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donc jamais, après un long exil, contempler avec transport les champs de ma patrie, et le toit de ma pauvre chaumière, cachée derrière cette poignée d'épis qui forment mon royaume ! Un soldat inhumain possédera ces superbes guérets! Un barbare recueillera ces moissons!... Voilà donc où la discorde a conduit nos malheureux citoyens! Voilà pour qui nous avons ensemencé nos terres! Va, maintenant, Mélibée, greffe tes poiriers, aligne tes jeunes ceps. Allez, mes chèvres, allez, troupeau jadis heureux. Non, mollement étendu dans une grotte de verdure, je ne vous verrai plus suspendues au sommet lointain de quelque roche buissonneuse. Désormais plus de chants. Ma houlette ne vous conduira plus aux lieux où vous broutiez le saule amer et le cytise en fleur. »

Rien n'est si naturel que les sentiments exprimés par Virgile et par Valerius Caton. L'homme est toujours porté à croire que les êtres qui l'environnent partagent sa douleur et sa joie. Théocrite fait dire à un de ses bergers qui vient de remporter le prix du chant : : « Mes chèvres, réjouissez-vous, bondissez jusqu'aux cieux. » Bernardin de Saint-Pierre a heureusement employé cette idée dans le plus célèbre de ses romans. Virginie vient de quitter l'lle de France. Paul est désespéré, et il s'adresse aux animaux qui sont autour de lui. Il dit à ses chèvres et à leurs petits chevreaux qui le suivent en bêlant : Que me demandez-vous? vous ne reverrez plus avec moi celle qui vous donnait à manger dans sa main. » Il alla au Repos de Virginie, et, à la vue des oiseaux qui voltigeaient à l'entour, il s'écria : "Pauvres oiseaux! vous n'irez plus au-devant de celle qui était votre bonne nourrice. »> En voyant Fidèle qui flairait çà et là, et marchait devant lui en quêtant, il soupira et dit : «Oh! tu ne la retrouveras plus jamais. »

14.

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Casus rerum (v. 100) a ici pour synonyme vices rerum, les bouleversements, les révolutions, les catastrophes; aliena in corpora est pour alienas in formas, des changements contraires à leur nature.

15. — Quamvis ignis eris (v. 102). Locution proverbiale qui existait chez les Romains et chez les Grecs. C'est dans le même sens que Properce avait dit :

16.

Sis quodcumque voles, non aliena tamen.

(Lib. I, eleg. 25, v. 32.)

Invideo vobis, agri (v. 104). Ces idées gracieuses et touchantes ont été reproduites dans une célèbre romance dont voici le premier quatrain:

Que ne suis-je la fougère

Qù, sur le soir d'un beau jour,`

Se repose ma bergère

Sous la garde de l'Amour!

Les mêmes vœux avaient été exprimés dans la vingtième ode d'Anacréon. « Que ne suis-je ton miroir, pour que tu me regardes sans cesse ! Que ne suis-je ton vêtement, pour que tu me portes toujours! Que ne suis-je l'onde qui baigne ton corps! le parfum qui s'exhale de ta chevelure! le collier qui pare ton sein! Que ne suisje au moins la chaussure qui enlace tes jolis pieds! »

17.

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Aureus orbis Luna tua est tecum (v. 143). Il paraît que, dans ce passage, Valerius Caton donne à l'auréole de la lune un sens, forcé. Cette auréole est regardée comme un amant qui l'accompagne. 18. Luna dolor nosti quid sit (v. 145). D'après la mythologie, la beauté d'Endymion rendit sensible Phébé ou Diane, qui venait le visiter toutes les nuits dans une grotte du mont Latmos, en Carie. Endymion eut de cette déesse cinquante filles et un fils nommé Étolus.

19. Phoebe, gerèns in te (v.. 146). Ce vers rappelle la métamorphose de Daphné en laurier. Le laurier ornait la tête d'Apollon en mémoire de l'amour qu'il avait éprouvé pour cette Nymphe. Ovide prête au dieu ce langage:

20.

Cui deus: << At conjux quoniam mea non potes esse,
Arbor eris certe, dixit, mea. Semper habebunt

Te coma, te cytharæ, te nostræ, laure, pharetræ.

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(Metam lib. 1, v. 557)

Pompa deum (v. 147) est pour ordo deorum : l'assemblée des dieux, tous les dieux de l'Olympe.

21. — Omnia vos nostis (v. 148). Je lis nostis au lieu de estis, en sous-entendant Phœbe et Luna. Les mots sua gaudia doivent signifier documenta gaudii et amoris sui. Apollon portait une couronne de laurier qui lui rappelait Daphné; de même le dieu Pan voyait dans ses pipeaux un souvenir de ses amours avec la Nymphe Syrinx. 22.

Aut inspersa (v. 149) est mis pour collocata; mundo pour cœlo. On voit dans le ciel la couronne d'Ariane, symbole des amours de Thésée et de Bacchus.

Et quoties oculis circumdet sidera dixit:
Quæ fulget cœlo, nostra puella fuit.

(SABINUS, Her. 11, v. 49.)

23. Sicut captiva (v. 153). Le poëte fait allusion à Briséis, captive d'Achille. Qvide lui prête ce langage, dans la troisième héroïde (v. 69):

Victorem captiva sequar, non nupta maritum.

24. Solvere fata immatura (v. 158) signifie « accélérer la mort de quelqu'un. » Meæ noxæ, qu'on lit dans quelques éditions, est un génitif inexplicable qui doit être remplacé par un ablatif. Nous acceptons la correction de Wenrsdorf. Avant lui on lisait :

25.

Immatura meæ quoque noxæ solvere fata.

Culpa magistra (v. 159). Ces mots ont le même sens que ceux-ci, auctor error, qui se trouvent plus bas, dans le 165e vers.

26. Nam (v. 164). Il semble que l'ordre logique demande la conjonction sed au lieu de nam. Heinsius pense qu'il faut lire invida fata à la place de impia vota. Wernsdorf partage cet avis. Et dea cum tenero (v. 169). Nous donnons ici la leçon présentée par Wenrsdorf. Avant lui on lisait;

27.

Et mecum tenera gavisa est ludere in herba.

Les commentateurs reconnaissent qu'il y a dans cette leçon une lacune, ou du moins un oubli. L'auteur veut évidemment parler des amours de Vénus et d'Adonis. Au moyen de la correction de Wernsdorf, les mots candida brachia se rapportent à Vénus, et formosum collum à son amant.

28.

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Amores (v. 175). L'Aurore, dit la fable, brûla d'amour pour Tithon et pour Céphale. Elle eut deux fils du premier, et un du dernier. Son intrigue avec Orion fut malheureuse pour cet amant Diane le tua à coups de flèches dans l'île de Délos.

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PAR M. CABARET-DUPATY

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LE Pervigilium Veneris est un épithalame fait à l'instar du Poëme séculaire d'Horace, un chant nuptial, un hymne en l'honneur de Vénus, mère de l'univers et de tous les êtres animés, -protectrice de l'empire romain, dont l'origine remonte à cette divinité. Le poëte y chante le printemps, saison où Vénus donne ses lois et préside à la régénération du monde. Dans la description qu'il en fait, il imite Virgile; mais, différant en ceci de son modèle, il rapporte tout à l'amour et à l'union conjugale. Lucrèce, Horace, Columelle et Manilius sont les autres écrivains de l'antiquité auxquels il a emprunté des images.

Le nom de l'auteur est inconnu. Les premiers éditeurs présumaient que l'ouvrage était de Catulle, parce qu'on l'avait trouvé dans un manuscrit à la suite de ses poésies. Scaliger l'attribue à un autre Catulle dont parlent Juvénal et Martial. Saumaise le croit d'un siècle plus récent. Quelques savants ont imaginé que Luxorius, poëte de Carthage qui vivait au commencement dù VIe siècle, en était l'auteur.

Le président Bouhier a pensé que le Pervigilium Veneris, tel qu'il nous est parvenu, se compose de deux poëmes très-différents, quoique composés sur le même sujet; et, en conséquence, il a essayé de séparer ces deux poëmes. Il conjecture que l'auteur du second poëme est Florus, qui vivait du temps d'Adrien, et dont il est question dans Spartien. Par un changement propre au caractère de la langue, ce poëte est aussi nommé Floridus; quelques-uns l'appellent aussi Julius Florus. Rien n'empêche de regarder comme la même personne le poëte Florus et l'historien Lucius Annéus Florus.

Une circonstance vient à l'appui de l'opinion du président, dit M. Scholl, c'est qu'un ancien manuscrit nomme Sénèque comme auteur du Pervigilium Veneris. Or, le surnom de Sénèque est

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