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L'amiral

avoit été forcé, difoit-il, contre fon inclination.
Il affectoit de confidérer Diopeithes comme l'inf-
trument d'une faction mal intentionnée, con-
duite par Démosthènes, plutôt que pour le
général de la république; & comme ce comman-
dant étoit inexcufable en pillant les Cardiens,
peuple étroitement allié avec la Macédoine, Phi-
lippe ofoit croire que le fénat & le peuple ne
défapprouveroit pas qu'il eût repouffé cette vio-
lence & défendu la vie & les biens de fes
confédérés.

Tandis que les Athéniens & Philippe étoient
Macédonien ainfi en correspondance de lettres, les premiers

faifit un con

voi Athé- envoyèrent vingt vaiffeaux chargés de bled aux

nien, deftiné

pour Selym- Sélymbriens. Léodamas, qui commandoit ce

brie.

convoi, femble avoir cru que le traité fubfiftant
précédemment entre les deux puiffances, le ga-
rantiroit de toute infulte; mais il fe trompa grof-
fièrement fur ce point: fa flotte fut entourée &
prise par Amyntas, qui commandoit les forces
navales de la Macédoine, & qui réfolut de garder
fa prife, fans avoir aucun égard aux plaintes &
aux remontrances de Léodamas, lequel préten-
doit que le convoi n'étoit pas destiné pour Selym-
brie, mais employé à transporter le fuperflu des
denrées de la Cherfonèfe dans l'ifle ftérile de
Lemnos.

Les

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rend les vaif

une lettre

aux Athé

Olymp.

C. 341

Les nouvelles de cette prife occafionnèrent Philippe beaucoup de tumulte & d'inquiétude parmi les feaux captu-. Athéniens. Après de fréquentes délibérations furrés, & ecrit ce fujet, ils réfolurent d'envoyer des ambaffa- artificieuse deurs à Philippe, pour redemander leurs vaif- niens, feaux, & pour exiger qu'Amyntas, s'il avoit CIX. 4. A excédé fes inftructions, fût puni févèrement. Céphifophon, Démocritus & Polycrates, quifurent nommés pour cette commiffion, fe rendirent fans délai auprès de Philippe, qui, à leur requête, relâcha fur le champ les vaiffeaux cap. turés, & renvoya les Athéniens avec la lettre fuivante: "Philippe, roi de Macédoine, au sénat & au peuple d'Athènes, falut. J'ai reçu trois de vos citoyens, en qualité d'ambaffadeurs, qui ont conféré avec moi fur la reddition de certains vaiffeaux commandés par Léodamas. Je ne puis qu'admirer votre fimplicité en croyant me perfuader que ces vaiffeaux alloient transporter des bleds de la Cherfonèse dans l'ifle de Lemnos, & qu'ils n'étoient pas destinés pour les Selymbriens que j'affiège actuellement, & qui ne font, en aucune maniere, compris dans le traité de paix entre Athènes & la Macédoine. Léodamas n'a certainement point reçu cette injufte commission du peuple d'Athènes, mais de certains magistrats & d'autres perfonnes en place, qui font trop Tome VI.

D

Démosthè

occupés à vous preffer de violer vos engagemens, & de commencer des hoftilités contre moi; objet qu'ils ont encore plus à cœur que de fecourir Selymbrie, s'imaginant férieufement qu'ils peuvent tirer un grand avantage de cette rupture. Profondément perfuadé que notre intérêt mutuel nous oblige de faire échouer leurs dangereux projets, j'ai donné ordre de relâcher les vaiffeaux capturés; & vous, en retour, éloignez ces confeillers pernicieux de l'administration de vos affaires, & qu'ils éprouvent la févérité de votre justice : de mon côté, je ferai enforte de garder inviolableinent le traité par lequel nous fommes réciproquement engagés a „.

Les fentimens d'amitié & de modération, exnesperfuade primés dans cette lettre, donnèrent un grand niens de fe- avantage aux partisans de Philippe à Athènes. courir les Mais Démosthènes & Léon de Byzance n'épar

aux Athé

villes affié

Thrace.

gées dans la gnèrent aucun foin pour dévoiler & expofer les artifices & la duplicité de Philippe, qui employoit ce ton humble & pacifique, pendant fes opérations contre les cités de la Propontide, afin d'étouffer le reffentiment des Athéniens au moment où ils pourroient agir avec un avantage réel & affuré. Démosthènes rappella, dans des

* Epift. Philipp. in Demofth.

difcours vigoureux & bien travaillés, fes obfervations précédentes & fes premiers raifonnemens, & il convainquit fes compatriotes de la néceffité d'aller une fois au-devant de l'ennemi & de prévenir fes deffeins, en accordant un fecours prompt & effectif à leurs freres de Périnthe, de Sélymbrie & de Byzance. Le pouvoir de fon éloquence influa fur tous les confeils publics, & les anima d'un degré d'énergie & d'enthoufiafme qu'on n'avoit point vu depuis long-temps, & qui produisit un retour paffager de fuccès & de fplendeur.

déshonoran

. Il fut réfolu, par le fénat & le peuple, de Expédition mettre en mer une flotte de cent vingt galères; te de Charès. mais malheureusement le commandement en fut donné à Charès, que fon caractère rendoit auffi méprifable aux yeux de l'ennemi que redoutable aux alliés de la république. Les Byzantins l'exclurent de leur port, & il fut défait par Amyntas, amiral Macédonien, vis-à-vis le rivage de Chalcédoine. Ce défaftre, qui avoit été occafionné, en grande partie, par l'incapacité de Charès, obligea les Athéniens de jetter les yeux fur Phocion, qui, quoique toujours prêt à fervir fa

a

Orat. 4. in Philipp. & Orat. de Epift. Philipp.

b Plutarq. in Phocion.

Tentative

patrie, n'étoit appellé ordinairement que dans les temps de détreffe & de danger.

.

Avant que Phocion arrivât dans la Propontide, infructueufe Philippe, enflé de fon fuccès fur mer, fit une

de Philippe

fur Byzance. tentative fur Byzance. Cette ville étoit environnée

de la mer de trois côtés, &, de l'autre, défendue par une forte muraille, & par une tranchée large & profonde, couverte de tours élevées, féparées l'une de l'autre à de petits intervalles. Les habitans de Byfance, fe confiant à la force de la place, & à l'abondance de leurs munitions, ne voulurent point rifquer une fortie, & laissèrent Philippe faire fes approches vers leurs murailles. Le roi de Macédoine, voyant l'inaction des Byzantins, fit avancer fes batteries, & parut déterminé à donner un affaut; mais en même temps il fe ménageoit l'occafion de prendre la place par furprise. Pour exécuter ce deffein, il choifit l'obfcurité d'une nuit orageufe: une troupe déterminée de Macédoniens paffa le foffé; les échelles pour efcalader les murs étoient déja plantées, lorfque les fentinelles de Byzance furent alarmées par l'aboiement des gros chiens qu'on tenoit dans les tours, même en temps de paix, pour les garder pendant la nuit. L'alarme se répandit sur le champ parmi tous les gardes, qui, fortant tumultueusement de leurs ftations refpectives, comme fi l'en

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