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AN. 1644.

Inftruction.

M. al. Sing
Chigi.

accordant ce qu'elle demandoit, par-
Ice que le Cardinal Ginetti n'avoit
pas en effet affez d'expérience & de
capacité pour une médiation fi déli-
cate. Cependant comme ce Cardi-
nal étoit encore en Italie, M. Chi-
gi, qui étoit Nonce à Cologne, fur
chargé d'aller à Munster, pour y pré-
fider à l'ouverture des Conférences
& faire les fonctions de Médiateur
en attendant l'arrivée du Légat. Le
Cardinal Mazarin le croyoit de fes
amis, & on l'avoit autrefois deman-
dé pour Nonce à la Cour de Fran-
ce. Par cette raison les François ne
douterent point qu'il ne dût leur être
favorable, & entrer dans leurs inté-
rêts; mais ils crurent devoir diffimu-
ler leur joie & leurs efpérances, pour
ne pas rendre le nouveau Médiateur
fufpect aux ennemis, & Chigi de
fon côté diffimuloit encore plus ha-
bilement fes véritables fentimens
pour fe ménager la bienveillance de
la Cour de France.

Rien ne lui étoit tant recommandé dans l'inftruction qui lui fut envoyée de Rome, que d'observer une parfaite neutralité entre les partis,

& d'éviter tout ce qui pouvoit donner le moindre foupçon de Partiali- AN. 1644té. On lui défendoit de faire aucune propofition de fon chef, ni de dire fon avis fur celles qui feroient faites par les Plénipotentiaires. Il devoit fe contenter d'écouter & de rapporter les raifons de part & d'autre, & comme le confident des deux partis, les faire valoir tour à tour avec un zéle parfaitement égal. On ne vouloit pas même qu'il fit partir de couriers que de concert avec les Plénipotentiaires. Lorsqu'il auroit quelque avis à donner à la Cour de Rome, ou aux Nonces qui réfidoient dans les Cours de l'Europe, on vouloit qu'il fe fervit de la voie des Marchands: ou fi la chofe preffoit, qu'il défendit à fes couriers de courir les premieres & les dernieres poftes, afin qu'on ne les prit que pour des voyageurs ordinaires. Il avoit ordre de régler fur le même pied fes vifites, fes difcours & toutes les démarches; & enfin les domeftiques devoient fe conformer en cela à la conduite de leur Maître. Le Pape n'étoit cependant pas tellement neutre dans fa

médiation, qu'il n'eût quelques in

AN. 1644 térêts à ménager dans le Traité. Ils fe réduifoient en général à favorifer les Princes Catholiques contre les Proteftans, à conferver les biens de l'Eglife, & à entretenir l'équilibre、 des Puillances en Italie.

11. Louis Con

Yenife.

Ce dernier objet étoit auffi l'artitarini, Am-cle effentiel que les Venitiens avoient baffadeur de en vûe de ménager dans le Traité, & qu'ils recommandoient à leur Ambaffadeur C'étoit le Chevalier Louis Contarini, noble Venitien, qui s'étoit rendu à Munster plufieurs mois avant le Nonce, pour partager avec lui la médiation au nom de la République de Venise. Ce Miniftre foutenoit depuis près de vingt ans le titre d'Ambaffadeur de fa République à la Haye, en Angleterre, en France & à Conftantinople avec beaucoup de reputation, d'adresse & de capacité. Il négocioit le plus fouvent avec cette retenue & ce flegme qui est commun aux Venitiens ; quelquefois avec beaucoup de vivacité, felon que l'occafion l'exigeoit, & il y joignoit toute la diffimulation & la fubtilité ordinaire des Italiens. Quand il ne

Lettre des

pouvoit pas faire expliquer les Im-
périaux à Muniter, il le fervoit du AN. 1644.
Rélident de Venife à Vienne pour Plénip, à M.
faire parler les Miniftres de cette 12. Novembre
Cour. Il employoit apparemment la 1644.
même rufe avec la France, & les Pié-
nipotentiaires François en donnerent

de Brienne

de Brienne aus

avis à la Cour. Comme la France ve-, Lettre de M.
noit de procurer la paix à l'Italie par Plenipot. 19.
l'accommodement du Pape avec le Mars 1644.
Duc de Modene & les Princes li-
gués, elle s'imagina que la recon-
noillance de ce fervice lui rendroit
la République de Venife & fon Mi-
niftre plus favorables. Contarini a Lettre du
voit niême autrefois paru fort atta- Card. Mazar.
ché à la France, lorfqu'il réfidoit à aux mêmes 16.
Paris; mais fi cet attachement fut

fincére, devenu Médiateur de l'Eu-
rope, il ne fe crut plus permis de
fuivre fes inclinations particulieres.
La France l'accufa même quelque-
fois de ne pas tenir la balance avec
affez d'égalité, & de pancher plus
du côté de la Maifon d'Autriche.
Dès le commencement de la négo-
ciation elle fe plaignit de quelques
lettres qu'il écrivit peut-être avec trop
peu de précaution aux Réfidens Ve-

Avril.

Lettre des
Plénipot. 23.

Avril 1644.

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nitiens dans les différentes Cours de

AN. 1644 Europe, & de ce qu'il paroilloit trop bien inftruit des intérêts de la Maifon d'Autriche, comme s'il en faifoit fa principale affaire: tant un Médiateur a de ménagemens à garder pour ne pas blefler la délicatelle des partis qu'il veut concilier. Les Plénipotentiaires François fe plaignirent encore de ce qu'il refufoit la vifite des Envoyés de Portugal & de Catalogne. Ceux-ci avoient prié les deux Médiateurs de leur permettre de les aller voir fans cérémonie Lettre des comme des perfonnes privées. Le Plénipot, à M. Nonce y avoit confenti; mais Conde Brienne tarini s'obftina à le refufer, & engagea le Nonce à révoquer fa permiffion, ce qui déplut beaucoup aux Plénipotentiaires François. Il étoit cependant difficile à un Médiateur d'en ufer autrement fans choquer ouvertement l'Espagne, que fon carac tere l'obligeoit de ménager autant que la France.

26..Oct. 1644.

,

La médiation du Nonce étoit
Bornée à la réconciliation des Prin-
ces Catholiques, c'est-à-dire, de
FEmpereur, du Roi de France, du

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