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voulez garder à vos rois la foi que vous leur avez promife, qui loin de trahir vôtre peuple & vôtre clergé, avez horreur de ces crimes: foyez favorable à ceux qui obéiffent à Dieu, plûtôt qu'aux hommes. On dit qu'Arnoul étant évêque n'a dû être jugé que par le pape: mais aprés fa confeffion les évêques ont dû le depofer, fuivant le concile de Nicée, & cela quand même fa confeffion feroit fauffe, puisqu'il feroit au moins coupable de faux témoignage contre lui-même.

Quant à ceux qui alleguoient le pardon du roi pour la défense d'Arnoul: Gerbert leur répond, que le pouvoir des rois ne s'étend pas fur les ames, mais celui des évêques, aufquels il appartient de lier & delier : c'està dire d'imposer les peines fpirituelles, comme la depofition & l'excommunication. Ainfi la grace des rois ne donnoit pas à Arnoul la remiffion de fes pechez, & il ne s'étoit rendu que trop coupable depuis,par fes parjures & fes facrileges. Gerbert finit en priant Vilderode de ne pas ajoûter foi aux calomnies, dont on le charge, d'avoir ufurpé le fiege de Reims & fait prendre Arnoul. Au contraire il le prie de le juftifier auprés des évêques & auprés de fon roi, c'est-à-dire Rodolfe III. roi de la haute Bourgogne.

p. 139.

p. 143.

743. poft conc.

Le roi Hugues écrivit au pape fur le même fujet en Tom. 9. cone p. ces termes : Nous vous avons écrit mes évêques & moi Rem. infi. par l'archidiacre de Reims, pour vous expliquer l'affaire d'Arnoul. Nous ajoûtons ceci, pour vous prier, de me faire justice à moi & aux miens; & ne pas recevoir pour certain, ce qui ne l'eft pas. Nous n'avons rien fait contre vôtre fainteté. Si vous voulez vous en éclaircir en presence, vous pouvez venir à Grenoble, qui eft aux confins de l'Italie & de la Gaule, & où les

XXX IV. Fin de S. Mayeul de Clugny.

Ben. p. 780.c.s.

633.

papes ont accoûtumé de venir trouver les rois de Frarce. Mais fi vous voulez venir chez nous, nous vous recevrons avec grand honneur, & vous traiterons de même pendant le fejour & le retour.

Vers le même tems le roi Hugues pria faint Mayeul abbé de Clugny, pour lequel il avoit une veneration finguliere, de venir reformer l'abbaye de faint Denis. Il y avoit au moins trois ans que le faint abbé s'étoit Mabill. fac. s. donné un coadjuteur. Car fe fentant chargé d'années & d'infirmitez: il eut le même foin que fes predeceffeurs, de prevenir la vacance de l'abbaye, en faisant éliMabill. elog. S. re fon fucceffeur de fon vivant. Il choifit Odilon né Odil. fac. 6. p. en Auvergne, de la famille des feigneurs de Mercœur. Visa.ibid. p.681. Dés fon enfance il fut mis dans le clergé de faint Julien de Brioude : mais étant arrivé à un âge plus meur, il fut touché d'un grand defir de quitter le monde ; & faint Mayeul étant venu en Auvergne, on lui amena ce jeune homme, dont il conçût de grandes efperances. Dés lors ils fe lierent d'une telle affection, que peu de tems aprés Odilon quitta Brioude, & vint à Clugny prendre l'habit monaftique. Il fit fi promptement de figrands progrés dans la perfection, que faint Mayeul le jugea digne de lui fucceder. Ce fut vers l'an 991. comme il paroît par plufieurs chartes des années fuivantes, où il eft nommé comme abbé. L'acte de fon To. 6. Spicil. p. élection est semblable à celui de S. Mayeul, & marque la refistance que l'on craignoit de la part d'Odilon. Cet acte eft foufcrit par faint Mayeul, puis par Rodolfe roi de Bourgogne, par Bouchard archevêque de Lion, Hugues évêque de Geneve, Henri de Laufanne, Hugues de Mâcon, Vaultier d'Autun, & quelques autres prelats ou feigneurs, & cent foixante & dix-fept moines:

425.

tant

tant étoit nombreuse la communauté de Clugni. Cet AN. 294. usage de faire aflifter aux élections des abbez tant de perfones conftituées en dignité, avoit quelque fondement dans la regle de faint Benoît, & fervoit à rendre ces actes plus autentiques. Saint Mayeul ne laissa pas d'être regardé comme abbé jusques à sa mort, ce qui paroît par plufieurs chartes.

Loin de fe relâcher dans fa vicilleffe, il s'excitoit à vita. c. 19. fervir Dieu avec une nouvelle ferveur. Deux ans avant fa mort, fentant diminuer fes forces, il ne vouloit plus paroître en public, & le tenoit enfermé dans le monaftere, ou dans quelqu'une des maisons qui en dépendoient. Là il ne laiffoit pas de donner aux freres des avis falutaires; mais il s'occupoit principalement à la priere ou à la lecture, fouvent il pleuroit quand il penfoit aux hommes fpirituels qu'il avoit connus, qui faifoient fleurir la religion, & combatoient vigoureufement pour la défense de l'églife. Par ce fouvenir il fe trouvoit deftitué de toute confolation en ce monde, & defiroit plus ardemment d'être avec J. C. Il étoit en cet état quand le roi Hugues le preffa de venir à faint Denis ; & quoiqu'il fentît fa fin tres-proche, il ne laissa pas de fe mettre en chemin, croyant ne pouvoir mieux achever fa courfe, que dans une fi bonne œuvre. Mais étant en Auvergne à un monaftere de fon ordre, nommé alors Silviniac aujourd'hui Souvigny à deux lieuës de Moulins, & du diocefe de Clermont, il fut attaqué d'une maladie qu'il jugea mortelle ; & mourut tranquillement le vendredi lendemain de l'Afcenfion onziéme de Mai l'an 994. aprés avoir gouverné l'abbaye de Clugni quarante & un an. Il y fut enterré dans l'é- sup. liv. LV. m. glife de faint Pierre, le roi Hugues affista à ses fune

Tome XII.

Oo

36.

railles, & fit de grands prefens à fon tombeau, où il fe fit quantité de miracles: depuis on y dreffa un autel, Martyr. R. 11. & on leva le corps. L'églife honore fa memoire le jour

Maj.

X X X V. Monafteres re

Mayeul.

Elog.c. 6.p.773. 6.9. p. 785.

de fa mort.

-ce,

:

Saint Mayeul fervit utilement l'églife, par le grand formez par s nombre de fes difciples & des monafteres où il rétablit l'obfervance ; & ce fut pour cet effet qu'il profita de l'amitié des princes & des feigneurs. Car il fut cheri particulierement de l'empereur Otton, de l'imperatrice Adelaide & d'Otton II. leur fils de Conrard roi de Bourgogne frere de cette imperatrice & de Mathilde fa femme: de Henri duc de Bourgogne, de Guillaume duc d'Aquitaine & de Richard duc de Normandie: des princes d'Italie, de Guillaume duc de Proven& d'Archembauld feigneur de Bourbon bienfacteur de Souvigny. L'empereur Otton le grand mit fous la difpofition de faint Mayeul les monafteres qui lui étoient foumis comme royaux, tant en Italie qu'en Germanie. En Italie, il reforma le monaftere de faint Apollinaire prés de Ravenne, celui du Ciel-d'or prés de Pavie & de faint Paul à Rome. En France, il rétablit l'abfervance à Marmoutier, à faint Germain d'Auxerre, à faint Benigne de Dijon, à Fefcam, à faint Maur des foffez. Ses quatre principaux difciples furent Odidon fon fucceffeur, Guillaume de Dijon, Teuton de faint Maur & Heldric d'Auxerre. Ce dernier ayant vê-cu à la cour du grand Otton en Italie, quitta sa fem-me & fes grands biens, pour fe rendre moine à Clugni; enfuite Henri duc de Bourgogne frere de Hugues Capet donna à faint Mayeul l'abbaye de faint Germain d'Auxerre, qui depuis long-tems étoit fans abbé, gouverné par des prevôts. L'ayant reformée, il y mit Hel

dric pour abbé l'an 989. fa vertu le fit aimer cherement du duc Henri & de Hebert évêque d'Auxerre fon frere, fils naturel de Hugues le grand.

Ce fut auffi Bouchard comte de Paris, qui procura la reforme du monaftere de S. Maur. Mainard qui en étoit alors abbé, étoit un homme de qualité, qui me- vita Burch.com. noit une vie tres feculiere. Il étoit fort adonné à la chaffe, & quand il fortoit, il quittoit l'habit monaftique, pour prendre des fourures de grand prix, & un riche habillement de tête. Ses moines fuivoient fon exemple. Un d'eux toutefois nommé Adic, touché de ce fcandale, alla fecretement trouver le comte Bouchard, & le pria d'y remedier: le comte s'adressa auroi Hugues, & lui demanda cette abbaye, qui étoit royale, feulement pour la reformer. L'ayant obtenuë il alla à Clugni, & pria inftament S. Mayeul de venir rétablir ce monaftere. Le faint abbé lui répondit : Vous avez dans vôtre royaume tant de monasteres, que n'y cherchez-vous le fecours que vous defirez, plûtôt que de venir chercher fi loin des inconnus comme nous? C'est que Clugni étoit dans le royaume de Bourgogne, & que la difference des dominations rendoit le commerce difficile.

Saint Mayeul toutefois fe laiffa vaincre aux instances du comte, qui fe jetta plufieurs fois à fes pieds, & enfin il le fuivit avec les plus parfaits de fes moines. Quand ils furent arrivez fur la Marne prés de S. Maur, le com te ordonna à toute la communauté de le venir trouver au de-là de la riviere : ils obéirent fans fe douter de rien, & il leur dit, que ceux, qui vouloient demeurer avec l'abbé Mayeul, & fe foumettre à lui, pouvoient retourner au monaftere : mais que ceux qui le refuse

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