dans des fentimens oppofez. Le Lecteur trouvera icy des chofes dignes de facu riofité, des évenemens extraordinaires, &des faits furprenans. Ce fera pour luy une ample matiere à réfléchir fur la folie de la plupart des hommes, & fur la foibleffe qu'ils ont de recevoir fans examen toutes fortes de nouveautez, &de prendre aveuglément les vifions les plus ridicules,pour des veritez effentielles: un homme du commun qui, par le moyen de quelques revela tions groffierement fuppofées, forme une puiffante armée,& fait trembler toute l'Allemagne; un tailleur qui fe rend maître d'une grande ville, qui à l'age de vingt-fix ans a l'addrefle de s'y eriger un Royaume, & l'ambition de vouloir étendre fa domination par toute la terre.

L'étonnement des Lecteurs diminueras'il font attention à la fituation où fe trouvoient les efprits en Alle magne & dans les païs voifins depuis la revolte de Luther contre l'E glife. Quand on n'a plus de regle de foy, les erreurs les plus monftrueufes s'établissent aisément ; & quand on s'eft accoûtumé à la nouKiiij

veauté en matiere de Religion, on fe porte bien-tôt à n'avoir pas plus de refpect pour l'autorité feculiere qu'on en a eu pour l'autorité Ecclehaltique.

On a donné le nom d'Anabaptiftes à plufieurs fectes qui fous pretexte d'une plus grande reforme, fe font feparées des autres Proteftans. Ce nom vient d'une erreur commune à toutes ces feccès. Ils condamnent le baptême donné aux enfans, & rebaptifent tous ceux qui ont eté baptifez dans l'enfance, parce, difentils , que le baptême doit être précedé par des actes de foy, dont les enfans font incapables.

A ces erreurs chaque fecte d'Anabaptiftes en ajoûte plusieurs autres. Quelques-uns nient la Trinité & renouvellent les erreurs d'Eutychés & d'Appellés. Ils foutiennent que le Fils de Dieu n'a point pris nôtre chair dans le fein de la bien-heureufe Vierge; mais qu'il s'eft revêtu d'un corps celefte ; & qu'enfin la nature divine a absorbé la nature humaine.

... D'autres au contraire ont ensei

gné qu'il y avoit trois Dieux inégaux: d'autres ont renouvellé l'erreur d'Arius & même celle de Photin, contre la divinité de JESUSCHRIST: d'autres ont renouvellé les vifions d'Origene fur la préexiftence des ames avant les corps, & fur de prétendus péchez que ces ames ont commis dans le ciel. Ils ont dit, comme luy, que les tourmens des Demons finiroient. Quelques-uns d'eux croyoient les aftres, & même tous les corps, animez. Ils ont permis,comme les Valentiniens, de renoncer la foy dans la perfecution. Enfin, pouffant leur égarement jufqu'au dernier excez, ils ont affûré que la faute d'Adam ayant été entierement reparée, ils étoient rétablis au premier état de l'innocence originelle. C'eft pour cela qu'ils prioient nuds dans leur temples, renonçant à toute pudeur, ils fe difoient impeccables, lors même qu'ils s'abandonnoient aux plus infames dereglemens: ils permettoient la polygamie & l'incefte: ils fe faifoient un devoir de Religion de ne rien refufer aux paffions les plus brus

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tales: ils prétendoient être envoyez de J. C. d'une maniere extraordinai re pour détruire toutes les puiflances de la Terre & pour établir une nouvelle Monarchie Univerfelle.

Comme il ne purent trouver dans l'Ecriture dequoy excufer tant de crimes, ils en rejetterent l'autorité, prenant pour regle des revelations extraordinaires ; & donnerent dans Je fanatifme le plus outré, jufqu'à fe vanter les uns d'être Elie, & les autres d'être le Fils de Dieu : comme fit,par exemple David George peintre en verre natif de Gand › qui environ l'an 1927. fe difoit le troifiéme David, petit Fils de Dieu, non pas felon la chair, mais felon l'efprit. Nôtre Auteur qui dit page 7.que David George fe qualifioit neveu de Dieu; s'eft trompé fur la double fignification du mot latin Nepos.

Il rapporte fort au long tous les noms qu'on a donnez aux Anabaptiftes anciens: nous nous contenterons de remarquer qu'ils s'appelloient eux mêmes les Apoftoliques; & que ces libertins contre lefquels

Calvin fe déclare avec tant d'emportement, & que Bellarmin a refutez avec fa folidité ordinaire, ne font autres que les premiers Anabaptiftes.

L'Auteur parle enfuite de deux fectes d'anciens Anabaptiftes qui avoient leurs erreurs particulieres. Les Auguftiniens, difciples d'un certain Auguftin, qui foutenoient que le ciel ne feroit ouvert à perfonne avant le dernier jour: & les Melchioriftes, qui renouvelloient tout enfemble les erreurs des Pelagiens, des Novatiens & des millenaires, & les joignoient aux autres erreurs des Anabaptiftes.

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Aprés nous avoir donné l'idée de la doctrine des Anabaptiftes qu'il a raifon de nous faire regarder comme un affemblage monftrueux de toutes les herefies anciennes les plus extravagantes, l'Auteur vient à l'hiftoire des faits. On ne convient pas du tems ni du lieu où cette fecte commença.Quelques-uns difent que ce fut en Boheme: d'autres remont tent jufqu'aux Vaudois d'autres régardent Luther commé Auteur de