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de nouveaux mouvemens fans luy.

D'ailleurs, il est évident qu'il laiffe à nos ames la détermination toute libre de leur volonté. J'ofe même avancer ( & la chofe paroîtra manifeste à tout hommme de bon fens, qui la voudra confiderer avec attention)que comme le corps eft une fubstance à qui l'étendue convient de forte, qu'il cefferoit d'être corps, s'il ceffoit d'être étendu ; de même l'efprit eft une fubftance,à qui le pouvoir de fe déterminer de foy-même convient fi naturellement, qu'il cefferoit d'être efprit ?

s'il ceffoit de vouloir.

Dieu l'a fait ainsi, pour en être aimé. Ce qui paroit fi évidemment que, quand il ne l'auroit pas déclaré par tant de témoignages miraculeux de fa tendreffe, qui va jufqu'à nous demander nôtre cœur, c'est-à-dire nôtre amour; nous dévrions être trés-perfuadez qu'il a voulu être l'objet de nôtre volonté dés ce monde, par cette feule confideration, qu'il n'y a point d'objet fi grand,qu'elle ne puiffe em

braffer.

Quant au pouvoir de connoître, peut-être ne nous l'a-t'il pas donné auffi grand, du moins en ce monde. Mais il eft certain que nous avons affez de connoiffance, pour ne pouvoir manquer, fi nous usons bien de nos lumieres, & du pouvoir que nous avons de ne juger de rien, qu'après l'avoir bien connu. Car enfin, Dieu nous donne toutes les lumieres dont nous avons befoin. Nous avons des idées trés-diftinЄtes, pour connoître les chofes de la nature, autant qu'il eft utile de les connoître, puifque nous pou❤

vons, lors que nous ufons de prudence, difcerner en quoy chacune nous eft utile ou dommageable. Et, quoy qu'il ne nous donne pas l'avantage de connoître ce que font ces choses, cependant il nous dé- * C'est-àcouvre fi bien en quoy elles nous peuvent nuire ou eft la figu profiter, que pour en bien ufer, nous n'avons qu'à vouloir.

dire, quelle

le la

Pour celles qui font audeffus de la nature, bien qu'elles furpaffent infiniment nôtre connoiffance; neanmoins nous avons des notions fort distinctes, des raisons pour lesquelles nous ne fçaurions les concevoir, & de celles qui nous obligent à les croire. Car,fi d'un côté dans ce que la foy nous enfeigne, il fe trouve des chofes audeffus de nos lumieres naturelles; nous avons d'ailleurs des marques trés-évidentés de l'obligation, où nous fommes de foûmettre nôtre efprit à l'autorité qui nous les propose, & de prendre tout ce qui nous vient de cette part pour des veritez infaillibles, ou pour des notions, que nous tenons de la Grace, & defquelles, auffi bien que de celles que nous tenons de la nature, nous pouvons tirer toutes les conclufions, qui peuvent fervir à regler nôtre croyance, & là conduite de nôtre vie. Si bien que nous fommes coupables, lors que par précipitation ou par opiniâtreté, nous nous écartons de ces regles.

Mais,fans m'appliquer à la consideration de touLes les grandes veritez, qu'on pourroit déduire de ce Discours, je pense le devoir finir, puisque j'ay

re, fituation, ou le mouvement de leurs

parties in

fenfibles.

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confideré toutes les diverfes manieres, dont les pensées fe peuvent communiquer, qui eft proprement ce qu'on appelle parler; & ce que je m'étois proposé d'examiner,

LETTRE

ÉCRITE

A U

R. P. COSSART

DE LA COMPAGNIE

DE JE S US,
JESUS,

POUR MONTRER

Que tout ce que Monfieur Defcartes à écrit du Systême du Monde, & de l'ame des Bêtes, femble être tiré du premier Chapitre de la Genese.

M

ON REVEREND PERE

Je fçay bien que Moïfe n'a pas écrit la Genese, dans le deffein d'expliquer aux hommes les fecrets

de la Nature: mais je fçay bien auffi, qu'étant infpiré de Dieu comme il l'étoit, il ne luy a pas été poffible de rien dire touchant la formation de cet Univers, qui ne foit veritable. Ainfi j'eftime que, pour trouver les principes d'une Phyfique infaillible, il ne ne les faut chercher que dans l'hiftoire qu'il nous a donnée de la création du Monde; ou du moins, qu'on doit regarder comme faux, tout ce qui fe dit de la nature, quand il ne peut convenir avec les cir

conftances de cette hiftoire.

Ne vous étonnez donc pas, fi je vous renvoye si fouvent à la Genese, & fi je défere tant aux principes de Monfieur Descartes. La plûpart de fes fentimens font fi conformes à ce que Moïfe a dit, qu'il femble n'être devenu Philofophe que par la lecture de ce Prophéte. Mais, afin que vous connoiffiez plus aifément combien il y a de rapport entre l'Ecriture & fa Philofophie, j'ay deffein de vous expliquer le premier Chapitre de la Genese à la lettre; & vous verrez que pour cela, je vous diray prefque les mêmes chofes, que je vous difois dernierement, en vous expofant les principes de Monfieur Def

cartes.

La feule difference que vous y trouverez, c'eft que Monfieur Defcartes écrit les chofes plus particulierement, & dans le deffein de les faire connoîure en elles-mêmes : au lieu que Moïfe écrit comme un hiftorien, qui ne parle de la Nature, qu'autant qu'il le faut, pour nous faire admirer la puiffance de fon Auteur. Ainfi, l'un ne dit que les principales

chofes,

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