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7. Les corps, qui compofent les tas, les liqueurs & les maffes, ne font pas par tout fi prés les uns des autres, qu'ils ne laiffent quelques intervalles en divers endroits.

Lors qu'on apperçoit ces intervalles, on les appelle Trous. Et, quand on ne les apperçoit pas, on les appelle Pores.

8. Il n'est pas necessaire que ces intervalles foient remplis; & l'on peut concevoir qu'il n'y ait aucun corps entre des corps, qui ne fe touchent pas.

De dire qu'on ne peut concevoir ces intervalles fans étendue, & que par confequent il y a des corps qui les rempliffent, cela n'eft point veritable. Et bien que l'on puiffe dire qu'entre deux corps, qui ne fe touchent pas, on pourroit mettre d'autres corps de la longueur de tant de pieds, on ne doit pas con clure qu'il y en ait pour cela. On doit feulement dire qu'ils font fituez de forte qu'on pourroit placer entr'eux des corps, qui joints ensemble compoferoient une étenduë de tant de pieds. Ainfi l'on conçoit feulement qu'on y pourroit placer des corps: mais on ne conçoit pas pour cela qu'ils y foient. Et, comme nous pourrions avoir l'idée de plufieurs corps, encore qu'il n'y en eût aucun; nous pouvons aussi concevoir qu'on en pourroit mettre quelques-uns entre des corps, entre lefquels il n'y en a point encore. Quelques-uns foûtiennent que, fi tous les corps qui rempliffent un vase, étoient détruits, les bords du vase seroient reünis. J'avoue que je n'entends pas

ce raisonnement; & je ne puis concevoir ce que fait un corps à la fubfiftance de l'autre. Il pourroit bien être que les corps qui entourent le vase, pouffans fes bords, le brifaffent, s'ils n'étoient fouftenus au dedans par d'autres corps. Mais de dire que, dés qu'on auroit ofté tous les corps du dedans, les bords fe deuffent raprocher, fans que rien pouffaft ces mesmes bords, & de faire un argument contre le vuide par cette fuppofition, j'avoue, fi c'eft un bon argument, que je n'en connois pas la force; & je crois voir tres clairement que deux corps pourroient subsister, fi loin l'un de l'autre, qu'on en pourroit mettre entre eux un tres-grand nombre, ou n'y en mettre aucun, fans que cela les raprochast ny reculast.

9. Comme les figures des corps font fort diverses, leur rencontre fait que les portions perceptibles ou im perceptibles, qu'ils compofent, peuvent être de tres-differentes figures,

10. Mais, comme entre les corps plufieurs font de même figure, il y a auffi bien des portions, qui font de figures femblables.

11. Même plufieurs corps de differentes figures mêlez en nombre égal & de même façon, peuvent faire differentes portions toutes de même figure, & ayant les mêmes proprietez; & ce qui refulte de l'affemblage de ces portions, eft ce qu'on appelle une telle matiere, ou, fi vous voulez, matière seconde.

Tellement que la matiere premiere peut être bien définie (fuivant ce qui a été dit) un affemblage de corps: & l'on voit que chaque corps eft une partie de cette matiere premiere.

De même la matiere feconde feroit bien définie, un affemblage de plufieurs portions de même nature; & chacune de ces portions eft une veritable partie de cette matiere feconde.

Et, parce que chaque portion d'une certaine nature peut être jointe à quelque portion d'une autre nature, dont il refultera une troifiéme forte de portions, on voit que plufieurs de ces dernieres portions compoferoient une matiere que l'on pourroit appeller matiere troifiéme; & ces portions mixtes feroient les veritables parties de cette matiere troifiéme, qui seroit mixte des deux autres.

De la même façon les chofes peuvent aller d'une troisième à une quatrième nature; & pour garder un ordre qui rende ces changemens intelligibles, les portions en quoy fe refout d'abord chaque matiere, doivent être appellées les parties de cette matiere.

Il faut remarquer qu'autant qu'on a pû connoître ces differens états, on leur a donné des noms; & cela a été fort à propos. Mais il a été fort mal à propos de feindre qu'à chaque mutation il arrive un nouvel être, qu'on appelle qualité ou forme. Ce n'est pas que ces mots ne foient propres à exprimer le different arrangement des parties de la matiere, mais ils ne peuvent raisonnablement fignifier autre chose.

16

DES CORPS ET DE LA MATIERE. 12. Il n'y a que les effets, qui nous puiffent faire juger des differentes figures, que peuvent avoir les differentes parties de chaque matiere.

:

Ainfi, quand on propose une maffe ou quelque liqueur, dont les parties ne fe peuvent difcerner, on doit examiner quels en font les effets enfuite on doit confiderer quelles figures font les plus propres à produire de tels effets; & l'on doit croire qu'on a bien fuppofé la figure des parties qui compofent une maffe, ou une liqueur, quand on en affigne une, qui peut rendre raifon de tous leurs effets.

DU

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Qu'il n'arrive aucun changement en la matiere, qu'on ne puiffe expliquer par

le Mouvement local.

II. DISCOURS.

Our le monde demeure d'accord qu'il n'y a rien de fi contraire au Mouvement, que le Repos.

Or il eft certain que, quand on dit qu'un corps est en repos, on n'entend autre chose, finon que ce corps eft toûjours en même fituation.

Ainfi, fuivant la regle des contraires, quand on parle du mouvement d'un corps, on ne doit entendre autre chose, sinon que ce corps est transporté de forte qu'il ne demeure pas un feul moment en une même fituation.

C

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