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qui a étudié

en Droit Civil.

D'ailleurs, à voir la manière dont il parle de l'estime que le P. Bouhours a fait paroître publiquement pour le Livre de la Bruyere, ne diroit-on pas que le P. Bouhours ne l'a loué qu'en termes vagues, & fans donner aucune raifon de fon eftime? C'est pourtant tout le contraire. Car non content de dire que la Bruyere penfe d'une ma niére folide & agréable, il tire des Caractères de ce fiècle, des penfées qui font effectivement pleines de folidité, d'agrément & de délicateffe. Par exemple après avoir dit † que la penfée d'un Ancien fur l'avantage qu'ont les Grands de faire du bien aux Petits, lui femble très-belle & très-nople, il ajoute : Un Auteur moderne, c'est-à-dire, la Bruyere, tourne agréa blement la même penfée en Satyre: » Les » Grands fe piquent, § dit-il, d'ouvrir une allée dans une forêt, "de fou

*Voyez la Note ci-deffus, pag. 380. + Penfées ingénieufes, pag. 194. Edition de Hollande.

§ T.I. Chap. IX, intitulé DES GRANDS pag. 414.

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» là.

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foutenir des terres par de longues » murailles, de dorer des platfonds, » de faire venir dix pouces d'eau, de » meubler une galerie: mais de ren»dre un cœur content, de combler » une ame de joie, de prévenir d'ex» trêmes befoins, ou d'y remedier, leur curiofité ne s'étend pas jufquesVigneul-Marville croyoit-il cet endroit mal penfé & plus mal exprimé? Pourquoi ne le faifoit-il pas voir en corrigeant ce qu'il y voyoit de faux, & en l'exprimant d'une maniére plus fine & plus agréable? C'étoit-la le vrai moyen de plaire au Public en cenfurant le Livre de la Bruyere: c'est par là qu'il pouvoit donner de l'autorité à fa Critique, affoiblir le témoignage du P. Bouhours, & plaire à fes Lecteurs en les inftruifant.

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Il y a, dit ailleurs la Bruyere, » un Païs où les joies font vifibles, » mais fauffes, & les chagrins ca"chés, mais réels.

"La Vie de la Cour, dit-il † en» core,

* Tom. I. Chap. VIII, DE LA Cour, pag. 397. † Ibid.

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core, eft un jeu férieux, mélancolique, qui applique. Il faut arran»ger fes piéces & fes batteries; » avoir un deffein, le fuivre, parer » celui de fon adverfaire, hazarder quelquefois, & jouer de caprice : » & après toutes ces rêveries & tou»tes ces mefures on eft échec, quelquefois mat: le plus fou l'emporte » & le plus heureux.

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Le P. Bouhours a trouvé à propos d'inferer ces deux paffages dans fon Recueil de Penfées ingénieuses; & selon luices fortes de définitions ou de defcriptions où l'antithefe joue un peu, ont quelque chofe de bien agréable. Vigneul-Marville eft-il d'un autre avis? Croit-il que le P. Bouhours n'a pas parlé de bonne foi en cette occafion, ou qu'il a eu tort de louer ces penfées, qui, felon lui, font fauffes & groffiérement exprimées ? Que ne faifoitil donc voir ce qu'elles avoient de faux? Ou s'il ne les croit pas fauffes, mais feulement affez mal tournées pourquoi ne leur donnoit-il pas un tour plus vif & plus agréable pour

*Pag. 217.

nous

nous convaincre tout d'un coup de la beauté de fon efprit, du peu d'adreffe de la Bruyere, & du mauvais goût du P. Bouhours? Mais il eft encore tems d'en venir à cette épreuve. Qu'il nous faffe voir cette rare merveille; & nous le regarderons comme le Phe nix des Ecrivains de ce fiécle.

XXII. APRE's le P. Bouhours, notre Critique met en jeu l'Abbé Fleury qui dans fon Remerciment à l'Acadé mie Françoife fit l'éloge de la Bruye re dont il prenoit la place, en ces termes» Le Public fait tôt ou tard juf »tice aux Auteurs; & un Livre lû

de tout le monde, & fouvent rede » mandé ne peut être fans mérite. » Tel eft l'Ouvrage de cet ami done > nous regrettons la perte, fi prom» pte, fi furprenante; & dont vous » avez bien voulu que j'euffe l'hon» neur de tenir la place: Ouvrage

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fingulier en fon genre; & au juge»ment de quelques-uns, au-deffus » du grand Original que l'Auteur s'é

» toit

Les Caractères de ce fiècle, dont la huitiéme Edition eft la dernière que la Bruyere a revûe & augmentée.

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toit d'abord propofé. En faisant le caractère des autres, il a parfaite "ment exprimé le fien: on y voit » une forte méditation & de profon» des réflexions fur les efprits & fur » les mœurs on y entrevoit cette » érudition qui fe remarquoit aux qui » occafions dans fes conversations particuliéres, car il n'étoit étranger » en aucun genre de doctrine : il fa"voit les Langues mortes & vivantes. On trouve dans fes Caractères une fevére critique, des expreffions vives, des tours ingénieux, des peintures quelquefois chargées » exprès pour ne les pas faire trop "reffemblantes. La hardieffe & la » force n'en excluent ni le jeu ni la » délicateffe par-tout y régne une » haine implacable du vice, & un » amour déclaré de la vertu : enfin » ce qui couronne l'Ouvrage, & » dont nous qui avons connu l'Auteur » de plus près pouvons rendre un témoignage, on y voit une Religion fincére, Toutes ces louanges ont un air de vérité qui les rend refpectables. Qu'en juge Vi gneul-Marville? Il les compte pour

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