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Deüil des Romains.

Les Romaius pleuroient leurs morts, de même que les Juifs, & les autres peuples. Ce fut Numa qui regla le tems de leur deüil, qui en defigna les ceremonies, & qui en retrancha certaines indécences, & fuperftitions que l'on obfervoit avant lui. Mais il ne fe paffa guere du tems que le relâchement fe gliffa dans la pratique de ces lugubres ceremonies, foit que ce relâchement vint des où de la viciffitude des chofes qui difficilement fe foutiennent dans le même état ; quoiqu'il en foit, voici à peu près en quoi ils faifoient confifter leur deüil.

Princes,

Quant aux habits, pendant foixante ans ils en porterent de couleur blanche; mais dans la fuite ils fe fervirent de la noire, comme reprefentant mieux, dir Varron, les tenebres & la corruption de la mort, fi ce n'eft quand ils prenoient le deuil pour les jeunes gens; alors le bleu celefte étoit la couleur dont ils fe

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fervoient comme ayant un plus grand rapport à celle du Ciel. Quelques-uns ont voulu dire qu'à la mort d'un parent les Romains s'habilloient de peaux; ils fe font ils fe font trompez; il est vrai qu'ils s'en fervoient d'une ; mais ce n'étoit que pour s'y affeoir deffus, quand ils pleuroient auprès du cadavre. Ceux qui faifoient le convoi, ou qui alloient inviter les parens & amis du mort pour l'accompagner à la fepulture, étoient revêtus d'une grande & longue robe noire, qui defcendoit jufqu'aux talons. Le deüil que les Efclaves portoient pour leurs Maîtres confiftoit en une espece de chapeau de laine blanche ils s'en ceignoient la tête; mais ceux-là feulement portoient de chapeau, qui avoient été mis en liberté, dont le chapeau étoit la marque & le fymbole, d'ou venoit que fouvent les Maîtres affranchiffoient beaucoup d'Efclaves, quoiqu'ils ne meritaffent pas toûjours cette grace, pour avoir par là une plus grande & nombreuse fuite à leurs funerailles.

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Les

Les Romains donnoient plufieurs autres marques de leur douleur & de leur trifteffe, dont les Suivantes font les plus connues, & les principales. Les Femmes fe déchiroient le vifage, dechiquetoient leurs chairs, & pratiquoient d'aurres femblables ceremonies qui furent reformées dans les XII. Tables, comme trop barbares & trop indécentes. Mais voici ce qui fut toûjours en vigueur parmi eux. Tandis qu'on brûloit les corps de leurs parens morts, ils jettoient ce qu'ils avoient de plus cher & de plus précieux dans le bucher ou fe confumoit le cadavre. Les hommes y jettoient leurs habits, leurs baudriers, leurs épées, & toutes leurs armes. Les femmes pour ne pas témoigner moins de fenfibilité que les hommes en faifoient autant de leurs colliers, de leurs bagues, de leurs bracelets, de leurs ceintures, du refte de leurs ornemens & de leurs bijoux. Les uns & les autres rafoient leurs cheveux, qu'ils jettoient de même fur le cadavre, comTome IV.

S

me fit autrefois Achille qui dans les funerailles de Patrocle, fe coupa fa chevelure blonde, comme on le voit dans l'Illiade. Ils s'imaginoient que de fe défigurer ainfi la tête c'étoit donner la marque de douleur la plus évidente, ce qu'un Poëte femble confirmer quand il dit que:

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Turpe pecus mutilum, turpis fine gramine campus;

Et fine fronde fructex, & fine crine caput.

Au contraire dans le tems qu'ils étoient rafez, & qu'ils ne portoient point de barbe, ce qui dura jusqu'à 'Empire d'Adrian, qui fut le premier qui commença à fe laiffer croître la barbe, dans ce tems ils fe laiffoient croître eux-mêmes, & la bar be & les cheveux.

Tout ce encore que le défunt avoit eftimé, étoit confumé avec lui. On brûloit jufqu'à fes chiens, fes oifeaux fes habits fes armes. Il s'en trouvoit qui fe précipitoient

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dans les mêmes flâmes ou bruloit un

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pere, une mere un époux une époufe, &c. ou qui fe procuroient en quelqu'autre maniere une mort cruelle. Les branches de pin, de cyprès étoient penduës aux planchers des maifons, & aux veftibules comme étant les fymboles ou les hyerogliphes de la mort & de la trifteffe. Les trompettes, le, flûtes, les chan-fons lugubres étoient employées avec des pleureufes, pour rendre le deuil ou plus éclatant, ou plus trifte. Pour les grandes gens il y avoit des oraifons, des jeux, des combats funebres, ce qu'ils imitoient des Grecs, qui inftituerent des jeux à Nemée en l'honneur d'Archemore. Les images enfumées de leurs Ancêtres, étoient tirées du frontispice de leurs maifons, & portées fur des perches aux funcrailles du défunt, comme reprefentant toute la fuite, & la genealogie de fa famille. Rien n'étoit negligé dans ces lugubres ceremonies.

Le deuil fe portoit pour les peres, pour les meres, & pour les

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