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certain arrangement la forme de pain, a paffé, lors que fes mêmes parties ont été plus divifées, & autrement ajustées les unes aux autres, en une liqueur, à qui dans ce nouvel arrangement on a affigné une autre forme. Enfin, on a pû observer que cette même liqueur, dont toutes les gouttes paroiffoient uniformes, quand fes particules étoient bien mêlées, n'étoit pourtant pas compofée de parties toutes femblables, puisque la diversité de leur figure & de leur groffeur, leur a donné moyen de passer par des endroits fi differens, & de former en l'un de la chair, en l'autre de la graiffe, en un autre des cheveux, & en un autre une autre chofe; en forte qu'aucune de toutes ces parcelles n'eft perie: mais a tellement chan gé fa figure, fa fituation & son mouvement, qu'à voir ce qu'elle eft en l'homme, on a peine à croire ce qu'elle a été dans le pain. Et cela arrive, parce qu'ordinairement on ne suit pas assez exactement dans son progrés la cause du changement de chaque particule; & ne confiderant pas que c'eft par le mouvement qu'elle paffe peu à peu d'un état en l'autre, on vient tout à coup à confiderer celuy où elle a été autrefois, & celuy où l'on la voit pour lors, comme deux chofes fi étrangement differentes, qu'on s'imagine que ce changement doit avoir une cause toute autre le mouvement; & pour l'afligner, on dit qu'il y a nouvelle forme.

que

Au refte, il feroit facile, en fuivant toûjours ces petites particules, que j'ay laiffées en differens endroits de nos membres, d'expliquer pourquoy, leurs

E

DURE-
POS.

mouvemens étant trop grands, elles fortent du corps fans s'y arrêter, de maniere qu'il en devient prefque fec. Je pourrois auffi expliquer quelle eft la figure des parties qui font la graiffe; comment, faute d'un affez grand mouvement, ou pour être trop abondantes, elles s'embarraffent; comment enfuite elles s'épuifent. Et enfin, quel eft le cours different des particules, que les arteres pouffent hors d'elles, fuivant la difference des âges, des lieux, & des faifons. Mais je pafferois les bornes, que je me fuis prescrites; & il me fuffit d'avoir tenté d'expliquer tous les mouve mens qui nous font connus, par une feule définition, ou (ce qui eft la même chose) de montrer que tous les mouvemens font d'une même efpece, & que c'eft plûtôt la diverfité de leurs degrez, ou de leurs effets fenfibles, que la difference de leur nature, qu'on a voulu marquer, quand on leur a donné, tantôt le nom de mouvement local, ou changement de lieu, & tantôt celuy de changement de quantité, de qualité, ou 'de forme.

Le même fe doit dire du Repos: car, tant qu'une masse demeurera appliquée aux mêmes parties des corps environnans, on appellera cet état un repos de Lieu.

Que fi, les parties de cette masse étant un peu en mouvement, on ne voit point que pour cela elles fe quittent, ni qu'elles admettent entr'elles aucune nouvelle partic, qui leur foir femblable, on dira qu'elle n'augmente ni ne diminuë; & cet état s'appellera un repos de quantité.

Enfuite, tant qu'on verra que les parties de cette même masse garderont toûjours affez d'une certaine fituation, pour produire toûjours un certain effet fur nos fens, quoyque d'ailleurs elles fe meuvent, on nommera cet état un repos de qualité.

Et enfin, tant qu'il luy reftera affez de cet arrangement de parties, auquel on fait consister sa nature particuliere; on appellera cet état le repos de forme.

Donc, fi une maffe demeure en même état, c'eft que fes parties n'ont point changé leur fituation; & fi cette maffe change d'état, c'est parce que les parties. ne font plus en même fituation.

DES

C

MACHINES NATURELLES

ET ARTIFICIELLES.

Qu'elles n'ont toutes qu'une même caufe de leur mouvement. Et quelle eft cette cause, à ne confiderer que les corps.

III: DISCOURS.

Our ce que nous admirons dans les ouvrages de l'Art, ou de la Nature, eft un pur effet du mouvement & de l'arrangement, qui, felon leurs diverfitez, font que les chofes font propres à differens usages. Mais, afin que nous puifhons connoître cela par des exemples, je pense n'en pouvoir choisir qui nous puiffent mieux convaincre, que la Montre & le Corps de l'homme.

On eft affez perfuadé que l'arrangement des parties d'une Montre eft la caufe de tous fes effets : & foit qu'elle marque les heures, foit qu'elle les fonne; foit qu'elle défigne les jours, les mois, & les années;

ou qu'elle fasse des chofes encore plus difficiles & plus rares; on ne cherche point de forme, de faculte, de vertus occultés, ni de qualite en elle. On affure même, qu'elle n'est point animée, parce que l'on peut rendre raifon de tout ce qu'elle fait, par le mouvement & la figure de fes parties...

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Ce n'eft pas toutefois qu'il y ait d'argument pour montrer qu'elle n'a point d'ame; & à peine pourroit-on convaincre un homme, qui pour prouver qu'elle auroit une faculté, une ame, ou une forme, diroit, que fi tôt que fes diverfes parties font ajustées d'une certaine façon, ce qui doit l'animer, s'y introduit, par la regle: Difpofitionem habenti non denegatur forma. Qui eft une loy, que certaines gens tiennent fi infaillible, que celuy qui s'étoit flatté de difpofer une maffe comme le corps d'un homme, efperoit que l'ame ne manqueroit pas à fa machine; & il en étoit fi perfuadé, que quand il fe propofoit de la faire, il ne difoit pas qu'il feroit un corps femblable au nôtre, il difoit tout franc qu'il feroit un homme

comme nous.

A un tel Philofophe, il feroit bien difficile de per-, fuader qu'une Montre n'eût point d'ame, s'il s'avifoit de foûtenir qu'elle en eût. Mais à des gens raifonnables, & qui fçavent qu'il ne faut pas multiplier les êtres fans neceffité, il fuffit, pour croire qu'elle n'en a point, de voir que tout ce qu'elle fait, fe peut expliquer par le corps.

Comme je fuppofe que chacun fçait quelle eft la compofition d'une Montre, & que l'on en connoît

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