micon ont vu, en riant tout bas sous ces arbrisseaux, faire semblant de donner au jeune Mopsus des baisers innocents. ASTILE. Ah! si Mnasyle n'était pas plus fort que nous, je te ferais bien sentir que tu es le plus infâme des hommes. MNASYLE. Quelle folie, quelle rage vous emporte? si vous voulez vous battre, je ne suis plus votre juge; adressez-vous à un autre. Voici Mycon et Iolas; ils pourront terminer vos querelles. VII LYCOTAS, CORYDON. LYCOTAS. Tu es resté bien longtemps à Rome, Corydon; il y a au moins vingt jours que nos boís te réclament, et que tes taureaux affligés attendent tes chants joyeux. CORYDON. Esprit borné et plus dur que le chêne! Quoi! Lycotas, tu aimes mieux contempler de vieux hêtres que les nouveaux spectacles qu'un jeune dieu déploie dans une vaste arène ? LYCOTAS. J'étais surpris d'un si long retard. J'ignorais pourquoi ta flûte n'animait plus le silence des bois, et pourquoi Stimicon chantait seul, couronné de lierre. Attristés de Quem sine te moesti tenero donavimus hoedo. CORYDON. Scilicet invictus Stimicon, et præmia dives Grata magis fuerint, quam quæ spectamus in Urbe. LYCOTAS. Dic age, dic, Corydon, nec nostras invidus aures CORYDON. Vidimus in cœlum trabibus spectacula textis 2 ton départ, nous lui avons donné un tendre chevreau. Car, pendant ton absence, Thyrsis a purifié nos bergeries, et invité les jeunes bergers à se disputer le prix de la flûte. CORYDON. Que Stimicon vainqueur s'enorgueillisse de son riche présent; qu'il possède avec joie non-seulement son chevreau, mais qu'il emporte toutes les bergeries qu'a purifiées Thyrsis; son ravissement ne saurait égaler le mien, et je n'échangerais pas tous les pâturages des bois de Lucanie contre le plaisir que m'ont fait éprouver les spectacles de Rome. LYCOTAS. Eh bien, Corydon, ne prive pas mes oreilles du récit de ce que tu as vu. Il me sera aussi agréable que tes chants à la fête de Palès, qui féconde nos troupeaux, ou à celle d'Apollon, qui leur procure de gras pâturages. CORYDON. J'ai vu un amphithéâtre en bois élevé jusqu'aux nues Il dominait presque la roche Tarpéienne. Ses immenses gradins avaient une douce pente. J'ai pris place aux loges où le peuple, vêtu d'un chétif manteau brun, regardait au milieu d'une rangée de femmes. Les chevaliers et les tribuns, en robe blanche, se pressaient dans la partie découverte de l'édifice. Comme cette vallée s'étend en un vaste circuit, et forme par la courbure de ses flancs et l'inclinaison de ses bois un vaste bassin au milieu d'une chaîne de montagnes; de même l'amphithéâtre se replie dans tous les sens, et ses deux moitiés réunies présentent un ovale. Te parlerai-je maintenant de l'ensemble des objets dont Per partes spectare suas? sic undique fulgor je n'ai pu saisir que faiblement les détails? j'étais si ébloui! debout, immobile, et la bouche béante, j'admirais tout confusément, sans connaître encore tout mon bonheur, quand un vieillard qui se trouvait à ma gauche me dit : «Villageois, je ne m'étonne pas que tu sois étourdi de tant de merveilles, toi qui, ne sachant pas ce que c'est que l'or, ne vois habituellement que de pauvres demeures, des cabanes et des chaumières, puisque moi, tout cassé et tout chauve, moi qui ai vieilli à Rome, je suis dans l'enchantement. Ce que j'ai vu les années précédentes et dans un temps plus reculé, n'est rien en comparaison de ce que je contemple aujourd'hui. Voistu ce balcon brillant de pierreries? Vois-tu ce portique étincelant d'or, et ce pourtour de marbre qui forme l'enceinte au bas de l'arène? Vois-tu ces superbes tiges d'ivoire implantées dans un cylindre uni qui tourne rapidement sur son axe, afin de renverser les bêtes féroces qui voudraient y enfoncer leurs griffes? Vois-tu ces brillants filets d'or suspendus autour de l'amphithéâtre à d'énormes dents d'éléphant, disposées à des intervalles égaux, et dont aucune (tu peux m'en croire, Lycotas) ne le cède en longueur au soc de nos charrues? >> Qu'ajouterai-je encore? J'ai admiré toutes sortes de bêtes, des lièvres blancs, des sangliers à cornes, un tigre dans ses propres forêts, un élan, des buffles à la tête haute et au dos voûté, des bisons au cou soyeux, à la longue barbe, et au fanon hérissé de poils flottants. Outre ces monstres des forêts, j'ai pris plaisir à voir des ours lutter avec des phoques et des hippopotames, hideux produit de ce fleuve qui féconde les guérets du débordement de ses eaux. Quelle était ma surprise, lorsque, |