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bleu, le jaune, le gris, le verd même, comme le noir, font mis en ufage. A cette marque de trifteffe l'on en ajoûte encore d'autres ; & chaque pais à fa coûtume: mais que l'on regle felon la proximité, ou la dignité des perfonnes, ou bien enfin felon la qualité du sujet pour lequel on fe met en deuil; car ce n'eft pas feulement pour la mort des proches que de tous tems l'on a pris le deuil, on la pris encore pour d'autres raifons. Voyons les pratiques de chaque nation fur cette matiere.

Deuil des Juifs.

Le deuil a été en ufage parmi les Juifs dès avant même le tems d'Homere: les divers exemples que nous en avons dans les Ecritures ne nous permettent pas d'en douter. Abraham, Ifaac, & Jacob fe mirent en deuil à la mort de Sara, de Rebecca, de Rachel, leurs Femmes, comme on le lit dans differens chapitres de la Genefe. Dans cette Nation une telle ceremonie devint commune

dans la fuite, & fut univerfellement pratiquée Les exemples en font frequens dans les Livres faints. Les Ifraëlites la pratiquerent à la mort de Moïfe, d'Aaron, & de plufieurs autres elle ne fut pas même negligée par les Gentils & les Etrangers; puifque dans le Livre de Job il eft fait mention du deuil dans lequel fes amis se mirent, après que la main de Dieu l'eût touché. Au refte l'on entroit en deuil, non- feulement pour les perfonnes particulieres, mais encore pour les publiques, pour les Rois les Generaux d'Armée, les grands Prêtres, &c.

Nous ne favons pas au für fi par mi les Juifs les habits de deuil étoient d'une couleur particuliere & déterminée, telle qu'eft la noire en Europe, la jaune en Egypte, la grife en Ethiopie, la verte au Perou, la bleue en Syrie, en Cappadoce & en Armenie: ce que nous favons, c'est que leurs habits dans le tems du deuil, n'étoient que des vêtemens. déchirez & fales ou des fimples. facs, c'eft à dire, étroits, fans plis,

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fans aucune forme, qu'ils nommoient cilices, parce qu'ils étoient faits de gros camelot, ou de quelqu'autre étoffe rude, & groffiere, mais enforte qu'ils couvroient tout leur corps generalement fans en excepter même la tête. Quelquesuns difent qu'ils étoient coufus fur leurs peaux, & qu'ils leurs tenoient lieu de chemises. De la matiere & de la forme de ces habits, nous pouvons en inferer la couleur, & juger que c'étoit la grife, ou bien celle de l'animal..

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Les marques de deüil chez les Juifs, ne fe terminoient pas au feul changement d'habit, ils en donnoient quantité d'autres : déchirer fes vêtemens; fe battre la poitrine, mettre les mains fur la tête tantôt fe la couvrir, tantôt fe la découvrir, & y jetter de la pouffiere ou de la cendre; garder un profond filence, & ne parler que pour fe plaindre ou chanter des Cantiques lugubres; accompagner de jeunes toutes ces chofes, c'est à dire, ou ne manger point du tout pendant tout le tems.

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duroit le deuil, ou ne manger qu'après le Soleil couché, & du pain feulement & quelques legumes; ne boire après tout cela que de l'eau, c'étoient là les marques qu'ils donnoient de leur trifteffe, & de leur douleur qu'ils faifoient durer regulierement fept jours, qu'ils pouffoient mêmes fouvent au delà, c'est à dire jufqu'à trente jours, comme à la mort de Moïfe & d'Aaron; jufqu'à feptante, comme à celle du Patriarche Jacob quelque fois même toute la vie, comme firent Judith & Anne la profeteffe pour leurs Maris.

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Au Refte fi les Juifs rafoient leurs barbes sils s'arrachoient les cheveux, s'ils fe faifoient des incifions, ce n'étoit là qu'une coûtume qu'ils tenoient des Iduméens leurs voifins, comme les Iduméens la tenoient des anciens Gentils & Idolâtres; la loi par conféquent ne l'ordonnoit pas, au contraire il la défendoit par ces paroles du chapitre 14. du Deuteroname: Filii eftote Domini Dei vefstri : non vos incidetis, neque facietis calvi

tiam fuper mortuos, quoniam populus fanctus es Domino Deo tur.

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Les caufes du deuil parmi les Juifs étoient non feulement la mort des parens, c'étoit encore une calamité publique ; une incurfion

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d'Ennemi; une fterilité ou une mortalité generale; un malheur même particulier comme quand on étoit accusé d'un crime, qu'on avoit un parent, ou un ami malade, en captivité & ainfi de toute autre chofe naturellement affligeante. Ainfi Heli paroît en deuil après l'enlevement de l'Arche; Mardochée après la Sentence injufte contre fa Nation; tous les Juifs pendant le Siege de Jerufalem formé par Antiochus c'étoient là des calamipubliques mais quand Jacob pleure le defaftre de fon fils Jofeph, Tobie la perte d'un de fes Concitoyens, c'étoient des maux particuliers. C'eft à peu près ce qu'on peut dire du deuil des Juifs. Nous parlerons plus bas de leurs fepultures,

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