Imágenes de páginas
PDF
EPUB

privation; & quand elle n'en connoît point, elle s'humilie, & marche avec courage fous la conduite de la foi. Elle ne fe décourage point de ce que Dieu ne lui accorde pas l'effet de fes prieres. II lui fuffit de favoir que Dieu veut qu'elle le prie jusqu'à la mort, & elle s'applique à accomplir en ce point fa volonté. Au lieu de s'inquiéter de fes imperfections, elle pense efficacement, mais tranquilement à les corriger, réfolue de fouffrir tous les retardemens de Dieu, & d'être foumise à tous les ordres.

XII. Mais comme il fe gliffe de l'illufion par tout, il faut prendre garde qu'on pourroit auffi fort abufer de cette égalité d'efprit, & de cette prétendue vie de foi, fi on la portoit jufques à ne fe mettre nullement en peine de fes fautes, & de la privation de ferveur, lors même que l'on y donne occafion par une vie molle, relâchée & diffipée, & fi fous prétexte qu'il ne faut pas chercher d'affurance dans cette vie, on négligeoit de faire attention aux doutes raifonnables que l'on a fujet de former fur fon état, & que l'on ne se 2. Petr. mît pas en peine d'affuver fa vocation par les bonnes œuvres. Dieu veut au contraire qu'on cherche toutes les affurances que l'on peut trouver: mais avec deux conditions; l'une qu'on les cherche fans in

1. 10.

quiétude & avec tranquilité; l'autre, que lorfqu'on a fait de bonne foi ce que l'on peut pour allurer fon falut, on fouffre avec paix l'incertitude qui refte. Mais ce n'eft qu'après avoir fait tout ce qui eft poffible felon la foi, qu'il faut se mettre dans ce repos. Car face repos empêchoic E de travailler, & étoufoit des doutes légitimes, ce feroit un repos d'illufion qui ne viendroit pas de la lumiere, mais plu tôt de l'obscurciffement ou de l'extinction de la foi.

SUR L'EPITRE

DUII DIMANCHE

D'APRÈS

PASQUE

M

[blocks in formation]

CHRIST a fouffert pour nous, vous laiffant un exemple afin que vous marchiez fur fes pas, lui qui n'avoit commis aucun peché, & de la bouche

ཝཱ

des

duquel il n'ejt jamais forti aucune pa role de tromperie. Quand on l'a chargé d'injures, il n'a point répondu par injures: quand on l'a maltraité, il n'a point fait de menaces; mais il s'eft livré entre les mains de celui qui le jugeoit injuftement. C'est lui-même qui a porté nos pechés dans fon corps fur la croix, afin qu'étant morts au peché, nous vivions à la justice. C'est par fes meurtriffures & par fes playes que vous avez été guéris: car vous étiez comme des brebis égarées; mais maintenant vous êtes retournés au Pasteur & à l'Evêque de vos ames.

EXPLICATION

1.Nne fait pas d'ordinaire affez de réflexion fur les paroles de cette Epitre, qui marquent aux Chrétiens leur Vocation dans toute fon étendue. Ona comprend bien qu'ils font appelés au Royaume de Dieu, & à en être coheritiers avec Jefus Chrift. Mais on ne conçoit pas de même qu'ils foient appelés à imiter Jefus-Chrift, & principalement dans fes fouffrances. Les hommes voudroient bien féparer ces deux choses; jouir dans l'autre vie de la félicité du ciel,

[ocr errors]

fans paffer dans celle-ci par les maux de la terre, & fans fe priver d'aucun de ses biens. Mais faint Pierre nous montre que cette pensée n'eft pas raifonnable. Nous fommes à la verité appelés aux biens du ciel, mais par les maux de ce monde. Ainfi notre vocation a deux parties effencielles; l'une d'être appelés à la participation de la récompenfe de Jefus-Chrift; & l'autre d'être appelés à marcher fur fes v. 11. pas, & à fuivres les traces de fes fouffrances. CHRISTUS paffus eft pro nobis, vobis relinquens exemplum, ut fequamini veftigia E ejus. Ne nous y trompons donc pas. Le ciel nous eft à la verité promis, mais il he l'eft qu'à cette condition: Pourvu, dit Rom. 8. PApôtre, que nous fouffrions avec Jesus- '7• Chrift, afin que nous foiyons glorifiés avec lui: Si tamen compatimur, ut & conglorifice mur. Qui renonce à la condition, renonce à la promeffe, & ne doit pas s'étonner qu'on le prive de la récompenfe qu'on y avoit attachée, puifqu'il refufe d'en accomplir la condition.

de

0:

al

[merged small][ocr errors]

II. A quoi donc, dira-t-on, fe réduit cette obligation indifpenfable de fouffrir? Eft-ce qu'on eft obligé de fe procurer des maladies, de se réduire à la pauvreté, de s'attirer des exils & des difgraces? Eft ce là ce qu'emporte cette obligation d'imiter Jefus-Chrift à laquelle nous fommes ap

pelés? Non. Jefus-Chrift lui-même n'eft pas allé à la croix fans qu'on l'y ait mené. Il fuffit à cet égard d'avoir dans le cœur deux difpofitions. La premiere eft de marcher inviolablement dans la voie de la juftice, de ne s'en écarter jamais, de quelques maux qu'on foit menacé, & de rendre témoignage à la verité toutes les fois qu'on le doit. Or on ne fauroi marcher dans cette difpofition fans s'attirer des difgraces, & souvent fans fe perdre dans le monde. Et ces maux mêmes font d'autant plus grans & plus fréquens, qu'on eft dans un état plus élevé. Car comme il est très-difficile de fe maintenir dans les places éminentes, fans déguiser la verité & fans abandonner la juttice en certaines occafions: quiconque elt résolu de ne plier jamais fous aucune injustice, ne fauroit guere éviter ce qu'on appelle ruine & renversement de fortune d'une maniere ou d'une autre. Que fi ces exemples font rares, c'eft qu'il n'y a rien de plus rare que la réfolution inébranlable de ne confentir jamais à aucune injuftice. Car l'efprit humain a mille adrefles pour fe difpenfer de fouffrir & pour fe perfua der qu'il fouffriroit inutilement, & qu'ainfi il n'y eft pas obligé.

III. La feconde partie de cette difpofi tion eft de ne pas regarder comme des

« AnteriorContinuar »