par l'application des regles à des ouvrages modernes, par des exemples choifis & des morceaux de comparaison, j'ai tenté de tracer aux jeunes gens les routes qu'ils doivent fuivre foit pour cultiver leur génie, pour former leur goût. foit C'eft eux principalement, c'est leur utilité que j'ai eû en vuë, voila mon véritable objet. J'ai voulu les mettre en état de lire les Poëtes avec fruit, avec reflexion; & pour cet effet j'ai raffemblé tout ce que j'ai trouvé dans les Auteurs Modernes, de meilleur relativement à cette fin, en forte qu'à proprement parler,ce n'eft point moi qui inftruirai mes Leteurs, mais Defpréaux, & fes amis, fes contemporains, fes éleves. C'est le P. Rapin, Racine Corneille, Moliere Rouffeau, qui prendront le ton dogmatique; & perfonne plus qu'eux n'a droit de le prendre avec le public. Ces Ecrivains auffi bons Critiques que Poëtes célébres, éclairciffent par leurs reflexions les préceptes de l'Horace François, ou les démontrent par des exemples dans le choix defquels j'ai moins confulté mon goût particulier que celui du public, décidé depuis longtems fur le mérite de ces Auteurs. La fidelité avec laquelle j'ai cité ceux dont j'ai emprunté des lumieres, me juftifie affez du crime de plagiat, & d'ailleurs j'avoue que je n'ai nullement aspiré à donner un Ouvrage de pur Génie; j'ai feulement prétendu recueillir ce que des Écrivains fameux nous ont donné de plus certain fur la Poëtique, & raf femblant en un corps divers morceaux épars dans des livres que tous les Lecteurs n'ont ni le loifir ni la facilité de confulter, j'ai voulu difpenfer les jeunes gens du foin des recherches & leur tracer fuccinctement les principes qu'il leur importe de n'ignorer pas fur la Poëfie. Les amateurs de fes productions y trouveront réüni ce qu'ils avoient vû féparé dans les lectures variées qui font leur amufement. Quant aux Sçavans de profeffion, s'ils veulent bien confidérer qu'ils ne font pas venus tels tout à coup, & que ceux qui leur fuccéderont doivent commencer à s'inftruire ils n'en feront que plus difpofés à faire grace aux défauts de l'ouvrage qu'on foumet à leurs lumieres, en faveur des vuës que l'Auteur s'eft propofées; je de les confidere & les refpecte comme mes maîtres, & ce net feroit pas me rendre juftice que de m'imputer la témérité d'avoir voulu leur adreffer des leçons. Il ne me refte plus qu'à dire un mot de la forme de cet Ouvrage. Une Poëtique complete auroit embraffé la Poëfie en général & en particulier, elle auroit traité par Chapitres & par articles,de la fable & de fon or donnance, du choix des perfonnages & des incidens, des mœurs, des fentimens, des paffions,des figures, de la diction, de l'Harmonie, de la versification. La nature des divers genres de Poëfies eut exigé le même ordre & la même méthode pour chacun d'eux. Il eut été difficile de ne pas multiplier les volumes, d'éviter les redi tes, & peut-être l'ennui prefque toujours inféparable des longs ouvrages. Des réflexions détachées telles que font ces principes, fans omettre rien d'important ont au moins le mérite de la variété, & ne demandent point de contention d'efprit pour en suivre le fil ; on peut en interrompre & en reprendre aifément la lecture confulter certains endroits préférablement à d'autres, méthode peut-être moins exacte & moins fçavante que la premiere,mais certainement plus conforme au goût & au caractere des perfonnes pour lesquelles eft principalement deftiné cet Ouvrage que je ne leur offre qu'au défaut de tout autre dans le même genre. Si quid novifti rectius iftis Horace, Candidus imperti, fi non his utere mecum, |