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1411.

Paris, Frere Jacques le Grant Auguftin, qui le pis confeilloit de tous, & furent excommuniez de la bouche du Saint Pere, tellement qu'ils ne povaient estre abfouls par Preftre nul, ne Prelat, que du S. Pere en article de mort. Et deux ou trois fois devant avoit efté faitte à Paris telle Proceffion & tel Excommuniement fur la faulce Bende. Item, le Jeudi douzieme jour de Nov. audit an, fut mené le faulx 12. Nov. Traitre Colinet de Pisex lui septiefme es Halles de Paris, lui estant en la charrette fur un aiz plus hault que les autres, une Croix de fuft en ses mains, vesftu comme il fut prins, comme ung Preftre, en telle maniere fut mis en l'efchaffault, & depoüillé tout nu, & lui coppa-on la teste à lui fixiefme & le feptiefme fut pendu, car il n'eftoit pas de leur faulce Bende; & ledit Colinet faulx traitre fut defpecé les quatre membres ; & à chascune des maistres Portes de Paris, l'un de fes membres pendus, & fon corps au Gibet, & leurs teftes ès Halles fur fix places, comme faulx Traiftres qu'ils eftoient; car on difoit tout certainement que ledit Colinet par fa faulce & defloyauté trahison, fist dommaige de plus de deux millyons en France, fans plufieurs bonnes gens qui cftoient avec lui, qu'il fift tüer les uns, les autres rançonner, les autres emmener en tel lieu, que on ouy puis nouvelles, puis fift-on mainte Juftice. Cependant alla M. de Guienne & de Bourgongne devant Eftampes, qui eftoit de la Bende, & y furent par plufieurs jours tant que par miner, que par affault, ils fe rendirent au Roy à fa voulenté ; & fut prins le Cappitaine nommé Bourden, lequel fut mesné en prinfon en Flandres, & depuis ot fa paix. Puis refut prins ung autre Chevalier de la Bende, nommé Meffire Mauffartdu Bois, ung des beaux Chevaliers que on peut voir, lequel ot la teste couppée es Halles de Paris, & de fa force de fes efpaules, depuis qu'il ot la tefte couppée, bouta le tronchet fi fort, qu'à pou tint qu'il ne l'abbaty, dont le Bourreau ot tel freour, car il en mourut à tantoft après fix jours, & eftoit nommé Maiftre Guieffroy. Aprés fut Bourel Capeluche fon varlet. Et en ce dit an fut fait Connestable de France le Comte de S. Paul, nommé Meffire Galleren, & alla en la Comté d'Alençon, & là eftoit Meffire Anthoine de Craon, lequel devoit avoir journée au Comte d'Alençon, lequel n'ofa oncques venir: fi s'en revint ledit Conneftable ; & en revenant le cuida détruire le Seigneur de Gaucourt, qui avoit bien en fa compaignie mille hommes d'armes ; mais par la grace de Dieu, ledit, Gaucourt & fes Gens furent defconffiz honteusement, & en furent tüez bien fix cens, & bien cent noyez, & bien cinquante des plus gros prins, mais Gaucour efchappa par fon cheval. En icellui temps, ce firent plufieurs efcarmouches, dont on ne fait nulle mention; car

1412.

6. May.

on ne faifoit rien à droit pour les Traiftres dont le Roy eftoit tout advironné.

En l'an 1412. fixiefme jour de May, fe mift le Roy fur les champs avecques luy son ailné filx, le Duc de Guienne, le Duc de Bourgongne & plufieurs autres, & allerent droit en Aufferre, là furent aucuns jours; delà fe départirent & allerent affieger la Ville de Bourges en Berry, où eftoit le Duc de Berry, ancien de bien prés quatre-vingt ans, Oncle dudit Roy de France, Maiftre & Meniftre de toute traïfon de ladite Bende, cruel contre le menu peuple, en tant que fut oncques Tirant Sarazin, & aux fiens comme aux autres, pourquoy il eftoit affiegé. Et fitoft que ceulx de Paris fceurent que le Roy eltoit en la terre de ses ennemis, par commun confeil, ils ordonnerent les plus piteufes Proceffions, qui oncques cuffent efté yeües de jo. May. aage d'homme. C'est affavoir le penultiefme jour de May audit an, jour de Lundi, firent Proceffion ceulx du Palais de Paris, les Ordres Mandians & autres, tous nuds piez, portant plufieurs Sainctures moult dignes; portant la Saincte vraye Croix du Pallays. Ceulx du Parlement de quelque eftat qu'ils fuffent,tous deux & deux, quelques trente milles perfonnes aprés avecques, tous nuds piez. Le Mardy derrenier 31 May. jour de May ou dit an, partie des Paroiffes de Paris firent Procesfion, & leurs Parroiffiens au tour de leurs Paroiffes, tous les Preftres revestus de chappes ou de fourpeliz, chacun portant un ferge en fa main & Reliques, tous piez nuds, la Chaffe faint Blanchard, de faint Magloire, avecques bien deux cens petits Enfans devant tous piez nuds, chacun cierge ou chandelle en fa main. Tous les Parroiffiens qui avoient puiflance, une torche en leur main, tous piez nuds, fem3. Juin, mes & hommes, Le Mercredy enfuivant premier jour de Juing ou dit an en la forme & maniere du Mardi fut faitte la Proceffion. Le Jeudi enfuivant fut le jour du S. Sacrement, la Proceffion fut faitte, comme on a accouftumé. Le Vendredi enfuivant, troifiefme jour de Juing ou dit an fut faite la plus belle Proceffion, qui oncques fut guere veüe; car touttes les Parroiffes & Ordres de quelque eftat qu'ils fuffent, allerent tous nnds piez, portant (comme devant eft dit ) Saincture ou cierge en habit de dévotion, du commun plus de quarante mille perfonnes avecques, tous nuds piez & à jeun, fans autres. fecrettesabftinences, bien plus de quatre mille torches allumées. En ce point allerent portant les faintes Reliques à faint Jehan en Greve. Là prindrent le precieux Corps noftre Seigneur,que les faulx Juifs bouillirent en grans pleurs, en grans larmes, en grant devocion, & fut livré quatre Evefques, lefquels le porterent dudit Moutiers à fainte Geneyiefye à telle compaignie du peuple commun; car on affermoit que

3. Juin.

ils

ils eftoient plus de cinquante & deux mille. Là chanterent la Grant. Meffe moult devotement, puis rapporterent les faintes Reliques où ils les avoient prinfes à jeun. Le Sabmedy enfuivant quatriesme jour dudit moys audit an, toute l'Univerfité, de quelque eftat qu'il fust fur peine de privation, furent à la Proceffion, & les petits enfens des efcoles, tous nuds piez, chacun un cierge allumé en fa main, auffi- bien le plus grant que le plus petit, & affemblerent en celle humilité aux Mathurins: delà s'en vindrent à fainte Catherine du Val des Efcolliers, portant tant de faintes Reliques, que fans nombre. Là chanterent le Grant Meffe, puis revindrent à cueur jeun. Le Dimenche enfuivant, cinquiefme jour dudit mois ou dit an, vindrent ceulx de faint Denis en France à Paris, tous piez nuds, & apporterent fept Corps faints, la fainete Oriflamble, celle qui fut portée en Flandres, le faint Cloud, la fain&te Couronne, que deux Abbez portoient accompaigniez de treize Bannieres de Proceffion; & à l'encontre d'eulx alla la Parroiffe fain& Huitace pour le corps de faint Huitace qui eftoit l'une defdites Chaffes, & s'en allerent droit au Palays de Paris tous. Là dirent la Grant Meffe en grant devocion, puis s'en allerent. La fepmaine enfuivant tous les jours firent moult piteufes Proceffions chafcun à fon tour, & les villages d'entour Paris femblablement venoient moult devotement, tous nuds piez, priant Dieu que par fa faincte grace, Paix fut reformée entre le Roy & les Seigneurs de France: car par la guerre tout France eftoit moult empirée d'amis & de chevaux ; car on ne trouvoit rien au plain pays, qui ne lui portoit.

Item,le Lundi enfuivant 6 jour dudit moys de Juing au dit an,allerent ceulx de S. Martin des Champs avecques eulx plufieurs Parroiffes de Paris & Bailliages, tous nuds piez,accompaignez comme devant de luminaires & de Reliques à S. Germain des Prez. Là dirent la Grant Messe en grant devocion, & les autres Parroiffes allerent aux Martyrs, & là chanterent la grant Meffe. Et ceulx de fainte Catherine du Val des Escolliers vinrent chanter la grant Meffe à faint Martin des Champs. Item, le Mardi & Mercredi 7. & 8e. jour dudit moys ou dit an fift on Proceffion, les Parroiffiens autour de leurs Parroiffes.

Item, le Jeudi neufviesme jour dudit mois ou dit an, furent plufieurs Parroiffes accompaignées de tres grant peuple d'Eglife, & de commun, tous piez nuds, à grant Reliquaire & luminaire, & en ce point allerent à Boullongne la petite, là firent leur devocion & dirent la Mcffe, puis s'en revindrent.

grant

Item, le Vendredy ensuivant, difiefme jour dudit moys ou dit an fut faitte Proceffion generale une des plus honoranbles que on eust oneques veuë; car touttes les Eglifes, Colleges & Parroiffes y furent

B

1412.

1412.

tous nuds piez, & tant de peuple que fans nombre; car le jour de devant avoit efté commandé que de chacun Hoftel y fut une perfonne; & pour celle devote Proceffion plufieurs Parroiffes des Villaiges d'entour Paris, y vindrent en grant devocion, & de moult loing, comme de plus de quatre groffes lieuës, comme de pardelà Villeneufve faint Georges, de Montgifon & d'autres Villes voifines, & vindrent à toutes les Reliques dont ils porent finer, tous nuds piez, tres anxiens hommes, femmes groffes & petits enffens, chacun un cierge ou chandelle en fa main. Les Sabmedy & Dimenche 11. & 1 2. jours dudit mois ou dit an, on fit Proceffion commune autour des Parroiffes. Le Lundi trefiefme jour dudit moys ou dit an, vindrent ceulx de faint Mor des Foffez, accompaignez de dix-huit Bannieres, des Reliques tres grant foifon, vingt Croix, tous picz nuds, à Noftre Dame de Paris, chanterent la grant Meffe. Le Mardi enfuivant, le 14 jour dudit moys ou dit an, allerent ceulx de Paris en Procession à faint Anthoine des Champs, là dirent la grant Meffe. Le Mercredi enfuivant 15. iour dudit movs ou dit an, fut faite une Proceflion autour des Parroiffes. Le Jeudi enfuivant feiziéme jour dudit moys ou dit an, firent les Parroiffes de Paris, les Proceffions aux Martyrs & à Montmartre, là chanterent la grant Meffe. Le Vendredi enfuivant, allerent à faint Denis en France; c'est assavoir saint Paul & faint Huitasse, les gens tous nuds piez, là dirent la grant Meffe, & tant comme on fist ces Processions, ne fift jour qu'il ne pleust tres fort que les trois premiers jours. Pour vray ceulx de Meaulx vindrent à faint Denis, & de Pontoise & de Gonneffe, & pardelà vinrent à Paris en Proceffion. Le Sabmedi enfuivant, firent ceulx de Chaftellet, tous grans & petiz, Proceffion. Le Dimenche enfuivant Proceffion aux Parroiffes. Let Lundi enfuivant faint Nicolas, fainct Saulveur, faint Laurens allerent à Noftre Dame de Boullongne la petite, en la maniere que dit elt d'avant le Jeudi 9. dudit moys. Tretout le temps que le Roy fut hors de Paris,firent ceulx de Paris & ceux des Villaiges d'entour,Proceffion comme davant eft dit, & alloient chafcun jour par ordre en Proceffion aux Pellerinaiges de Noftre Dame entour Paris, comme au Blancmefnil, comme au Meiche & aux lieux plus renomméz de devocion. Et fut vray que le Sabmedy troifiefme jour dudit moys de Juing, arriva le Roy de France avec fon Oft devant la Cité de Bourges en Berry; & quant ils furent devant, ils affaillirent la Ville moult afprement, & les Arminaz fe d.ffendirent moult fort; mais moult furent grevez: fi demanderent triefves, fi furent données deux heures, non plus. Ung pou avant que les Treves furent faillies, yffirent hors les faulx Traires à grant compaignie, cuidant trayr & four

prendre nos gens qui point ne s'en gardoient; mais l'Avangarde les recula moult afprement, & fi ferirent en eulx fi cruellement, que tous les firent flatir jufqu'aux Portes, & là furent de fi près haftez les Traiftres que le Sire de Gaucourt conduifoit, qu'en la place en demoura plus de fept vint hommes de nom, tous mors & foifon prins, leiquely recogneurent qu'ils cuidoient emmener le Roy par force, & tuer le Duc de Bourgongne; mais Dieu les en garda celle fois, puis pafferent plufieurs jours fans aucun affault. Cependant eulx, ceulx du Chastel de Sanfferre, lefquelx avoient fait moult de grief en l'OM ; car au commancemant du Siege par ceulx là & par autres, pain y eftoit fi cher que ung homme n'euft pas efté faoul de pain à ung refpas pour trois fols Parifis; mais tantoft après, par la grace de Dieu, il vint aflez de vivres, & fi eftoient bien en l'Oft plus de cinquante mille hommes à cheval, fans ceulx de pié qui eftoient en grant foison.

Item, vers la fin de Juillet, quant tout le pouvre commun, & de bonnes Villes & du plat Pays furent tous mengez, les ungs par Tailles, les autres par pillaiges, ils firent tant que ils firent traitter au jeune Duc de Guyenne, qui ainfné filx du Roy eftoit, & qui avoit épouse la fille au Duc de Bourgongne, tant qu'il leur accorda par faux Traiftres privez qui eftoient entour le Roy, qu'il les feroit tous eftre en la bonne paix du Roy : & ainfi le fift-il qui que le voulfift veoir; car chacun estoit moult agrevé de la guerre pour le grand chault qu'il faifoit; car on difoit que d'aage d'homme qui fuft, n'avoit-on veu faire fi grant chault, comme il faifoit, & fi ne plut point depuis la faint Jehan-Baptifte qu'il ne fuft deux jours en Septembre. Si furent les Arminaz fi grevez, qu'ils eftoient comme tous defconfys par tout le Royaulme, quant ce faulx confeil traicté fut ainfi machiné, & fut ordonné qu'ils vendroient tous en la Cité d'Auffoire. En ce temps furent plufieurs communes, comme de Paris, de Roüen & de plufieurs autres bonnes Villes devant eulx. ( ici manque quelque chofe.) & gaignerent tantoft la Ville, & moult tuerent de gens du plain pays, que tous fe rebellerent en tout le pays de Beauffe ; car ils avoient tant de peine & de charge de gens d'armes, qu'ils ne fçavoient aufquelx -obéir, si se tindrent aux Arminaz, qui là eftoient les plus forts pour tems que la malle guerre commença. Et quant lefdites Communes vindrent à Dreux, ils les trouverent fi rebelles, qu'ils les tuerent tous, & les faulx Traisftres Arminaz gens d'armes, qui devoient les fecourir, s'enfoüirent ou Chaftel de ladite Ville, & laifferent tuer les pouvres gens, & puis furent affegez de nos gens de commun fi afprement, qu'ils ne fe povoient plus tenir, quant ung Chevalier qui eftoir

le

1412.

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