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Qu'à quelque Autel l'Erreur ne transforme en

devoir.

M. de la Motte, dans fon Poëme des Apôtres.

IV. REGLE.

Voici une Regle que je n'ai pas trouvé propofée de la forte, quoiqu'elle fe préfente d'abord, n'étant qu'une fuite de ce que nous avons fuppofé au commencement de ce Chapitre touchant la raifon qu'on a euë d'introduire la Cefure dans nos plus grands Vers. Il ne faut que fçavoir comme on lit, & comme on parle, pour s'appercevoir qu'il y a telle liaison entre certaines paroles, qu'on ne les defunit jamais pour reprendre la refpiration, & qu'elles doivent être dites tout d'une haleine, par exemple, l'Adjectif avec fon Substantif, comme un riche naturel, le nom avec fon régime, comme l'attrait de la vertu, la prépofition avec fon cas, comme après cette difgrace. Cela étant fuppofé, il faut prendre pour Régle générale, Que la Cefure eft fanfle toutes les fois qu'en s'y arrêtant, on fera obligé de s'éloigner de la manière naturelle de parler on de Tire. Mais parce que les Vers bien coupez font le principal agrément de la Poëfie, je veux dire plus en particulier ce qui m'est venu fur ce fujet.

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La Cefure ne doit jamais tomber entre la prépofition, & le nom qui s'y rapporte, ni entre les verbes Auxiliaires, & les participes qui y font attachez. Ainfi ces deux Vers d'un excellent Auteur ne font point coupez.

'Agrippine ne s'eft présentée à ma vûë .......

Par quels charines, après tant de travaux foufferts, Peut-il vous inviter à rentrer dans fes fers?

En voici deux autres pour fervir d'exemples:

Enfin la gloire avoit triomphé de l'amour...
Alors le crime étoit accompagné de honte...

Toutefois ce que nous venons de dire touchant l'Auxiliaire & fon Participe, n'a lieu que quand ils fe fuivent immédiatement; car fi l'on met quelque mot entredeux, ils peuvent être féparez d'Hemiftiches, ce qui paroît affez bizarre. Ainfi il feroit aifé de rétablir la Cefure dans les deux derniers Vers, en difant

La gloire avoit enfin triomphé de l'amour. Le crime étoit alors accompagné de honte...

VI. REGLE.

On ne doit point placer de fuite en différens Hemiftiches le Subftantif & le Genitif, qui en eft régi, comme dans ce Vers de Moliere.

Sçais-tu qu'on n'acquiert rien de bon à me fâcher?

Ni le Subftantif & fon Adjectif, comme dans celui-ci, qui eft du même Auteur. Mais on voit des rapports admirables par fois. Parmi fon train comptant plus de valets, Que Tranfalpins Princes n'ont de Sujets. Sarafin.

Ni enfin le Verbe & le Cas qu'il régit, comme dans cet autre qui eft de Benserade.

Un Berger nourriffoit fon chien de brebis mortes...

le

Si pourtant ce qu'on a réservé pour fecond Hemiftiche, le remplit tout entier, avec le fecours de quelque Epithéte, ou Attribut, toutes ces feparations font per miles & reçues ; comme

Le redoutable attrait d'un plaifir défendu ...
Une prospérité capable d'éblouir...

Le fage qui connoît le prix de la Vertu ...

le

C'eft auffi contre l'exactitude de féparer d'Hemiftiche deux Adjectifs qui fe rapportent à un même Subftantif, à moins que dernier Attribut ne falle tout feul la moitié du Vers, comme nous avons dit. Ainfi dans ces deux Vers de Defpreaux.

Ses Chanoines vermeils, & brillans de santé.
S'engreffoient d'une fainte molle oy fiveté.

La Celure du premier eft réguliere fans contredit, celle du fecond peut être contestée.

VII. REG LE.

On doit éviter d'enjamber du premier Hemiftiche au fecond je veux dire, que fi on porte un fens au delà de la moitié du Vers, il ne faut pas l'interrompre avant la fin, parce qu'alors le Vers fembleroit avoir deux Cefures, ce qui feroit defagreable. Le premier de ces deux Vers, que nous avons déja rapportez ailleurs, auroit ce défaut, fi le ftile en étoit ferieux.

Et s'habillant-en homme,fous le linge
Le finge aufli ne paffa que pour finge.

VIII. REGLE.

On a déja vû dans la premiere Partie,

Chap. I. les raifons que l'on a de rejetter la rime des deux Hemiftiches, comme dans ce Vers qui eft d'un illuftre Ecrivain.

Vous feriez bien, & moi, je fais ce que je doi : Votre exemple n'eft pas une régle pour moi.

On ajoûte premiérement que non-feulement la Rime franche dans les Hemiftiches, #rend le Vers défectueux, mais auffi ce qui en approche beaucoup, comme

Ici tout m'importune, & le trouble où je fuis Dans le bon-heur d'autrui trouve un furcroît d'ennuis.

Secondement, que les Hemiftiches des Vers qui fe fuivent immédiatement, ne doivent pas rimer entr'eux. C'eft ce qu'il y a à redire dans ces deux Vers de Godeau qui reffemblent mieux à un Quatrain qu'à un Diftique.

Si la

grace à ton cœur ', par fa clarté célefte,' N'eut découvert l'horreur de ce piége funefte.

C'est encore ce qui a échapé à l'Auteur de l'Agamemnon.

Cet empire odieux deshonoré cent fois

Par la haine des Dieux & les crimes des Rois.

Troiliémement,

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