Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[ocr errors]

continuoient de femer leurs erreurs, & la fuite ne le fera que trop voir.

LV. Arnaud de

il

ex Ott. Frif.

Le concile de Latran condamna auffi celles d'Arnaud de Breffe fimple lecteur, & autrefois difciple d'Abailard. Il ne Brefie conmanquoit pas d'efprit, & parloit avec plus de facilité que damné. de folidité, aimant les opinions nouvelles & fingulières. Etant Tom. x.conc. revenu en Italie après avoir étudié long-temps en France, p. 1012. fe revêtit d'un habit de religieux pour fe faire mieux écouter; 11. Fr. c. 20. & comença à déclamer contre les évêques, fans épargner & Gunth. le pape, contre les clercs & les moines, ne flattant que les Ligur. lib. 3. laiques. Il difoit qu'il n'y avoit point de falut pour les clercs qui avoient des biens en propriété, pour les évêques qui avoient des feigneuries, ni pour les moines qui poffédoient des immeubles; que tous ces biens appartenoient au prince, que lui feul pouvoit les donner & feulement à des laïques; que le clergé devoit vivre des dixmes & des oblations volontaires du peuple, fe contentant de ce qui fuffit pour une vie frugale. On difoit d'ailleurs qu'il n'avoit pas de bons fentimens du faint facrement de l'autel & du baptême dés enfans. Par fes difcours il troubloit l'églife de Breffe fa patrie; & expliquant malicieufement l'écriture fainte, il animoit les laiques déjà mal difpofés contre le clergé. Car le fafte des évêques & des abbés, & la vie molle & licentieufe des clercs & des moines, ne lui donnoit que trop de matière; mais il ne fe tenoit pas dans les bornes de la vérité. Ses difcours firent un tel effet, qu'à Breffe & dans plufieurs autres villes le clergé tomba dans le dernier mépris, & devint l'objet de la raillerie publique. Arnaud fut donc accufé dans le concile de Latran par son évêque & par des perfonnes pieufes; & le pape lui impofa filence. Il s'enfuit de Breffe, paffa les Alpes, & fe retira à Zuric, où il s'arrêta, recommença à dogmatifer, & en peu de temps infecta tout le pays de fes erreurs.

AN. 1139.

Le dernier canon du concile de Latran déclare nulles les LVI. ordinations faites par Pierre de Léon & par les autres schifSchifmatimatiques & hérétiques. C'eft-à-dire, comme l'explique un Chr. Maurin. ques dépofés. auteur du temps, que le pape interdit pour toujours & dépofa ceux qui avoient été ordonnés par les fchifmatiques, principalement par l'antipape & par Girard d'Angoulême: avec défense de monter à un ordre fupérieur. Enfuite il appela par leur nom chacun des évêques préfens'au concile, ordonnés dans le fchifme; & après leur avoir reproché leur

epift. 213.

fait fa paix

faute avec indignation, il leur arracha les croffes des mains, les anneaux des doigts, & les palliums des épaules. Pierre de Pife ne fut pas exempt de cette rigueur, & le pape le priva de fa dignité, quoiqu'il la lui eût rendue quand il quitta le fchifme à la perfuafion de faint Sup. n. 44. Bernard. C'eft de quoi le faint abbé fe plaignit au pape par une lettre très-vigoureufe, où louant fon zèle contre les fchifmatiques, il dit que la peine ne doit pas être égale, quand la faute ne l'eft pas, & qu'il importe pour fa réputation de ne pas défaire ce qu'il a fait. LVII. Le roi Roger, qui foutenoit le refte du fchifme, fut Le roi Roger publiquement excommunié au concile de Latran avec avec le pape, tous fes partifans. Mais à peine le concile étoit fini Chr. Benev. quand ce prince étant parti de Sicile arriva à Salerne le feptième de Mai 1139, & parcourut la Pouille, ⚫ dont toutes les villes fe rendirent à lui: excepté Troyes & Bari. Le pape l'ayant appris fortit de Rome avec les troupes qu'il put ramaffer, & s'avança jufques à faint Germain, au pied du mont-Caffin. On envoya des députés, de part & d'autre pour négocier la paix mais cependant le fils du roi, à la tête de mille chevaux, attaqua par derrière le pape dans une marche, le priť & l'amena à fon père le dixième de Juillet. Auffitôt le roi Roger envoya des députés au pape fon prifonnier, lui demander la paix dans les termes les plus foumis, & le pape fe voyant abandonné, fans force & fans armes, y confentit. On dreffa les articles du traité, dont les principaux furent que le pape accordoit à Roger le royaume de Sicile, à un de fes fils le duché de Pouille, & à l'autre la principauté de Capoue.

Quand on fut convenu de tout, le roi & fes deux fils vinrent en présence du pape; & fe jetant à fes pieds, lui demandèrent pardon & lui promirent obéiffance. Ils lui jurèrent fidélité à lui & à fes fucceffeurs, & auffitôt le pape donna à Roger l'inveftiture du royaume de Sicile par l'étendard. C'eft ainfi qu'il fe fit confirmer le titre qu'il avoit reçu Sup. 1. LXVII. de l'antipape Anaclet. Cette paix fut jurée le jour de faint Inn. epift. 9. Jacques, vingt-cinquième de Juillet; & le pape en fit expédier fa bulle, où, fans parler de la conceffion de l'antipape, il parle des fervices rendus à l'églife par Robert Guifchard aïeul du nouveau roi & par fon père Roger, & de la dignité que le pape Honorius lui a accordée à lui-même, c'est

21.3.

à-dire

AN. 1139.

[ocr errors]
[ocr errors]

à-dire le titre de duc. C'eft pourquoi, dit-il, nous vous confirmons le royaume de Sicile avec le duché de Pouille & la principauté de Capoue, à vous & à vos fucceffeurs, qui nous feront hommage-lige, à la charge d'un cens annuel de fix cents fquifates; c'étoit une monnoie d'or marquée d'une coupe. C'eft le premier titre de ce royaume, qui de- Cang. Gloff. puis a pris fon nom de la ville de Naples.

Le pape vint enfuite à Benevent, où il fut reçu comme fi ç'eût été faint Pierre en perfonne; & il en chaffa pour la feconde fois l'archevêque Roffiman facré par l'antipape. Le fecond jour de Septembre il retourna à Rome, où il étoit extrêmement défiré; & comme les Romains l'exhortoient à rompre la paix qu'il avoit faite avec le roi Roger, il rejeta abfolument ce confeil: difant que ç'avoit été la volonté de Dieu, que fa prife fût l'occafion de cette paix. Auffi fut-elle approuvée de tout le monde, & Roger fut reconnu pour roi légitime de ceux qui le traitoient auparavant d'ufurpateur & de tyran. C'eft ce qui paroît par les lettres que lui écrivirent fur ce fujet faint Bernard & Pierre, abbé de Clugni.

Chr. Beneva

Bern. epift. 207. Petr. 111.

ep. 3.

LVIII.

S. Malachie

d'irlande.

Vita auct. S.

Opufc. 12,

C. I.

C. 2.

с. 3а

En ce temps faint Malachie vint à Rome pour les affaires de fon églife. Il étoit alors dans fa quarante-cinquième année, étant né en 1095 de parens nobles & d'une mère très-pieufe. Il fut élevé dans la ville d'Armac, où ayant Bern. fait fes études, il fe mit fous la conduite d'un faint homme nommé Imarius, & mena à fon exemple une vie trèsauftère. Quelque temps après Celse, archevêque d'Armac, l'ordonna diacre & enfuite prêtre, malgré lui, mais de l'avisde fon maître, fans attendre l'âge prefcrit par les canons, qui s'obfervoient encore alors: favoir, vingt-cinq ans pour le diaconat, & trente ans pour la prêtrife. L'archevêque l'ayant fait fon vicaire, il commença à travailler avec fruit à l'inftruction de ce peuple encore barbare : arracher les fuperftitions, établir le chant des heures canoniales & les coutumes de l'église Romaine, l'ufage de la confeffion, le facrement de la confirmation, la règle dans les mariages.

Pour le mieux inftruire lui-même, il alla trouver Malc, évêque de Lefmor en Moumonie, qui étant né en Irlande, avoit vécu long-temps en Angleterre dans le monastère de Vincheftre. Il étoit fort âgé, & célèbre non-feulement par fa doctrine & fa vertu, mais encore par fes miracles. Tome X. G

[ocr errors]

1. 9.

Sup. I. xxxv. Malachie demeura quelques années auprès de lui: puis ayant été rappelé en Ultonie, il rétablit le fameux monaftère de Bencor ou Bancor, où avoit vécu S. Colomban cinq cents ans auparavant; & qui ayant été depuis ruiné, par des pirates, étoit demeuré long-temps défert. Le fiége épifcopal de Conner ou Conneret, dans la même province d'Ultonie, étant venu à vaquer, Malachie fut élu malgré lui pour le remplir ; & obligé de l'accepter par l'ordre de fon maître Imarius & de Celfe fon métropolitain: il avoit environ trente ans quand il fut facré évêque, & ce fut par confèquent vers l'an 1125. Mais quand il voulut commencer l'exercice de fes fonctions, il trouva des barbares plus femblables à des bêtes qu'à des hommes. Ils n'étoient chrétiens que de nom, ne donnoient ni dixmes, ni prémices à l'églife, ne contractoient point des mariages légitimes, ne fe confeffoient point, & ne demandoient point de pénitence: auffi perfonne ne fongeoit à leur en donner. Les miniftres de l'autel étoient en petit nombre, & vivoient parmi les laïques dans l'oifiveté : on n'entendoit ni prêcher ni chanter dans les églifes. Le faint évêque ne perdit point courage : il exhorta en public, en particulier : il vifita le diocèfe: il fouffrit la fatigue, les mépris & les mauvais traitemens: il paffa des nuits en prières devant Dieu. Enfin il vainquit la dureté de ce peuple; il y établit la difcipline, la fréquentation des églifes, l'ufage des facremens mariages légitimes.

c. 8.

C. 10.

[ocr errors]

Quelques années après, Celfe, archevêque d'Armac, étant tombé malade, & fe voyant près de fa fin, ordonna que l'évêque Malachie fût fon fucceffeur, ne connoiffant perfonne qui en fût plus digne ; & il l'ordonna par l'autorité de S. Patrice, à laquelle perfonne en Irlande n'ofoit réfifter. Or il s'étoit établi une mauvaife coutume, que le fiége d'Armac étoit héréditaire, & qu'on n'y fouffroit point d'archevêque que d'une certaine famille, qui en étoit en poffeffion depuis près de deux cents ans. S'il ne fe trouvoit point de clercs de cette race, on y mettoit des laïques; & il y en avoit eu déjà huit avant Celfe, qui étoient mariés & fans ordres, quoique lettrés. De-là venoit ce relâchement de la difcipline, cet oubli de la religion, cette barbarie dans toute l'Irlande; où les évêchés étoient changés & multipliés, fans règle & fans raifon, fuivant la fantaisie du métropolitain, enforte que l'on mettoit des évêques prefque en chaque

églife. C'eft afin de remédier à ces maux, que Celfe voulut avoir Malachie pour fucceffeur.

Il fut élu en effet après la mort de Celfe: mais un nommé Maurice, de la famille qui étoit en poffeffion de ce fiége, s'en empara, & s'y maintint par force pendant cinq ans. Malachie ne manqua pas d'embraffer l'occafion de refufer cette dignité; repréfentant qu'il étoit trop foible pour abolir un abus fi invétéré, que l'ufurpateur ne pourroit être chaffé fans effufion de fang, enfin qu'il étoit lié à une autre églife. Toutefois après que l'ufurpation de Maurice eut duré trois ans, Malachie fut tellement preffé par tous les gens de bien, qu'il accepta; difant qu'on le menoit à la mort, & qu'il n'obéiffoit que dans l'espérance du martyre: mais à condition que quand l'églife d'Armac feroit délivrée des ufurpateurs, & que la paix y feroit affermie, on lui permettroit de retourner à fon premier fiége. Toutefois pendant les deux années que Maurice vécut encore, il n'entra point dans la ville, de peur de donner occasion à la mort de quelqu'un. Maurice eut foin de laiffer pour fucceffeur un de fes parens nommé Nigel : mais le roi, les évêques, & tout le peuple fidelle établirent Malachie; & Nigel, obligé à s'enfuir, emporta les marques de la dignité, favoir l'évangile de S. Patrice & le bâton de JESUS: ainfi nommoient-ils un bâton revêtu d'or & de pierreries, qu'ils croyoient que Notre-Seigneur avoit tenu entre ses mains. Avec ces reliques, Nigel fe faifoit refpe&ter du peuple ignorant par-tout où il alloit.

Malachie avoit trente-huit ans quand il prit poffeffion du fiége d'Armac; par conféquent c'étoit en 1133, & pendant les premières années il eut beaucoup à fouffrir de la violence & des calomnies de fes ennemis: mais il les furmonta par fon courage & fa patience. Au bout de trois ans ayant rétabli la paix & la liberté de l'églife, chaffé la barbarie & ramené les mœurs chrétiennes : il quitta fuivant la condition fous laquelle il avoit accepté, & mit à fa place dans le fiége d'Armac Gelafe, homme de mérite & digne de le remplir, du confentement du clergé & du peuple, qui n'ofa s'y oppofer à caufe de la convention. Malachie, l'ayant facré & recommandé au roi & aux feigneurs, retourna à fea ancien diocèfe: non pas toutefois à Conneret, mais à Doune. C'est que ce diocèfe avoit été autrefois partagé en deux, ce qu'il jugea à propos de rétablir; & comme il avoit

C. 118

C. 12.

C. 14

« AnteriorContinuar »