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ARTICLE IV.

Dogmes des Perfes fur les Caufes premieres. (1)

ou ORO MAZE ET ARIMANE.

LES Philofophes de cette nation se nom

moient Mages; nom qu'on a donné auffi quelquefois aux Chaldéens, quoique moins proprement. Ce mot fignifioit, favant, prêtre, théologien ; parceque les Mages étoient à la fois philofophes, théologiens, facrificateurs. Ils étoient fi refpectés chez les Perfes, que nul roi ne pouvoit monter fur le trône, fans avoir auparavant pris leurs leçons. (2) Lorsque le prince destiné à regner avoit atteint l'âge de quatorze

(1) Le pays des Perfes s'étendoit à l'orient de la Chaldée, le long du golfe Perfique, & s'alongeoit vers le feptentrion, à des distances qui ont varié

felon les temps.

(2) Rex Perfarum non poterat effe, qui non ante magorum difciplinam fcientiamque percepiffet. Cic de Div. I. 41.

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ans, on lui donnoit quatre maîtres ; le plus fage de l'empire, le plus jufte, le plus fobre, & le plus brave. Le premier lui enfeignoit la magie de Zoroaftre (1), c'est-à-dire, ce qui concernoit les Dieux, leur culte, & les principes de l'art de gouverner. Que lui enfeignoit-il fur le premier article, qui eft ici notre feul objet?

Les Mages, felon Diogene Laërce, (2) reconnoiffoient deux principes; l'un bon, qu'ils appeloient Oromaze, & l'autre mauvais, Arimane. Plutarque leur attribue la même doctrine dans fon Traité d'Ifis & Ofiris (3), où il prouve, par l'énumération, que les Sages de tous les pays ont connu deux principes, ou, comme dit Amiot, deux Dieux de métier contraire; & que chez les Perfes, le bon étoit Oromaze, & le mauvais, Arimane. Cependant entre ces deux noms, on en trouve un troisieme,

(1) Plat. Alcib. (2) L. L. feg. 8.

(3) Pag. 369. D.

Ca

Mithras, qu'on traduit ordinairemenr par celui de médiateur.

Avant que d'examiner quelle étoit la nature de ces Dieux & leurs fonctions dans l'Univers, il eft néceffaire de s'accorder fur leur nombre, & de favoir fi Mithras, Oromaze & Arimane étoient effectivement trois principes féparés; ou fi Mithras & Oromaze n'en faifoient qu'un; de maniere que l'un des deux ne fût qu'une émanation, un écoulement de l'autre.

Les deux Auteurs qu'on vient de citer, femblent nous mettre fur la voie, lorsqu'ils font entrer les Perses dans la liste de ceux qui n'admetoient que deux principes. Il falloit donc que Mithras & Oromaze n'en fiffent qu'un. Lequel des deux étoit principe de l'autre? Mithras, fans doute. Plutarque, en commençant le récit de la Fable mystique des Perfes, nous dit qu'Oromaze & Arimane font nés, l'un de la Lumiere la plus pure, l'autre, des Ténebres. Puifqu'il n'y a chez les Perfes, que deux Dieux, qu'on dit être nés tous deux,

& qué d'un autre côté, on ne dit point que Mithras foit né, il s'enfuit évidemment que Mithras ne peut être que le principe ou le pere d'Oromaze.

Selon Hefychius, Mithras étoit le premier des Dieux chez les Perfes (1). Mihr, felon quelques Interprêtes, fignifie grand, maître unique. On cite une inscription où Mithras eft nommé le Dieu invincible: Deo foli invicto Mithra. (2) Il y en a une autre qui le fait tout-puiffant: Omnipotenti Deo Mithra. (3) De ces autorités, auxquelles on pourroit en joindre un grand nombre d'autres, on peut conclure que Mithras étoit chez les anciens Perfes > ce que la Lumiere incréée étoit chez les Chaldéens, & Dieu chez les Hébreux.

Quand on dira que ces infcriptions font en l'honneur du Soleil, il n'en résultera point de conféquence contraire à celle que nous tirons, puifque rien n'empêche que le Soleil ne foit devenu avec le temps,

(1) Οι πρώτο.
(2) Ezech. Spanheim

ad Jul. Cæf. pag. 144.

(3) Grut. p. 34. 1, 6.

dans l'efprit des Perfes, ce Dieu fuprême & unique.

L'Écriture fainte ne nous dit-elle pas que Dieu a placé fon trône dans le foleil? Il étoit affez naturel que d'un aftre fi éclatant, d'où part une action fr forte, qui donne le mouvement & la vie à l'Univers, des peuples, qui d'ailleurs n'avoient point de préservatifs contre les fens, en fiffent la Divinité même, & qu'ils adreffaffent leurs vœux à celui qui voyoit tout, qui entendoit tout. (1) Qu'importe dans quel lieu les Perfes aient placé ce Dieu, dans les étoiles, dans l'éther, ou ailleurs? Il nous fuffit qu'ils l'aient reconnu, comme premier & fuprême. C'étoit par ce Dieu que juroit Cyrus : Dieu de mes peres, Dieu trèshaut! (2) C'étoit celui que Xénophon appelle le grand Dieu des Perfes, par excellence. (3) Celui que Porphyre, parlant d'après Eubulus, felon l'opinion des mêmes Perses, nomme l'Auteur & le Pere du

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