrique. Nn iij

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