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roses et de fleurs dont elle était couverte au printemps. Il dit qu'on l'appelle le Liban de Vénus, et qu'à une certaine époque, le peuple romain, présidé par le préfet ou par un consul, célébrait sous des tentes une fête délicieuse. Il paraît que tout ce passage se rapporte à la fête à laquelle le Pervigilium était destiné. Il est question, en effet, ici, de tentes ou de cabanes construites sous des arbres et avec des branches de myrte. Le poëte y parle aussi beaucoup de roses. Le nom de Liban donné à l'île indique sans doute que la fête dont elle était l théâtre avait une origine syrienne, ou du moins que du temps d'Ethicus on y avait mêlé des cérémonies étrangères.

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7. Hybla florum, etc. (v. 52). L'édition Lemaire explique parfaitement ce vers et les deux qui précèdent : Hybla, omnes tuos huc funde flores, ut tribunal deæ, quasi ipse Hybla, mons aliquis florum, tantum exstet, quantus Ennæ campus est. Pour mieux comprendre le rapprochement que le poëte établit entre le trône fleuri de Vénus et la plaine d'Enna, qui offre à l'œil un vaste plateau couvert de toutes les richesses du printemps, il est bon de se rappeler ce qu'en dit Cicéron : Enna autem est loco præcelso atque edito, quo in summo est æquata agri planities, et aquæ perennes ; tota vero ab omni aditu circumcisa atque dirempta est; quam circa lacus lucique sunt plurimi, et lætissimi flores omni tempore anni. (Verr. iv, c. 48.)

8.

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In sinum maritus imber fluxit almæ conjugis (v. 61). Cette grande et magnifique idée du mariage de l'Air avec la Terre est empruntée de Lucrèce, et Delille l'a ainsi présentée dans sa traduction des Géorgiques :

9.

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Alors la terre, ouvrant ses entrailles profondes,
Demande de ses fruits les semences fécondes.
Le dieu de l'air descend dans son sein amoureux,
Lui verse ses trésors, lui darde tous ses feux,
Remplit ce vaste corps de son âme puissante:
Le monde se ranime, et la nature enfante.

Subter umbras cum maritis (v. 83). Delille a encore rendu avec la même élégance et le même bonheur d'expression ces idées qui se trouvent dans la charmante description du printemps que nous a laissée Virgile (Géorg., liv. 11, v. 326) :

Dans les champs, dans les bois, tout sent les feux d'amour:
L'oiseau reprend sa voix; les zéphyrs, de retour,

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Adoucissent les airs de leurs douces haleines;

Un suc heureux nourrit l'herbe tendre des plaines.

Le même sentiment est encore exprimé avec plus d'énergie dans ces vers du troisième livre des Géorgiques :

Amour, tout sent tes feux, tout se livre à ta rage;
Tout, et l'homme qui pense, et la brute sauvage,
Et le peuple des eaux, et l'habitant des airs.
Amour, tu fais rugir les monstres des déserts :
Alors, battant ses flancs, la lionne inhumaine
Quitte ses lionceaux et rôde dans la plaine.
C'est alors que, brûlant pour d'informes appas
Le noir peuple des ours sème au loin le trépas;
Alors le tigre affreux ravage la Libye :

Malheur au voyageur errant dans la Nubie!

10. Jam loquaces ore rauco (v. 85). Les épithètes que Virgile donne à la voix du cygne, quand il parle de cet oiseau en naturaliste plutôt qu'en poëte :

Dant sonitum ranci per stagna loquacia cygni,

se retrouvent dans ce vers du Pervigilium :

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Jam loquaces ore rauco stagna cygni perstrepunt.

11. Subter umbram populi (v. 86). Virgile (Géorg., liv. Iv, v. 511) avait dit avec une grâce parfaite

:

Qualis populea morens philomela sub umbra;

et Delille a traduit ainsi son modèle :

Telle sur un rameau, pendant la nuit obscure,
Philomèle plaintive attendrit la nature;
Accuse en gémissant l'oiseleur inhumain
Qui, glissant dans son nid une furtive main,
Ravit ces tendres fruits que l'amour fit éclore,
Et qu'un léger duvet ne couvrait pas encore.

12. De marito barbaro (v. 88). Voyez NEMESIEN (note 15, page 244 de ce volume), au sujet de Progné et de Philomèle.

13. Quando ver venit meum (v. 89). Ces vers porteraient à croire que le Pervigilium Veneris est le début littéraire d'un inconnu. Il regrette de ne pas faire comme l'hirondelle, qui se tient cachée tout l'hiver, et qui reparaît au printemps.

P. Min. I.

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14. Sic Amyclas (v. 92). Il y a eu deux villes de ce nom, l'une en Italie, entre Caïète et Terracine; l'autre dans le Péloponnèse, en Laconie. Un vieux proverbe existait au sujet de celleci: Amyclæ tacendo perierunt, « le silence perdit Amyclée. » Virgile fait allusion à ce fatal silence : Tacitis regnavit Amyclis (Æn. lib. x, V. 564). Sur quoi Servius nous donne l'interprétation suivante : « On avait annoncé souvent aux citoyens d'Amyclée la présence de l'ennemi; mais c'était toujours une alarme vaine. Aussi fit-on une loi pour interdire toute nouvelle de ce genre qui troublait le repos des habitants. Qu'arriva-t-il? Au commencement du printemps, les Doriens parurent, en effet, devant Amyclée. Personne n'ayant poussé le cri d'alarme, la ville fut prise et détruite. »

VESTRITIUS SPURINNA

TRADUCTION NOUVELLE

PAR M. CABARET-DUPATY

Professeur de l'Université.

NOTICE

SUR VESTRITIUS SPURINNA.

Il est des ruines vénérables; elles rappellent la grandeur et la beauté de l'édifice qui n'est plus tels sont les fragments qui nous restent des poésies de Vestritius Spurinna. Leur ton mâle et vigoureux, comme celui de Tyrtée, ainsi que leur élégante précision, imitée d'Horace, décèlent un caractère ferme et un esprit cultivé. Après avoir rempli de hauts emplois, et s'être retiré des affaires à l'âge de soixante-dix ans, Spurinna consacra aux Muses les derniers jours de son honorable carrière. Les nobles sentiments qui règnent dans les fragments de ses odes, le font connaître, à défaut de documents historiques, comme un homme indépendant et modeste, qui a quitté les honneurs sans regret, ainsi qu'il les avait acceptés sans envie, satisfait de cette précieuse médiocrité qui fait le bonheur du sage, ennemi de l'oisiveté et des lâches conseils, modéré dans la bonne fortune, et prêt à supporter avec courage tous les coups de l'adversité.

Pareil au vieil athlète qui se retire avec son congé, Spurinna s'est éloigné de l'arène où il mérita les suffrages publics, et s'est réfugié dans le paisible sanctuaire des Muses. C'est là qu'il commence à jouir de lui-même et à goûter le repos :

Le repos! le repos, trésor si précieux
Qu'on en faisait jadis le partage des dieux.

(LA FONTAINE, lib. VII, fab. 12.)

Mais un esprit actif et laborieux ne peut souffrir les langueurs de l'oisiveté; si l'âge le force de renoncer aux affaires, ses penchants l'appellent encore au travail. En abdiquant ses fonctions, Spurinna veut féconder ses loisirs. Il saisit sa plume et nous trace, à l'insu de lui-même, le tableau de ses mâles vertus. Son exis

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