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voir offrir la premiere partie de cet Ouvrage parce que m'étant propofé dans le commencement, de faire confiderer à chacun ce qu'il eft, il me fembloit que VOTRE MAJESTE devoit trouver en cette confideration plus de plaifir que tous les autres hommes.

Fay les mêmes raifons de luy prefenter encore celle-cy, où je traite,non plus de la connoif fance de foy-même, mais du moyen de connoitre les autres, & d'en être connu. Je fais voir que ce moyen eft la Parole: j'en explique tous les effets; & pour en mieux découvrir les causes, je recherche avec foin tout ce qu'elle emprunte du Corps, ou de l'Ame.

Ces caufes, SIRE, font fi belles en VOTRE MAJESTE', que vous aurez fans doute une incroyable fatisfaction à les examiner: fur tout, je fuis perfuadé que vous en aurez plus que perfonne, à confiderer les effets de la Parole Vous verrez que c'est elle qui produit ce que vous aimez le plus, je veux dire la gloire; & vous reconnoître que vous luy devez cet éclat, qui fait briller VOTRE MAJESTE' audeffus de toutes les Puiffances de la Terre. C'est par elle, SIRE, que vous expliquez ces genereufes penfees, qui vont toutes à notre felicité, & c'est par elle que vous avez achevez ces gran

des chofes qui font dire à toutes les Nations', que vous êtes le plus grand Prince qui fut ja

mais.

Je fçay bien, SIRE, qu'on n'admire pas moins en VOTRE MAJESTE, le рольт voir qu' Elle a de fe taire, que la facilité qu'Elle a de parler: je fçay, dis-je, que le pouvoir qu'Elle a de fe taire, eft une des raisons qui font tant parler d'Elle. Mais je fçay bien auffi que le fecret, tout favorable qu'il eft aux grands def feins,ne fçauroit feul les faire réuffir, & que fi VOTRE MAJESTE' s'en eft utilement fervie dans tous les projets qu'Elle a faits pour notre bonheur, jamais Elle n'en auroit obtenu l'execution, fi Elle n'avoit employé la Parole. Il a falu donner des ordres pour cela. Veritablement, SIRE, Vous les fçavez donner en Prince, qui na befoin que de foy-même pour mediter pour refoudre. Vous fçavez, feul, pourquoy Vous les donnez, & ceux qui les reçoivent, ne connoiffent fouvent la belle fin,queVOTRE MAJESTE' se propose, que dans le moment qui la fait réuffir. Que la gloire eft belle, quand on fe la doit toute entiere! que celle de VOTRE MAJESTE' me paroît pure! D'autres qui n'ont que la puiffance en partage, s'entendent louer de cent évenemens, où leur con

&

duite n'a point de part : on trouve toujours pour eux des paroles. Mais toutes les actions de VOTRE MAJESTE' font tellement au deffus de ce qu'on en peut dire, que ceux à qui la louange coûte le moins, fe plaignent de n'en pouvoir trouver pour les exprimer. Tel a demandé dix années, pour écrire ce qu'on Vous a vû faire en dix jours; & tel qui fçait qu'on a moins de peine à comparer les Heros, qu'à faire leur Eloge, en a voulu chercher de femblables à V OTRE MAJESTE', qui n'en a pû rencontrer parmy tous ceux que l'Antiquité nous propofe.

En effet, SIRE, l'on n'en connoît point de qui les paffions n'ayent conduit toutes les entreprifes. On a vu celuy que les fiecles paffek ont le plus vanté, ne fuivre que les mouvemens de fon ambition; & fans confiderer le repos de fes Sujets, porter le trouble dans toute l'Afie. Au lieu, SIRE, que toute l'Europe Vous a vû jeune & victorieux, faire grace vos ennemis, pour donner la Paix à vos Peuples, maintenant encore elle voit que VOTRE MAJESTE' ne veut de tout un grand Pays ouvert à fes Conquêtes, que ce qu'elle a droit d'y pretendre. Cet te moderation, SIRE, eft la plus grande vertu des Rois, & fur tout elle eft admirable en

à

un Prince affez vigilant,pour furprendre l'ennenemy dans une faifon, où les plus ardens à la guerre quittent ce penible exercice, & affez brave, pour executer luy-même, ce que les plus bardis n'oferoient confeiller. Qui pourroit, SIRE, avec ces qualitez arrêterVOTRE MAJESTE', fi le droit de bien-feance Lapouvoit tenter? Mais fes Voifins fe doivent raẞurer: l'ambition ne l'a point armée, & c'eft des mains de la Justice qu'elle tient cette épée, qui foûmet les Provinces en moins de temps qu'il n'en faut pour les parcourir. Le Brabant & le Henaut en peuvent rendre témoignage au reste de la Terre.. VOTRE MAJESTE leur a fait connoître fes droits, avant que de leur faire éprouver la force de fes armes, & l'on fait que leur témérité eft la feule caufe de ces grands Exploits, que l'Hiftoire ne pourra jamais affe dignement celebrer, 5 pour qui la Poefie même, qui fe vante de parler comme les Dieux, avoue qu'elle n'a point d'expreffions.

Mais, SIRE, quand la Poëfie ne peut expliquer les effets furprenans de vôtre Courage, trouvez bon que la Philofophie en reprenne l'excés, & qu'avec cette liberté qui luy eft oxdinaire, elle Vous reproche d'avoir expofe votre Perfonne Sacrée, comme celle d'un fimple

Soldat. Ce reproche feroit la gloire de tout autre Prince: mais Vous, SIRE, comment auroit-on

pû Vous excufer à la pofterité ? fi ce grand Cœur, qui ne Vous eft donné que pour foutenir le deftin de la France, Vous avoit fait perir dans cette occafion. On ne peut affe louer cette ardeur,qui vous fait quitter les plaifirs au milieu de l'hyver: mais toute noble qu'elle eft, on la doit blamer, quand elle vous fait chercher le perils, & qu'elle expofe contre des Sujets rebelles, une vie fi précieuse à tant d'autres Sujets fideles. Ecoutez, SIRE, celle qui vous parle ainfi. Elle a toûjours aimé les Rois: elle n'en a jamais flatté; & comme elle n'en connoît point de plus grand que Vous, elle ne peut dans le temps qu'elle veut expliquer ce que c'eft que la Parole, en faire un usage plus utile à tout le monde, qu'en vous difant ce que vous devez à vôtre confervation. Fajoûteray, SIRE, qu'ayant à s'expliquer fur ce fujet par la bouche d'un homme, elle n'en pouvoit choisir un, dont le zele fût égal au mien. Je fuis avec un profond respect,

SIRE,

De VÔTRE MAJESTE',

Le trés-humble, trés-obéïffant; & trés-fidele ferviteur & sujet, DE CORDEMOY,

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