deffeins; il fait que vous le détestez fous tous ces rapports, & que, s'il ne vous prévenoit pas par fes hoftilités, il deviendroit la victime de votre jufte vengeance. C'eft pourquoi il eft fans ceffe en mouvement, épiant l'occafion favorable de vous attaquer, & profitant de la partialité aveugle des Thébains & des Péloponésiens; car, fi ces peuples n'étoient pas véritablement prévenus & féduits, ils appercevroient le but fatal de la politique Macédoniene. Je parlai un jour, à ce fujet, devant les Meffeniens & les Argiens; mon difcours, qui fut inutile pour eux, ne fera peut-être pas inutile pour vous dans ce moment. Peuples d'Argos & de Mefsène! vous vous rappelez le temps où Philippe flattoit les Olynthiens comme il vous flatte maintenant : croyezvous que ce peuple n'eût pas été hautement offenfé fi quelqu'un eût déclamé contre le bienfaiteur qui leur avoit généreufement cédé Anthémus & Potidée? Si quelqu'un les eût averti de fe défier des artifices de Philippe, l'auroientils écouté? Cependant, après avoir joui un moment du territoire de leurs voifins, ils furent dépouillés du leur propre. Leur chûte fut honteufe; a Pendant son ambassade dans le Péloponèse, mentionnée plus haut. ils ne furent même pas conquis, mais trahis & vendus par leurs concitoyens. Regardez, d'un autre côté, les Theffaliens: lorfque Philippe chaffa leurs tyrans, les Theffaliens pouvoient-ils conjecturer que ce même prince les foumettroit à des partifans de la Macédoine, plus tyrans & plus barbares encore? Lorsqu'il les fit rétablir dans le confeil amphyctionique, auroient-ils pu s'imaginer qu'il les priveroit un jour du maniement de leurs propres revenus? Quant à vous, Mefféniens & Argiens, vous avez vu Philippe vous fouriant & vous trompant; mais veuille le ciel que vous ne le voyiez jamais infultant, menaçant & détruifant. Les peuples ont inventé plufieurs moyens de défense, les murs, les remparts, les crénaux qui ont été élevés par le travail de l'homme, & maintenus par des dépenses & des peines continuelles; mais il y a un boulevard commun dont la prudence feule fait faire ufage, quoiqu'il foit également utile à tous, fpécialement aux cités libres contre les tyrans? Quel eft-il? La défiance. Rappellez-vous ce moyen; employez-le; confervez-le foigneufement, & il ne vous arrivera aucun malheur a». Démosthènes lut alors à l'affemblée la minute a Demofth. Orat. 2, in Philipp.. a دو d'une réponse qu'il confeilla de donner aux ambaffadeurs, & qui étoit entièrement favorable aux Lacédémoniens. Il exhorta en même temps fes compatriotes à délibérer avec fermeté, mais avec fang-froid, fur les moyens par lefquels ils pouvoient réfifter à l'ennemi commun; " ennemi avec lequel il les avoit exhorté à maintenir la paix auffi long-temps que cela paroiffoit poffible; mais la paix n'étoit plus en leur pouvoir. Philippe développoit graduellement fon vaste systême d'ambition, en démembrant leurs poffeffions, en débauchant leurs alliés, en entamant leur pouvoir de toutes parts, afin de parvenir, avec le temps, à attaquer le centre, & le réduire fans obftacle ». Si l'orateur fe fût arrêté là, fon avis auroit pu être fuivi d'une réfolution falutaire. Mais en déclamant contre les ufurpations & Philocra de la Macédoine, fon reffentiment s'irrita naturellement contre Philocrates, Afchines & leurs Afchines tes font ac cufés. adhérens, dont les intrigues & les machinations dans leur ville, que de marcher vers le Péloponèfe. On ne parla plus dans la cité que d'accufations & de jugemens: Philocrates fut banni, & Æfchines n'échappa au même fort qu'en prouvant que fon accufateur Timarchus étoit un homme de mauvaises mœurs b. Pendant ce temps-là Philippe, qui n'étoit ni Philippe ararrêté ni obfervé par les ennemis, faifoit voile, range les afavec une puissante flotte, vers le cap Ténare, loponèle. promontoire le plus méridional de la Laconie. Y étant débarqué fans obftacle, il fut joint par les Mefféniens, les Arcadiens & les Argiens. L'armée combinée, après avoir ravagé les meilleurs cantons du territoire Lacédémonien, affiégea & prit Trinafus, place maritime très-forte & très - importante. La terreur que ces fuccès occafionnèrent parmi les Spartiates, fut augmentée par des météores extraordinaires, dont la rougeur fembloit préfager quelque calamité affreuse ©. L'alarme fut fi générale, qu'on a cru devoir rapporter le propos d'un jeune Spartiate, qui reftoit calme au milieu de la confternation publique. Quelqu'un lui ayant demandé, « s'il a Efchin. in Ctesiphon. Argum. in Æschin. Orat. in Timarch. Plin. Hift. Nat. 1. e, ch. 36. رو » n'étoit pas effrayé de Philippe ? Pourquoi le craindrois-je, répliqua le jeune homme peut-il nous empêcher de mourir pour notre patrie a». Mais cette réfolution généreuse n'anima pas long-temps les Spartiates. Incapables de fe préfenter à l'ennemi en pleine campagne, ils envoyèrent Agis, fils du roi Archidamus, pour propofer des conditions d'accommodement, ou plutôt pour foumettre leur fort à la difcrétion des Macédoniens. Le jeune prince étant arrivé feul, Philippe marqua fa furprise. «Quoi, دو dit-il, les Spartiates n'ont envoyé qu'un seul » homme? Ne fuis-je pas envoyé à un feul? » répondit fierement Agis . Cette réponse fut le dernier mot de l'orgueil spartiate; car le roi de Macédoine, quoique fon intention ne fût pas de porter au défelpoir des hommes dont la vertu dégénérée pouvoit encore être animée par les inftitutions de Licurgue & l'exemple de Léonidas, les força de résigner leur autorité prétendue fur Argos, Mefsène & l'Arcadie, & il fixa les limites de ces républiques d'une manière conforme aux defirs de ses confédérés. Avant de quitter le Péloponèfe, il renouvella folemnellement |