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huitième fiècle parut un autre Zozime, auffi Chimifte, qui écrivit fur la compofition des eaux, fur les inftrumens & les fourneaux de Chimie, fur la vertu & l'interprétation, fur 800 ans l'art facré & divin: tous écrits dont le ftyle de l'Ere eft obfcur, mystérieux, & par conféquent ininchrétienne. telligible. Cet homme ne vouloit point fans

900 ans

doute qu'on l'entendît; & fi telle étoit fon intention, il étoit bien bon de fe fatiguer par la compofition d'ouvrages qui ne pouvoient être d'aucune utilité!

Quoique tous les gens fenfés méprifaffent hautement cette façon d'écrire, les fucceffeurs de Zozime dans la culture de la Chimie, c'est-à-dire, les Sinefes, les Alfard, les Calid, &c., ne s'exprimèrent pas plus clairement. Ce qu'on put deviner à force de méditations, c'eft qu'ils divifoient la Chimie en deux parties: favoir en l'art de préparer les métaux & de les rendre malléables, & en celui de découvrir un remède univerfel.

Ce langage obscur & énigmatique nuisit de l'Ere beaucoup aux progrès de la Chimie. Ce ne chrétienne. fut que que dans le neuvième fiècle qu'on écrivit pour être lu. Le célèbre Geber, qui a fait connoître aux François les dix caractères de l'arithmétique, dont on fe fert dans les calculs, travailla beaucoup fur la nature, la fufion & la malléabilité des métaux, & fur les fels. Il fit part au Public de fes connoiffances par des ouvrages où il rend compte de fes recherches & de fes découvertes avec affez de netteté. C'est peut-être le premier Chimiste qui ait parlé de l'eau-forte.

De fi heureux fuccès auroient dû piquer la

curiofité des hommes qui penfent: cependant trois fiècles s'écoulèrent fans qu'on fongeât à la Chimie. A la fin, Roger Bacon qui fit des découvertes dans presque toutes les Sciences, connut l'effet du nitre, du foufre & du charbon mêlés ensemble, fans s'affurer de fa découverte par l'expérience, laquelle ne fut faite que long-temps après lui par un cordelier, nommé

Bartholde Schward. Mais fon fucceffeur dans l'étude de la Chimie fit des progrès étonnans en cette Science à laquelle il s'attacha uniquement c'eft Arnauld de Villeneuve.

Ce Savant trouva l'esprit-de-vin, les eaux de fenteur & l'huile de thérébentine. Il eut un disciple qui gâta les travaux de fon maître au lieu de les améliorer, en donnant une ame aux métaux, fans favoir ce que c'étoit que cette ame. Ce disciple eft Raimond Lulle.

Un Bénédictin, fi connu fous le nom de Bafile Valentin, fuivit véritablement les traces d'Arnaud de Villeneuve. Il établit trois principes de Chimie, le fel, le foufre & le mercure, & fit conoître le fel volatil huileux.

Deux frères qui étoient Hollandois, & qu'on nommoit Ifaac, cultivèrent la Chimie avec plus de fuccès encore. Ils conftruifirent d'abord de nouveaux fourneaux, imaginèrent de nouveaux inftrumens, & avec ces fecours perfectionnèrent l'art de la diftillation, celui de la fufion & de la préparation des métaux, & firent un grand nombre d'expériences fur le fang. On dit même qu'ils firent du fang avec du plomb & de mercure mais cela n'eft pas croyable. Ce n'eft que dans le grand laboratoire du corps humain que le chyle ou les alimens

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digérés peuvent devenir fang, & on fait aujour d'hui que quand cette liqueur fort de fon lieu, elle fe décompofe à l'inftant.

Ce furent fans doute les travaux de ces Chimiftes fur le fang humain qui engagèrent Paracelfe à chercher dans la Chimie des remèdes pour guérir les maladies des hommes, & pour prolonger même le cours de leur vie beaucoup au-delà du terme ordinaire. Ses fuccès furent tels qu'il fit plufieurs guérifons furprenantes, & attaqua fur-tout, avec un grand avantage, par des préparations de mercure, les maladies vénériennes qui commençoient alors à faire beaucoup de ravage, & que les Médecins ne pouvoient extirper.

Encouragé par ce fuccès, il ofa ambitionner la découverte d'un moyen capable de rendre l'homme immortel. Après avoir établi qu'il eft un esprit univerfel qui anime tous les êtres, il chercha à extraire cet esprit des plantes; & lorsqu'il crut l'avoir trouvé, il ne douta point qu'il ne pût revivifier l'homme, le rajeunir & le renouveler, Cet esprit étoit une liqueur qu'il donnoit à boire mais les effets ne répondirent pas à ces faftueufes promeffes.

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Elles firent néanmoins beaucoup de partifans à Paracelfe; & plufieurs Chimistes, entre autres les Freres de la Rofe-Croix, Espagnet, & Beaufoleil, perdirent leur temps, leur peine & leur argent pour enchérir fur ces folies. D'autres plus fages, tels que Tachenius, Lefevre, Glafer, &c. s'occupèrent à chercher comme Paralcelfe, des médicamens dans la Chimie; de forte qu'il y eut deux claffes de Chimiftes. Les uns appliquèrent, fi lon peut parler ainsi, cette

fcience à l'art de guérir; les autres fe fervirent de fes principes pour perfectionner les arts. Ils améliorèrent les moyens d'allier, de dif foudre & de purifier les métaux; compofèrent des verres, des criftaux, des émaux; préparèrent des couleurs de toutes les nuances, & les appliquèrent fur les corps.

Toutes ces découvertes n'étoient dues, à la vérité, qu'au hafard & au tâtonnement. Ce n'étoit point la théorie qui guidoit ces espèces de Chimistes, mais une pratique aveugle. Les arts, dit l'Auteur du Dictionnaire de Chimie, étoient exercés féparément par des gens qui ne connoiffoient que ce qui étoit relatif à leur objet. Les différentes parties de la Chimie exiftoient, ajoute cet Auteur, mais la Chimie n'exiftoit point encore.

Agricola entreprit de connoître, de développer les pratiques des ouvriers qui cultivoient différentes parties de la Chimie, fans être Chimiftes; & pour mettre de l'ordre dans fon entreprise, il s'attacha d'abord à la partie de cette Science qu'on appelle la Métallurgie. Il inventa plufieurs fourneaux, outils & inftrumens pour la fonte des mines. Comme dans la décompofition des corps on a besoin de différens degrés de chaleur, 'depuis la plus foible jusqu'à la plus violente, & que leur construction contribue à procurer ces différens degrés de chaleur, on a imaginé une infinité de fourneaux qu'on peut réduire à quatre fortes: favoir au fourneau fimple qui n'eft guères différent du fourneau de cuifine; au fourneau de lampe dans lequel la chaleur eft produire & entretenue par la flamme d'une lampe; au

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fourneau à reverbère dans lequel le feu circule; réfléchit & reverbère, d'où lui vient ce nom enfin au fourneau de fufion, qui eft destiné à produire le plus grand degré de chaleur poffible fans le fecours des foufflets. A cette fin la construction de ce fourneau eft telle qu'il fe forme un courant d'air qui traverfe perpétuellement le foyer.

On fait que c'eft avec de l'argille qu'on fait ces fourneaux, mais on ignore le nom de ceux qui les ont imaginés. Le befoin & l'expérience ont plus fervi ici que la théorie; & il paroît que ce font des ouvriers qui en ont fait la découverte.

Au refte Agricola a écrit clairement & pour fe faire entendre. C'est un mérite dont il faut lui tenir compte; car jusques-là on avoit affecté dans les livres de Chimie un ftyle obscur & énigmatique. A fon exemple, Vanhelmont Fioraventi, &c. fe firent un devoir d'inftruire véritablement le Public en s'exprimant comme Agricola. Ils découvrirent plufieurs remèdes & enfeignèrent divers moyens d'allier, de disfoudre & d'affiner les métaux. Mais tout cela étoit expofé fans ordre & fans méthode: ce ne fut que vers le milieu du feizième siècle, qu'on fongea à établir des principes, & à former de toutes ces découvertes un corps de doctrine.

Jacques Barner, médecin du Roi de Pologne, forma cette entreprise. Il rangea avec ordre les principales expériences de Chimie, & y joignit des explications raifonnées. Son ouvrage parut fons le titre de Chimie philofophique. II renouvelle dans ce livre le systême des alkalis

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