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dire avant l'action, que fi les François

avoient peur d'une bataille, ils n'a- HENRI IV. voient qu'à le laiffer faire & que lui 1590. feul avec les troupes fauroit bien ré

duire le Navarrois. Mais une faute inexcufable dans Mayenne, doutant comme il faifoit du fuccès, c'eft de n'avoir pas du moins pourvu à la retraite. Son armée fut entièrement difperfée; il fe retira prefque feul à Mantes, où il ne fit que pafler la nuit, encore dans les plus vives allarmes, à cause du voifinage des troupes victorieuses. Dès le lendemain il gagna Pontoise, & de-là S. Denis, n'ofant rendre les envieux qu'il avoit à Paris, témoins de fa honte. Le légat, l'ambaffadeur d'Efpagne, Les chefs de l'archevêque de Lyon & Madame de la Ligue le Montpenfier, allèrent le confoler & conférer fur les affaires du parti. Toutes les nouvelles qu'ils recevoient ne pouvoient qu'augmenter leur chagrin. La Ligue étoit battue par tout; les lieustenans de Henri tenoient librement la campagne. Pour lui, après la victoire, il foumit rapidement les villes voifines, il s'affuta des grands chemins & des rivières, & parut menacer Paris d'un fiége ou d'un blocus. Dans cette extremité, Mayenne écrivit les lettres les plus pref

confolent.

fantes au roi d'Efpagne. Ce prince avoit

HENRI IV. publié depuis peu un faftueux mani1590. fefte, dans lequel il fe déclaroit difpofé à ne point quitter les armes, qu'il n'eût exterminé l'héréfie, & réuni les princes Catholiques, pour chaffer les Tures de la terre fainte. Après ces magnifiques promeffes, il ne pouvoit fans honte abandonner la Ligue prefqu'au premier échec. Auffi fes agens s'engagèrent-ils en fon nom à un prompt & puiffant fecours. On fit les plus vives inftances auprès du fouverain Pontife; mais Sixte commençoit à agir en homme détrompé. Le duc de Luxembourg avoit déja eu plufieurs audiences, dont les Efpagnols & les Ligueurs reffentirent le contre-coup. La politique du Pape ne lui permit pas de marquer d'a bord clairement le changement de fes difpofitions. Il fe contenta de remettre à un autre temps, fous quelque prétexte, les fecours qu'il étoit peut-être déja déterminé à refuser.

On entame

sions.

Loin de laiffer entrevoir les craintes, des négocia- la Ligue dans fes écrits n'entretenoit le public que de fes efpérances; mais les démarches des chefs démentoient ces flatteufes promeffes, puifque dans le même temps ils fe donnoient tous les

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mouvemens poffibles pour entamer des
négociations; reffource ordinaire des HENRI IV.
foibles. Les pourparlers, qui devinrent 1590.
fi fréquens depuis ce moment jufqu'à
la fin de la guerre, étoient ordinaire-
ment de la part des Ligueurs, le fruit
de la néceffité; tantôt defir de gagner
du temps; tantôt envie de pénétrer les
deffeins des feigneurs Catholiques atta-
chés au roi, ou de les féduire, prefque
jamais volonté d'en venir à une conclu
fion. t

Ilsagirent long-temps d'après ce Conférence principe accrédité par les émiffaires de Noify. d'Elpagne, que le Bearnois ne fe convertiroit pas, & que quand même il le feroit, on ne devoit pas le reconnoître, parceque fa première apoftafie le rendoit à jamais indigne du trône. En conféquence ce n'étoit pas avec lui qu'ils prétendoient traiter, mais avec des feigneurs Catholiques de fon parti, dont ils avoient, difoient-ils, pitié comme de gens qui couroient aveuglément à Heur perte.. Tels étoient les motifs que publia le Légat, quand il demanda une entrevue au maréchal de Biron, peu de temps après la bataille d'Ivry. Mais fa feinte pitié ne trompa perfonne, & à travers fes déguifemens, on entrevis

fon but fecret, qui étoit de retarder les

HENRI IV. progrès du roi en obtenant une trève, 1590. ou une fufpenfion d'armes s'il avoit pu

Givry.

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Dans cette occafion, comme dans toutes les autres, Biron & les feigneurs Catholiques qui fe joignirent à lui, demandèrent permiffion au roi. Ils le firent par devoir, & auffi pour mortifier Gaëtan & les Espagnols, en leur montrant que cet accord, qu'ils ne vouloient pas être cenfé traiter avec le roi, étoit néanmoins uniquement fondé sur l'au torité qu'ils refufoient de reconnoître. Plaifanterie Il n'y eut rien de remarquable à l'entrevue de Noifi, qu'une plaifanterie d'Anne d'Anglure, connu fous le nom de Givry. Comme il étoit très bon officier, le légat employ a toutes fortes de careffes pour le détacher duroi. Voyant fes efforts inutiles, il l'exhorta du moins à demander au Pape, en la perfonne de fon repréfentant, pardon du paffe. Givry prend un air touché, fe profterne aux pieds du prélat & lui demande pardon des maux qu'il a faits aux Parifiens, & une abfolution générale. Le Légar la lui accorde très-fatisfait. Givry, toujours à genoux, ajoute: Donnezmoi auffi l'abfolution de l'avenir, parceque je fuis difpofé à ne leur pas moins

faire par la fuite. Il fe releve auffitôt

& difparoît. Quoiqu'on rit de cette fail- HENRI IV. lie, néanmoins à caufe du Légat, elle 1590. mortifia les fpectateurs,même royalistes. Ils lui en firent excufe, & l'entrevue finit par des politeffes réciproques comme elle avoit commencé.

Il s'entretint depuis des négociations tantôt publiques, tantôt fecrettes, entre Henri lui-même & Villeroi. Ce miniftre traitoit toujours; il s'avançoit, on défavouoit fes propofitions, & il ne fe rebutoit pas. On On juge par fon applica tion à justifier fa bonne foi dans les mémoires, qu'elle fut fouvent foupçonnée; fort ordinaire à ceux qui dans les affaires, fuivent plus la vivacité de leur zèle, que les lumières d'une faine politique.

Mort du

Charles X,

Lecardinal de Bourbon, reconnu roi par la Ligue, mourut dans le mois de prétendu roi mai. Ce prince reconnoiffoit publiquement le droit de Henri fon neveu ; mais de peur que les rebelles n'abufaffent de fa foibleffe, le roi fut obligé de le faire garder dans un château fort, où il finit fes jours. Cet événement mit de l'embarras dans les démarches des Ligueurs. Jufqu'alors les ordres s'étoient donnés: on avoit rendu des arrêts dans les parleTome III.

L

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