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J. C. 1523.

AN N. de refaits, & s'étant chargés de ce qu'ils purent porter de la marchandise du pays avec d'autant plus de facilité, que les Portugais étoient alors DON JEAN abfens, ils remirent à la voile pour l'Efpagne D. EDOUARD au mois de Decembre 1521. laiffant à Tidor DE MENESES les douze hommes, dont nous avons parlé.

III. Roi.

GOUVER

NEUR.

pour

Antoine de Britto étant allé aborder à Tidor fe faifir d'abord des Espagnols, n'y trouva aucune difficulté de leur part, ni de celle d'Almanfor, qui fe trouva néanmoins un peu furpris, & commençant à faire fond fur les Caftillans, efperoit pouvoir fe paffer des Por tugais, dans lesquels il avoit remarqué plus d'inclination pour Boleife que pour lui.

Britto en ufa fort bien avec les Efpagnols; & quoiqu'il faisît tous leurs effets, il les fit néanmoins enregistrer. Des deux Vaisseaux qui reftoient de la Flote de Magellan, l'un revint se mettre à la merci. Celui-ci qui devoit faire route pour aller chercher les Antilles, après avoir lutté deux mois contre les vents, le vit forcé de relâcher aux Molucques, quoiqu'il en fût déja à plus de huit cens lieuës,ayant une voie d'eau que quatre pompes ne pouvoient épuifer. Accablés de miferes & de fatigues, ils firent prier Britto, dont ils fçurent l'arrivée, d'avoir compaffion d'eux, & de leur envoyer du secours. Britto leur envoya une caravelle avec des rafraîchissemens & des anchres. La caravelle étoit suivie de plusieurs caracores ou

du

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DON JEAN

DE MENESES
GOUVER
NEUR.

grands bâtimens à rames, conduits par des gens A N N. de pays. Don Garcie Henriques y alla auffi avec ordre de faire ce qu'il pourroit pour fauver le bâtiment; mais il ne put l'empêcher de faire cô- III. ROL te & de se briser. Pour ce qui eft des hommes, D. EDOUAR qui étoient plus morts que vifs, on en eut aufsi grand foin, que s'ils euffent été Portugais naturels. Un feul qui l'étoit veritablement, & qui s'étoit joint à Tidor aux Caftillans, eut la tête tranchée, comme coupable de trahison. Les autres ayant été conduits aux Indes, furent ramenés en Portugal, d'où ils repafferent en Espagne.

Le fecond Vaiffeau nommé la Victoire, qui avoit gouverné droit fur le cap de Bonne-Efperance, aborda aux Ifles du cap Verd: le Gou verneur le fit faifir, & mettre tout l'équipage en prison, où plusieurs moururent de mifere. Ceux qui furvecurent à cette difgrace ayant été ensuite élargis, & le Vaisseau leur ayant été rendu, ils vinrent prendre port à Seville, où ce Vaisseau regardé comme une merveille du monde pour être le premier qui en avoit fait le tour, fut mis dans un arfenal, pour être confervé & montré à la pofterité.

Charles Quint, à qui cette découverte fit un plaifir très-fenfible, fut fâché de la mort de Magellan, qu'il auroit dignement récompenfé. Jean Sebaftien Cano natif de Biscaye, qui avoit

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III. ROI.

D. EDOUARD

A N N. de grands honneurs, & pour armoiries un globe terreftre avec ces paroles au tour primus me 1523. circumdedifti. Cependant cette découverte reDON JEAN veilla la jaloufie & la prétention des deux Cours, chacune foutenant que les Molucques DE MENESES étoient de fon district. On tint plufieurs conferences de Jurifconfultes, de Mathematiciens & de Marins, fans rien décider. A la fin pourtant les chofes s'accommoderent après qu'elles eurent été long-tems traitées en Europe avec la plume, & aux Molucques avec l'épée.

GOUVER

NEUR,

Boleife Roi de Ternate & François Serran étoient morts lorfque Britto arriva aux Molucques. Ce Prince, qui avoit toûjours été attaché aux Portugais, leur donna une derniere preuve de fon affection avant que de mourir; car il n'eut rien tant à cœur que de recommander à fon époufe qu'il laiffoit tutrice de fes enfans, & dont celui qui lui fuccedoit n'avoit que fept ans, de fe tenir toûjours unie à la Couronne de Portugal, dont la protection affermiroit la fienne dans fa maison. Les dernieres volontés de ce Prince avoient fait impreffion fur le cœur de la Reine & des Grands de fa Cour. Et en effet les Portugais avoient trouvé jufques alors dans Ternate toutes les démonftrations d'une affection cordiale & fincere.

Si Britto avoit fuivi les ordres pleins de sageffe, que le grand Alphonse d'Albuquerque

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DON JEAN

avoit donnés à Antoine d'Abreu, lorfqu'il l'en- AN N. de voya aux Molucques, & s'il avoit profité des 1523. fautes de Martin Alphonfe de Mello Jufart, qui par fes caprices, fes hauteurs & fon avidi. III Rol té avoit foulevé toute l'Ile de Banda, où il au- D. EDOUARD roit péri, fans les fecours que lui donnerent GOUVER Simon de Sofa & Martin Correa, il auroit été neur. le maître de toutes ces Ifles, dont tous les cœurs étoient pour lui, & il auroit évité bien des malheurs, dont il ne put attribuer la cause qu'à lui-même.

Dans les commencements la Reine de Ternate & le Roi de Tidor n'eurent d'ambition

que pour le gagner: s'il y eut quelque contefte & quelque fujet de déplaifir, ce fut qu'ils difputerent vivement à qui auroit le bonheur d'avoir la Fortereffe fur les terres, & que Britto ayant préferé le port de Ternate, Almansor Roi de Tidor fut auffi mortifié de s'en voir privé, que les Ternatiens eurent de veritable joye d'avoir eu la préference. Almanfor néanmoins quoique peiné intérieurement, n'en prenoit aucun ombrage, & il étoit facile à Britto de maintenir la tranquillité, s'il eût fçu se conduire.

La Reine de Ternate étant fille d'Almanfor, il craignit que cette Princeffe d'intelligence avec fon pere, n'entrât par la fuite des tems dans les mouvements qu'il pourroit caufer, s'il fe reffentoit du mépris qu'on avoit fait de lui,

DE MENESES

AN N. de
J. C.

1523.

ou s'il prenoit envie aux Caftillans de revenir à Tidor, ainfi qu'ils le lui avoient promis. Dans cette penfée il s'unit très-étroitement avec le DON JEAN Cachil d'Aroes, l'un des fils naturels de Bolcife, D. EDOUARD jeune homme ardent & courageux, ami trèsDE MENESES vif des Portugais ; mais qui, fous ces apparen

III. ROI.

GOUVER

NEUR.

ces d'amitié, cachoit une grande ambition, &
tous les deux de concert travaillerent pour
faire ôter la Regence à la Reine. Quelque fur-
prife qu'elle fût de la propofition qui lui fut
faite de la quitter, elle prit néanmoins bien la
chofe, confentit que le Cachil d'Aroes gou-
vernât à fa place, & engagea même les Grands
de l'Etat à l'approuver. La Reine néanmoins
ne laiffa pas
de fentir auffi-bien que les Grands,
le coup qu'on venoit de lui porter. Mais Al-
manfor, que l'intérêt de fa fille touchoit plus
vivement, en fut auffi plus vivement pénétré.

Cachil Mamoll, autre fils naturel de Boleife, qui du vivant de fon pere avoit été envoyé en exil, & fe tenoit dans l'Ile de Gilolo, irrité de ce que le Cachil d'Aroes fon frere étoit oppofé à fon rappel, fe mit du parti des mécontens, travailla fous main à aigrir l'esprit de la Reine & de fes partifans. On prétend même qu'il vint fouvent de nuit à Ternate pour tâcher de tuer fon frere. Soit que ce fût une pure fuppofition que le deffein de cet affaffinat foit qu'en effet il l'eût formé, que le Cachil d'Aroes en eût le vent, qu'il eût résolu de le

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