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vrage du Créateur forme un tout où écla tent également la puiffance, la fagesse, la bonté fouveraine de l'auteur.

Mais parmi tant d'êtres vivans que Dieu raffafie chaque jour, il n'en voit point qui lui rende grâces avec connoiffance, ni qui lui faffe l'offrande libre du cœur. De fa main il va former un animal plus faint que tous les autres. Il le doue non-feulement de la vie & du fentiment, mais de la raifon & de la liberté. En lui réfidera le domaine des biens répandus fur la terre : il en jouira fous la feule condition d'en rendre hommage au Maître fuprême. Ce fut le dernier Ouvrage de Dieu, après lequel il fe repofa en lui-même pour jamais.

Telle est la manière dont Moïse confacre la croyance des premiers hommes, fur l'auteur & la naiffance du Monde. Voilà les faits & les dogmes: Un feul & unique principe infiniment fage, bon, puissant, déterminé par fon feul choix, tire le Monde du néant par le fimple vœu de fa penfée, & fait commencer ensemble la ma

tiere & les temps. Tout eft beau, tout est bien dans l'ouvrage, parce que l'Auteur eft fage, qu'il eft bon, qu'il peut tout. Si dans la fuite il s'y rencontre quelque vice, le même Hiftorien en montre l'origine dans l'abus que quelques-unes de fes créatures ont fait d'une faculté, qui ne leur avoit été donnée que pour ajouter du prix à leur obéiflance, & faire des préfens gratuits du Bienfaiteur fuprême, un titre de gloire & de récompenfe. Moïfe s'arrêtelà. Il n'entreprend point d'expliquer le fecret de chacune des opérations de Dieu, ni de dire le comment & le pourquoi. Il ne difcute point la nature de la matière, de l'efprit, de la fubftance; il ne cherche ni dans le plein ni dans le vuide les caufes fecrettes du mouvement. Il n'eût tenu qu'à lui de fe livrer aux conjectures & aux raifonnemens fur ces objets : il en avoit eu le loifir pendant les quarante ans qu'il paffa en Arabie, à la tête des troupeaux de Jéthro. Il avoit le génie, les connoiffances de fon temps, l'imagination, l'expreffion

mais il eût cru dégrader la majesté de fon fujet, s'il eût mêlé dans fon récit fes propres pensées. Son filence fur tout ce qui a piqué depuis fi vivement la curiofité humaine, eft une preuve de la profondeur de fes vues. Nous fommes reftés, quoiqu'on en dife, en ce qui concerne les Caufes premieres, au point où il nous a laiffés ; & fi ce n'eft pas lui qui a pofé les limites, au moins nous les a-t-il montrées. Toutes les courfes que l'efprit humain a voulu faire au-delà, ont été en pure perte; on le verra par la fuite de cette Hi toire.

ARTICLE III.

Penfées des Chaldéens fur les Caufes premieres.

ou LA LUMIERE ET LES TENEBRES.

CEUX des enfans de Noé qu'un fort heureux laiffa dans la Méfopotamie, n'eurent pas besoin de beaucoup de temps pour y affermir leur établissement. En defcendant de l'arche, ils n'eurent qu'à ufer des arts qui en defcendirent avec

eux.

Parmi les différentes familles qui se porterent fur différens objets de besoin ou d'utilité, felon le goût ou le génie de leurs chefs, il y en eut qui fe dévouèrent d'une façon fpéciale à l'étude des chofes faintes. Leur piété ayant attiré l'attention publiils obtinrent des Rois de Babylone que, des priviléges & une demeure à part, dans le voifinage de cette capitale, en tirant vers le golfe Perfique & l'Arabie défer

te (1). C'est-là qu'ils furent connus dès la plus haute antiquité fous le nom de Chaldéens. On prétend que ce fut d'une de leurs villes, de Ur Chaldæorum, qu'Abraham partit pour fuivre la voix de Dieu, qui l'appeloit dans la terre de Chanaan.

L'Hiftoire facrée & profane s'accordent à regarder les Chaldéens comme les plus anciens des Philofophes. Doués de fagacité & de génie (2), placés fous le plus beau ciel du monde, & dans le fol le plus fer

(1) Strab. L. 15.

(2) Cic. de Div. 2. 41. Les Chaldéens, dit Hefychius, étoient des efpeces de Mages qui poffédoient toutes les sciences. Ils s'appliquoient fur-tout à l'Aftronomie, &y firent tant de progrès, qu'ils parvinrent par leurs obfervations, à décider, comme Stobée nous l'apprend, «Que les cometes font des étoiles ou planetes qui fe cachent pendant quelque tems, parce qu'elles font trèséloignées de nous, &

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qui reparoiffent quand elles defcendent vers »nous; & qu'elles ne » femblent s'évanouir » que parce qu'elles re» tournent dans leurs ré»gions, dans les profon» deurs de l'Ether, com» me les poiffons dars le » fond des mers». Eclog. Phyf. 63. Si on jugeoit des Chaldéens par cet échantillon, ils auroient été non-feulement les plus anciens, mais les plus judicieux & les plus profonds des Philofophes..

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