Imágenes de páginas
PDF
EPUB

que de-là dépendoit l'affermiffement de la religion AN. 1582. & de la difcipline; mais qu'il ne fuffifoit pas qu'il y eût de bonnes loix, s'il n'y avoit de bons magiftrats pour les faire observer: que les évêques étoient les magiftrats de l'églife, qu'ils devoient donc être faints; mais que ce n'étoit pas affez, & qu'il falloit qu'à la fainteté ils joigniffent la fcience, la fageffe & le talent de la parole, afin de pouvoir inftruire les peuples & leur parler avec fruit: ce font donc, dit-il, les hommes doctes & éloquens, les gens de bien qu'il faut nommer aux prélatures; autrement fi un aveugle en conduit un autre, ils tomberont tous deux dans la fosse. Mais au grand scandale de l'églife depuis quelques années, même depuis le concordat, toutes fortes de perfonnes indifféremment ont été promues aux dignités de l'églife, même aux prélatures par la fimonie, crime reprouvé de Dieu, par les pactions illicites, les confidences, les penfions fans l'autorité de l'églife, & par autres voies défendues, & cependant voies fi fréquentes en ce royaume, qu'il fuffit d'avoir aujourd'hui de la vertu, de la probité & de la science, pour être fans crédit ni considération; & que c'eft à celui qui a plus de bien & de faveur, qu'on départit les honneurs & les dignités de l'églife, dont ceux qui en font revêtus s'acquittent comme des chiens muets qui ne peuvent aboyer, qui laissent périr leurs brebis fans aucun fecours, & fe contentent d'une vaine oftentation & des revenus de leurs bénéfices.

Cet archevêque ajouta, que pour remédier à de fi grands maux, rien n'étoit plus efficace, que de rétablir les élections anciennes fuivant la forme du Aaaa

Tome XXXV.

AN. 1582. droit, & que fa majefté renonçât à toutes les prérogatives qu'elle s'étoit attribuée, & qui ne pouvoient que caufer la ruine de l'église & de l'état. Que c'étoit par cette raison que faint Louis ayant reçû un bref du pape, qui lui donnoit le pouvoir de nommer aux évêchés, il refufa d'en faire ufage, & le fit même déchirer & brûler en préfence du nonce qui le lui présentoit, en difant, qu'il ne pouvoit être juge de la suffisance & de la capacité de ceux qui étoient eux-mêmes les juges de fon ame & de fa confcience, & que ce pouvoir appartenoit à Dieu feul & à fon église ; & que fi la conduite de ce saint roi eût été obfervée jusqu'à notre fiécle, l'église & le premier ordre du royaume ne fouffriroient pas la triste désolation dans laquelle on les voyoit aujourd'hui plongés. Qu'il étoit donc néceffaire de rétablir l'ancienne forme d'élection pratiquée par les Apôtres, lorfqu'après l'invocation du Seigneur ils élurent Mathias en la place de Judas; & qu'en rendant ainfi les élections à l'églife, on verroit bien-tôt ceffer les abus, les bons pafteurs remplir leurs fonctions, les peuples rentrer dans l'obéissance qu'ils devoient à Dieu, & qui étoit inféparable de celle qui étoit dûe au roi. Le prélat représenta enfuite au roi, que le clergé étoit extrêmement chargé par les nouvelles décimes qu'on lui avoit impofées; qu'il étoit étonnant, que peu content des deux décimes impofées l'année derniere, on eût encore procédé à la levée d'une troifiéme, pour le payement de laquelle les pauvres bénéficiers étoient perfécutés les uns pour les autres, contre la difpofition du droit divin & humain, même du droit écrit, qui ne permettoit

pas que l'un puiffe être contraint pour l'autre. Que AN. 1582. cette troifiéme levée étoit d'ailleurs contraire à la

promesse faite par fa majefté dans le dernier contrat, & que les eccléfiaftiques n'y pouvant fatisfaire, étoient contraints d'abandonner leurs églises, & de laiffer les peuples fans fervice, fans inftruction, fans administration de facremens, de changer de profeffion, & de fe retirer où ils pouvoient trouver quelque azile. Que le clergé & l'église devoient être déchargés de telles exactions, & rétablis en leurs biens & poffeffions. Le prélat pria le roi en finiffant, de ne donner jamais à perfonne les bénéfices pendant la vie des poffeffeurs, pour cause de maladie, ou fous quelqu'autre prétexte, de crainte qu'on ne fouhaitât la mort des Titulaires.

XVIII.

demandes des

députés.

Après ce difcours, l'archevêque préfenta au roi Réponse du roi le cahier qui contenoit les demandes du clergé, & aux pria sa majesté d'y répondre. Le roi dit seulement, qu'il promettoit d'avoir à l'avenir, ainsi qu'il avoit toujours eu, tous les égards poffibles pour fon clergé. Cinq jours après étant avec la reine mere, les cardinaux de Bourbon, de Guise & de Birague, & plufieurs feigneurs, il donna audience aux mêmes députés ; & après leur avoir fait connoître les befoins de l'état, & combien fes finances étoient épuifées, il leur déclara que pour le préfent il ne pouvoit fe difpenfer d'exiger les fecours qu'il leur demandoit, mais que dans la fuite il auroit égard à leurs remontrances. A l'égard de la réception du concile de Trente, il leur dit que cette affaire étant du reffort de fon parlement, c'étoit lui qu'il falloit confulter là-dessus. It répondit fur l'article des élec

AN. 1582. tions, que fi elles avoient toujours été en vigueur, beaucoup de ceux qui les demandoient aujourd'hui avec tant d'inftances, ne feroient jamais parvenus: à l'épiscopat. L'archevêque de Bourges infista encore fur l'impofition de la nouvelle décime, & dit qu'il efpéroit que le clergé en feroit déchargé, après que fa majefté y auroit fait de férieufes réflexions: mais le roi voulut être obéï. Les députés ne réuffirent pas mieux dans quelques courtes conférences qu'ils eurent avec le premier préfident, touchant la publication du concile de Trente; & l'assemblée découragée par ce peu de fuccès, fe fépara le 9. d'Août de cette même année 1582.

XIX.

[ocr errors]

Mort du premier préfident Chrifto

phe de Thou,

des préfidens au

M. de Thou fon

Liv. 75.

Spond. hoc ann.

B. 24,

La France perdit dans cette année un des plus grands défenfeurs de fes priviléges, & l'un des plus Blanchard, hift. zélés pour le bien de la patrie, dans la perfonne de parlement. Chriftophle de Thou, premier préfident du parleVoyez l'hift. de ment de Paris, qui mourut le premier de Novemfils, fur la fin du bre, âgé de foixante-quatorze ans, deux mois & cinq jours. Il fut eftimé des rois, aimé du peuple & autant confidéré pour fa piété & la pureté de ses mœurs, que respecté pour fa profonde érudition, & fon amour pour la justice. Henri III. qui n'avoit pas eu beaucoup d'égard à ses avis, le regretta & le pleura après fa mort; & lorfque les troubles.commencerent, on lui entendit fouvent dire, que Paris ne se seroit jamais revolté, fi de Thou avoit été à la tête du parlement. Ce prince lui fit faire des obfeques folemnelles: le corps du défunt fut porté à l'église de faint André des Arcs, & enterré dans la chapelle de sa famille, où fa veuve fit ériger l'épitaphe qu'on y voit encore. Jean Prevôt, curé de faint Se

verin, prononça fon oraison funebre. Il laiffa plu- AN. 1582. fieurs enfans, entr'autres, le célebre historien Jacques-Augufte de Thou, & une fille nommée Catherine, femme d'Achille de Harlay, qui eut la charge de premier président, après la mort de son beaupere.

&

XX.

Charles pour en

Giufano vie de

:

A Milan, faint Charles devenu plus tranquille Soins de faine depuis qu'il y avoit dans la ville un nouveau gouver-tretenir fon peuple neur, ne profitoit de la paix qui lui étoit rendue, dans la piété: * que pour veiller avec plus de foin fur fon troupeau, s. Charles liv. 6, & vifiter fon diocèse. Il assembla plus fréquemment chap. 10. & fuiv. fes eccléfiastiques, afin de s'informer de leur conduite, en particulier du progrès qu'ils faifoient dans la piété & dans la difcipline, & pour les renouveller dans leur premiere ferveur par fes exhortations par les ordonnances faintes qu'il faifoit pour remédier aux abus qui pouvoient s'introduire dans les paroiffes. Au commencement de cette année il employa tous fes foins pour empêcher qu'on ne fit ni mascarades, ni bals, ni danfes, & autres jeux femblables les jours de fêtes, non-feulement pendant l'office divin, mais encore durant le refte de la journée; & il eut la confolation de réuffir, & de difpofer les fidéles à paffer faintement les jours confacrés au Seigneur : ce fut dans cet efprit, qu'il occupa fon peuple à des exercices continuels de piété, pendant les. derniers jours qui précédent le carême.

vincial.

XXI.

pro

Le 10. de Mai il tint fon fixiéme concile provin- Il tient fon fixiecial: neuf évêques s'y trouverent avec lui, qui fufu- me concile rent ceux de Tortone, de Cremone, de Bergame, Giuffano, it fu÷ de Brefcia, d'Afte, d'Alexandrie de la Paille, d'Al-prafliv. 6.ch. 13. ba, de Vintimiglia & de Cafal, avec les procureurs tom. 15. pag.706.

A aaa iij

Labbe, collect.

& feq.

« AnteriorContinuar »