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Va, ce n'eft qu'aux Tirans que tu dois tá colere;
De l'Etat & de toi je fens que je fuis Pere.
Donne ton fang à Rome, & n'en exige rien ;
Sois toujours un Héros, fois plus, fois Citoyen.
Je touche, mon cher Fils, au bout de ma carriere,
Tes triomphantes mains vont fermer ma paupiere;
Mais foutenu du tien, mon nom ne mourra plus;
Je renaîtrai pour Rome, & vivrai dans Titus.
Que dis-je? je te fuis. Dans mon âge débile.
Les Dieux ne m'ont donné qu'un courage inutile;
Mais je te verrai vaincre, ou mourrai comme toi,
Vangeur du nom Romain, libre encor, & fans Roy.
TITUS.

Ah! Meffala.

SCENE VI.

BRUTUS. VALERIUS. TITUS. MESSALA.

VALERIUS.

SEigneur, faites qu'on fe retire;

BRUTUS à fon Fils.

Cours, vole.....

Titus & Meffala fortent.

VALERIUS.

On trahit Rome.

BRUTU S.

Ah qu'entens-je!

VALERIUS.

On confpire.

Je n'en fçaurois douter; on nous trahit, Seigneur. De cet affreux complot j'ignore encor l'auteur; Mais le nom de Tarquin vient de fe faire entendre, Et d'indignes Romains ont parlé de fe rendre.

BRUTU S.

Des Citoyens Romains ont demandé des fers!

VALERIU S.

Les perfides m'ont fuï par des chemins divers;
On les fuit. Je foupçonne, & Ménas, & Lélie,
Ces Partifans des Rois, & de la Tirannie;
Ces fecrets Ennemis du bonheur de l'Etat,
Ardents à défunir le Peuple, & le Sénat.
Meffala les protege; & dans ce trouble extrême
J'oferois foupçonner jufqu'à Meffala même,
Sans l'étroite amitie dont l'honore Titus.

BRUTUS.

Obfervons tous leurs pas, je ne puis rien de plus; La Liberté, la Loi, dont nous fommes les Peres, Nous défend des rigueurs, peut-être neceffaires. Arréter un Romain fur de fimples foupçons, C'est agir en Tirans, nous qui les puniffons. Allons parler au Peuple, enhardir les timides,

Encourager les bons, étonner les perfides;

Que les Peres de Rome, & de la Liberté, Viennent rendre aux Romains leur intrépidité; Quels cœurs en nous voyant ne reprendront courage? Dieux donnez-nous la mort plûtôt que l'esclavage. Que le Sénat nous fuiye.

SCENE VII.

BRUTUS. VALERIUS. PROCULUS.

PROCULUS.

UN Efclave, Seigneur.

D'un entretien fecret implore la faveur.

BRUTUS.

Dans la nuit? à cette heure?

PROCULUS.

Oui d'un avis fidelle,

Il apporte, dit-il, la preffante nouvelle.

BRUTU S.

Peut-être des Romains le falut en dépend.
Allons, c'eft les trahir que tarder un moment.

A Proculus.

Vous, allez vers mon Fils; qu'à cette heure fatale Il défende fur tout la Porte Quirinale;

Et que la Terre avoue, au bruit de fes exploits, Que le fort du mon fang eft de vaincre les Rois. Fin du quatriéme A&te.

99983399***

ACTE CINQUIEME.

SCENE I.

BRUTUS. Les SENATEURS. PROCULUS. LICTEURS. L'Efclave VINDEX.

Ο

BRUTUS.

Ui, Rome n'étoit plus; ouï, fous la Tirannic
L'augufte liberté tomboit anéantie.

Vos tombeaux fe rouvroient; ç'en étoit fait; Tarquin
Rentroit dès cette nuit, la vangeance à la main.
C'est cet Ambaffadeur, c'est lui dont l'artifice
Sous les pas des Romains creufoit ce précipice.
Enfin, le croirez-vous? Rome avoit des Enfans
Qui confpiroient contre elle, & fervoient les Tirans.
Meffala conduifoit leur aveugle furie :

A ce perfide Arons il vendoit fa Patrie.

Mais le Ciel a veillé fur Rome & fur vos jours.
Cet Efclave a d'Arons écouté les Difcours,

En montrant l'Esclave.

Il a prévû le crime; & fon avis fidèle

A réveillé ma crainte, a ranimé mon zéle.

Meffala, par mon ordre arrété cette nuit,
Devant vous à l'inftant alloit être conduit;
J'attendois que du moins l'appareil des fupplices
De fa bouche infidêle arrachât fes Complices;
Mes Licteurs l'entouroient; quand Meffala foudain,
Saififfant un poignard qu'il cachoit dans son sein,
Et qu'à vous, Sénateurs, il deftinoit peut-être :
Mes fecrets, a-t-il dit, que l'on cherche à connoître,
C'eft dans ce cœur fanglant qu'il faut les découvrir;
Et qui fçait confpirer, fçait fe taire, & mourir.
On s'écrie, on s'avance, il fe frappe: & le traitre
Meurt encore en Romain, quoiqu'indigne de l'étre.
Déja des murs de Rome Arons étoit parti,
Affez loin, vers le camp nos Gardes l'ont fuivi;
On arrête à l'inftant Arons avec Tullie.

Bien-tôt, n'en doutez point, de ce complot impie,
Le Ciel va découvrir toutes les profondeurs;
Publicola par tout en cherche les Auteurs.
Mais quand nous connoîtrons le nom des Parricides,
Prenez garde, Romains; point de grace aux Per
fides,

Fuffent-ils nos Amis, nos Freres, nos Enfans,
Né voyez que leur crime, & gardez vos Sermens,
Rome, la Liberté, demandent leur fupplice;
Et qui pardonne au crime, en devient le Complice.

A PEfclave.

Et toi, dont la naiffance & l'aveugle destin N'avoit fait qu'un Efclave, & dû faire un Romain, Par qui le Sénat vit, par qui Rome eft fauvée, Reçois la Liberté que tu m'as confervée,

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